Quels sont les principaux défis auxquels le système de santé est actuellement confronté ?

Olivier de la Boulaye : Le système de santé actuel fait face à plusieurs défis majeurs. L'accès aux soins se complexifie en raison de l'augmentation des besoins épidémiologiques et du vieillissement de la population. Ce phénomène accroît la demande de prise en charge, notamment avec les patients polypathologiques. Mécaniquement, la pression sur le personnel soignant s'intensifie. Toutefois, le nombre de soignants n'augmente pas proportionnellement aux besoins et la formation peine à suivre le rythme, ce qui accentue encore cette pression sur les équipes en place.

D'autre part, les progrès médicaux, bien qu'ils aient amélioré la prise en charge et l'espérance de vie des patients, engendrent des coûts élevés. Par exemple, le coût moyen des dix-neuf dernières molécules autorisées par l'agence américaine de régulation est de 220 000 dollars par traitement. Chaque système de santé doit donc repenser son modèle de solvabilité et investir davantage dans la prévention car un système de répartition traditionnel pourrait ne plus suffire à répondre à ces exigences financières.

Quels sont les axes principaux pour améliorer la situation et quels rôles jouent le numérique et le cloud ?

ODB : Deux axes principaux se dessinent. Le premier consiste à faire du patient un acteur de sa propre prise en charge. Le numérique joue ici un rôle clé à plusieurs niveaux. Par exemple, des applications peuvent aider le patient à comprendre sa pathologie et à prévenir les complications. Le cloud, de part son accessibilité et son agilité, permet de soutenir le traitement d’un grand nombre d’informations à moindre coût pour personnaliser l’expérience patient notamment dans le cadre de la mise à disposition d'applications de coaching personnalisées pour l’accompagnement de maladies chroniques.

Les applications de télésurveillance médicalisée constituent un autre exemple concret. Divers acteurs comme Healabs, Sêmeia ou Satelia se positionnent sur des aires thérapeutiques spécifiques, telles que l'insuffisance rénale ou cardiaque, ou certaines typologies de diabètes. En France, un remboursement de droit commun a été instauré pour ces dispositifs, les assimilant aux dispositifs médicaux traditionnels. Par conséquent, les éditeurs de logiciels qui développent ces outils doivent se conformer aux mêmes normes que les fabricants de dispositifs médicaux, avec un volet assurance qualité très important et un besoin de gestion toujours plus industrielle et sécurisée de leurs infrastructures, ce que le Cloud peut faciliter.

Le second axe majeur est l'amélioration de la coordination entre les acteurs de santé, qui pose la problématique de la régulation de l’accès aux soins et de l’organisation des différentes parties prenantes. Dans certains pays, toute consultation nécessite un appel préalable auprès d’un centre de régulation afin de qualifier le besoin médical et rediriger vers le bon spécialiste. Sur le plan numérique, cela accentue le besoin d’interopérabilité et d’urbanisation harmonisée. Le cloud a un rôle important à jouer dans la mise en œuvre de ce type de solutions.

Comment tirer parti de l'intelligence artificielle dans l'optimisation des outils pour les soignants ?

ODB : Les solutions d’IA joue un rôle grandissant, notamment de par leur faculté à réduire le temps alloué aux tâches administratives. L'IA peut considérablement optimiser le temps des soignants en automatisant certaines tâches pour aider au diagnostic, générer des comptes rendus ou aider à la prescription personnalisée. Des sociétés comme Vidal ou Synapse exploitent l’IA pour agréger de nouvelles données au sein du dossier patient et affiner ainsi les prescriptions médicales.

Cependant, l'efficacité de l'IA dépend de la manière dont les organisations s'approprient ces outils et les intègrent dans leurs pratiques quotidiennes. Il est donc important de s’appuyer sur des partenaires éditeurs et intégrateurs maîtrisant parfaitement l’expérience utilisateur, la combinaison d’éléments fonctionnels, d’interfaces mais également de performances, de sécurisation et de résilience, le tout, dans un cadre de gestion très réglementé qu’est la gestion des données de santé.

OVHcloud propose un catalogue de service cloud complet certifié hébergeur de données de santé, garantissant un niveau de protection des infrastructures et répondant aux besoins d’intégration de nouvelles technologies.

Comment résumer le rôle d'OVHcloud dans cet écosystème de santé ?

