Par ailleurs, on vit également la revanche des fabricants de téléviseurs. Au milieu des années 90, l'industrie informatique n'avait qu'une idée en tête, prendre le contrôle du téléviseur en le transformant en terminal informatique. Mais les quelques initiatives lancées à l'époque échouèrent lamentablement, ni les contenus ni les usages ne permettant alors une telle transformation. Tout commence à changer aujourd'hui. Avec le haut débit et les box de connexion fournies par les opérateurs télécoms à leurs abonnés, le téléviseur devient interactif et peut se substituer au PC comme terminal Internet. Une évolution bien comprise par les fabricants d'électronique grand public qui ont tous lancés des téléviseurs connectées avec une idée en tête, fournir seul ou en partenariat avec l'audiovisuel ou les acteurs de l'Internet des nouveaux services et des contenus permettant de récupérer un revenu supplémentaire auprès de l'abonné télécoms.
Cette évolution se double d'une deuxième avancée, les « box over the top » qui permettent de fournir sur le téléviseur les flux audiovisuels (TNT) et Internet et ouvrant le marché des abonnés télécoms à tout un tas d'acteurs nouveaux. Un fabricant comme le français Netgem travaille dans cette direction. Pour les opérateurs télécoms, la conclusion à tirer de ces révolutions et de la leçon Apple est simple. S'ils veulent garder le contrôle de l'accès, ils doivent avoir une offre de contenus. Et en dehors des produits d'origine américaine, un seul autre produit audiovisuel permet de capter l'audience, le sport et plus précisément le football. Ce fut d'ailleurs le sujet d'une conférence de presse organisée il y a un an par France Télécom pour défendre sa stratégie médias. Raoul Roverato et Xavier Couture avaient alors clairement exposé les conséquences de ces révolutions. Difficile de croire qu'ils aient changé d'avis un an plus tard.
Un marché structuré autour du triple play
Certes le modèle de distribution exclusive adoptée alors pour les chaînes maison était difficilement tenable à long terme, la réglementation en place s'étant prononcée en faveur d'un modèle ouvert d'auto-distribution, c'est-à-dire de mise à disposition des chaînes aux autres réseaux de diffusion. Cette nécessité est d'autant plus grande pour l'opérateur français, par rapport à d'autres opérateurs européens, que le marché français du haut débit s'est structuré autour du triple-play alors qu'un seul acteur a la main sur le marché de la télévision payante. Ce qui n'est pas le cas en Grande-Bretagne où BSkyB doit affronter la concurrence notamment du câblo-opérateur Virgin Media, ou en Italie où Mediaset et Sky se livrent une guerre acharnée. Toute initiative de Canal + dans le haut débit aurait d'importantes répercussions sur les opérateurs télécoms, dans la mesure où il serait le seul à pouvoir proposer des services audiovisuels à valeur ajoutée.
De plus, le prix du triple-play en France, parmi les plus bas du marché européen, est trop bas, aux dires de tous les acteurs y compris de Free qui évoquait en mars dernier une nécessaire augmentation des tarifs. Pour le moment, les opérateurs imaginent pouvoir faire passer cette hausse en proposant des services payants complémentaires, rendus possibles par la fibre optique. A condition qu'ils aient les bons contenus. Ce qui n'est pas gagné compte tenu de la nouvelle donne dans l'audiovisuel. En proposant de véritables services de télévision de rattrapage ou de vidéo à la demande gratuits, ou quasi gratuits, disponibles sur l'écran de télévision, les géants de l'Internet pourraient facilement convaincre les consommateurs de l'inutilité de payer les opérateurs au-delà du service d'accès de base. Or sans ces revenus complémentaires, comment les opérateurs pourront-ils rentabiliser leurs investissements dans les tuyaux et redonner de la valeur aux réseaux ?
Activités audiovisuelles, où va France Télécom ?
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