C'est par un bref communiqué tranquillement posté sur son site Internet le 31 janvier dernier qu'Intel a indiqué que la prochaine version d'Itanium, nom de code Kittson, serait produite selon un procédé de fabrication à 32 nanomètres, ce qui est le cas de la version actuelle, et non selon un processus plus avancé (22 nm), comme prévu initialement. Intel ne rendra pas non plus Kittson compatible avec les cartes mères de ses puces x86 Xeon, comme annoncé il y a quelques mois, ce qui aurait permis à Intel et à HP, principal vendeur de systèmes Itanium, de réduire leurs coûts de fabrication. « Kittson sera monté sur le même socket que celui utilisé pour les puces Itanium 9300 et 9500 actuelles », a déclaré Intel. « Le modèle de développement modulaire, qui permettrait d'associer le connecteur de puce Intel Xeon/Intel Itanium et la carte mère, sera reconsidéré en fonction des opportunités », a déclaré Intel.
Selon certains observateurs, ces décisions laissent craindre une sombre destinée pour les systèmes Itanium. « On peut facilement imaginer que c'est une manière d'arrêter le développement et de préparer une stratégie de sortie », a déclaré l'analyste Nathan Brookwood d'Insight64. « Il se pourrait bien que la période Itanium touche à sa fin », a-t-il ajouté. Martin Reynolds, analyste chez Gartner, croit encore qu'Itanium pourra bénéficier d'un nouveau procédé de fabrication, même revu à la baisse, si la demande s'améliore suffisamment pour que l'investissement soit rentable. Mais il ne prévoit pas de mises à jour importantes pour la microarchitecture. « Je pense que ce dont nous parlons sera réduit », a-t-il dit.
La fin d'un cycle ?
Intel a commercialisé Itanium en 2001 avec l'espoir de rivaliser avec les puces RISC utilisées dans les serveurs Unix. Mais les ventes n'ont jamais atteint les volumes attendus. Les premières versions d'Itanium (Merced) étaient peu performantes. AMD a été aussi plus malin qu'Intel en livrant une version 64 bits de son processeur pour serveurs x86, une stratégie copiée ensuite par Intel. Pourtant, HP et Intel ont longtemps martelé leur fort engagement pour Itanium, et l'ont encore répété cette semaine. Dès le début, HP a renoncé à sa propre puce PA-RISC, et en optant pour l'Itanium elle est devenue beaucoup plus dépendante de ce design que les autres fournisseurs de serveurs. HP a même reconnu avoir payé des millions de dollars à Intel pour supporter le développement de la puce serveur.
Mais l'avenir des systèmes Itanium s'est écrit ailleurs. Compte tenu du médiocre volume de livraisons, des vendeurs comme Red Hat, Microsoft et Oracle ont cessé de livrer des mises à jour logicielles compatibles avec la puce. Après la plainte déposée par HP contre Oracle pour violation de contrat, ce dernier a été obligé de reprendre le développement pour les systèmes Itanium. La réaction des clients d'Oracle y a aussi contribué. « Quand Oracle a annoncé qu'elle ne développerait plus de logiciels pour les systèmes Itanium, beaucoup de clients ont été effrayés », a déclaré Martin Reynolds. On ne sait pas ce qui a poussé Intel et HP à revoir brutalement leurs plans pour Itanium, mais il est possible que les clients, inquiets d'un retrait d'Oracle, aient informé HP de leur intention d'abandonner la plate-forme. « De toute évidence, le logiciel de base de données est un élément crucial dans ce type de système haut de gamme, et c'est beaucoup plus facile pour un utilisateur final de modifier la plate-forme matérielle sous-jacente que de changer la base de données sous-jacente », a déclaré Nathan Brookwood.
Un chiffre d'affaires Unix en baisse
Le chiffre d'affaires de la division Business Critical Systems de HP, qui produit les serveurs Itanium, a chuté de 23 % en 2012 par rapport à l'année précédente. Selon les prévisions faites en décembre par IDC, les livraisons de serveurs Itanium devraient se maintenir à un niveau à peu près stable jusqu'en 2016, à environ 26 000 systèmes par an dans le monde, soit environ deux fois moins que le volume de 2008. HP a commencé à mettre en place des solutions pour aider les clients à passer de l'Itanium aux processeurs Xeon s'ils le souhaitent. Dans le cadre de son programme Odyssey, le constructeur a développé un serveur Integrity Superdome, nom de code de Dragon Hawk, qui va permettre aux clients d'utiliser des lames Itanium et Xeon dans un même châssis.
HP et Intel ont également pris des mesures pour réduire leurs coûts de développement Itanium. Ils utiliseront les mêmes chipsets et composants externes que le Xeon. En novembre dernier, les deux entreprises avaient annoncé qu'elles iraient plus loin encore, en utilisant par exemple la même carte mère pour l'Itanium et le Xeon, plus quelques éléments « silicium » similaires au niveau des composants. Ces mesures de réduction des coûts sur le long terme rendent le développement d'Itanium plus viable. Mais les entreprises ne feront plus d'investissement, du moins pour l'instant. Le fait de conserver le même procédé de fabrication va aussi leur permettre de réaliser des économies. « En renonçant au processus de fabrication à 22 nanomètres, elles vont certainement beaucoup réduire leurs coûts de R&D », a déclaré Nathan Brookwood.
Intel revoit à la baisse ses projets Itanium
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Réaction
Intel a revu à la baisse la feuille de route de sa plateforme Itanium. Le futur processeur Kittson ne sera pas fabriqué en 22 nm et ne sera pas socket compatible avec la puce Xeon. Après l'épisode Oracle, cette décision suscite de nouvelles interrogations quant à l'avenir de la puce serveur 64-bits utilisée principalement dans les serveurs haut de gamme Integrity de Hewlett-Packard.
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