ODB : OVHcloud joue un rôle clé en tant que premier hyperscaleur européen proposant des services Cloud et une plateforme d’API pour des projets d’Intelligence Artificielle adaptés à la criticité des données de santé et aux enjeux de souveraineté des acteurs de soins. Son positionnement tarifaire issu d’économies d’échelle avec sa dimension mondiale et sa culture historique de compétitivité, permet aux acteurs de la santé et aux éditeurs de réaliser des économies importantes dans un contexte où les ressources et le financement se raréfient. Nos environnements HDS s’appuient sur des dispositifs de sécurité avancés pour les accès réseau et assurent de hauts niveaux de performance pour garantir la réactivité des applications de santé.

En parallèle, nous accompagnons nos clients sur le plan réglementaire. OVHcloud contribue à l'écosystème en termes de maturité des référentiels de conformité et applique bien entendu ces référentiels à ses propres opérations, dans le respect des normes ISO, des référentiel HDS et SecNumCloud.

OVHcloud s’engage également en faveur de l'innovation et du développement des start-up : comment se matérialise cette action dans le domaine de la santé ?

ODB : Effectivement, OVHcloud contribue à l'innovation en collaborant techniquement avec des acteurs majeurs comme l’APHP et en proposant des environnements qui facilitent le développement d'applications aux standards internationaux, comme le standard FHIR ou DICOM pour l'interopérabilité des données de santé.

Nous soutenons également un large écosystème de startups, avec plus de 285 startups coachées dans le domaine de la santé. Par le biais de son programme Open Trusted Cloud, OVHcloud aide à promouvoir des solutions SaaS innovantes auprès des acteurs de santé.

Moderniser le SI de santé implique d’optimiser l’accès et la collecte des données : comment agissez-vous en ce sens ?    

ODB : Les travaux que nous menons actuellement sur la standardisation des environnements PaaS et l'utilisation de normes telles que FHIR et DICOM contribuent à simplifier l’accès aux données. Nous accompagnons nos clients dans la construction de datawarehouses basés sur ces standards, afin de faciliter l'échange de données.
OVHcloud collabore également avec des éditeurs et des partenaires spécialisés dans l'extraction et le traitement des données de santé – structurées ou non structurées – en exploitant notamment l’IA pour faciliter la transformation des données aux formats souvent hétérogènes, et parfois exotiques…

Nous aidons également à mettre en commun des connecteurs entre différents éditeurs, le but étant de créer un écosystème interconnecté de type market place.

La migration vers le cloud doit-elle se faire par étape ? Quelle stratégie adopter ?  

ODB : Il y a quelques années, les Groupements Hospitaliers de Territoire (GHT) voyaient le jour pour répondre à un besoin croissant de mutualisation des infrastructures de santé. Le cloud représente une étape cruciale pour faciliter cette convergence. Cependant, la transition doit se faire progressivement, avec la coopération de tous les acteurs impliqués, notamment les établissements de santé et les éditeurs de logiciels, qui y jouent un rôle clé. Certaines applications on premises, installées localement, n’étant pas encore prêtes ou n’ayant pas vocation à être migrées dans le cloud, une approche hybride devra nécessairement être envisagée afin d’étendre progressivement les infrastructures sur site.  

La force d’OVHcloud réside dans sa capacité à offrir à la fois une approche de cloud classique mutualisée mais également une approche dédiée avec l’offre Hosted Private Cloud ou encore une approche unique hybride appelée On-Prem Cloud Platform. Cette solution permet de bénéficier des technologies du cloud au sein même du datacenter de l’établissement hospitalier, permettant une intégration étroite entre les ressources sur site et celles mutualisées dans le cloud.

Nous croyons fermement à cette approche hybride dans le domaine de la santé, qui requiert des performances élevées et des temps de réponse très courts pour certains usages, nécessitant des infrastructures de proximité. Une telle transition – à la fois culturelle et technologique – implique que les équipes IT conservent leur savoir-faire en matière de gestion d’un datacenter tout en développant une expertise cloud pour gérer les débordements, augmenter les capacités de calcul pour répondre aux nouveaux usages impulsés par l’IA notamment, et répondre à l'augmentation exponentielle du volume des données. Nous travaillons avec un grand nombre d’intégrateurs partenaires pour démultiplier cette vision et accompagner cette nécessaire mutation.