Or changer est beaucoup plus compliqué que d'avoir des idées. « Le changement réussi est nécessairement double : il traite de la réalité et de la perception, c'est-à-dire de la façon dont les personnes concernées vont vivre ce changement. » Exemple dans le cadre des fusions-acquisitions qui se succèdent dans le secteur : « L'entreprise C n'existe vraiment que quand les gens ne disent plus 'je suis un ancien A' ou 'un ancien B'. » Luc de Brabandère en tire la conclusion suivante : « L'innovation peut être définie comme un changement de la réalité. La créativité comme un changement de la perception. » Si bien que pour le consultant, l'innovation est synonyme de continuité, et la créativité de rupture. Donc, « d'une certain manière, plus on innove, moins on est créatif. » Google, au début, a innové, en améliorant son algorithme et ses capacités de recherche. Puis « il y a eu ce courriel des patrons, a raconté Luc de Brabandère, qui disait 'notre métier, c'est de tout savoir' ». L'ambigüité instaurée par cette affirmation a mis l'entreprise en position d'inventer de nouveaux services. « Ambigüité peut aussi vouloir dire potentiel, c'est une bonne chose. L'ambigüité donne la possibilité à des idées de grandir. » « La meilleure manière d'avoir une bonne idée, c'est d'en avoir beaucoup » La capacité de porter un regard différent sur des idées neuves n'est pas innée. Luc de Brabandère s'est ainsi amusé à rejouer des extraits de brainstorming que chacun a pu vivre un jour ou l'autre, le « j'ai une idée » d'un collaborateur se heurtant généralement très rapidement au « vous n'y pensez pas, voyons » de son chef. « Pas une seule idée n'est née bonne, a expliqué le consultant. Cela paraît idiot, mais on se comporte comme si c'était le cas. Or, la meilleure manière d'avoir une bonne idée, c'est d'en avoir beaucoup. Il faut d'abord être préparé à accueillir ces idées, pour aller dans un deuxième temps vers la bonne idée. » A l'appui de cette logique, Luc de Brabandère a donné en exemple Thomas Edison. « Avant lui, il y avait une espèce de règle : tout le monde pensait qu'éclairage signifiait feu. Edison a cassé la règle, il s'est dit 'tiens, si je faisais de la lumière sans feu'. » Et il a inventé l'ampoule électrique. Bien sûr, le consultant a aussitôt ajouté que Thomas Edison avait aussi « inventé 500 moyens de ne pas faire une ampoule ». Casser les règles est donc une façon de parvenir à inventer. Il peut s'agir, a indiqué le consultant, de penser à créer une « bisociation : associer deux éléments qui existaient avant séparément ». Comme pour le cas de la planche à voile : planche et voile existaient auparavant, mais le premier qui les a bisociés a inventé quelque chose. Une telle attitude engendre évidemment de la résistance. « J'aurais aimé être là, s'est amusé Luc de Brabandère, à une réunion de la Nasa, lorsque quelqu'un a dit : 'j'ai une idée, si on mettait des ballons gonflables autour du robot pour son atterrissage'. » Pour vaincre cette résistance, le directeur associé du BCG invite les chefs d'entreprise à « redécouvrir la capacité de s'étonner », et « à douter », ce qui permet de remettre des règles en cause, en les considérant après tout comme de simples hypothèses. Il n'y a qu'ainsi, a-t-il expliqué, qu'on peut être créatif, et inventer des produits de rupture, comme Youtube ou l'iPod. « Innover, c'est faire du neuf dans le système. Etre créatif, c'est penser à un système neuf. »
USI 2009 : il faut douter pour inventer, explique le Boston Consulting Group
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