« Une arme de guerre anti turn over »
La direction des systèmes d'information de Bouygues Telecom (1000 collaborateurs, dont 300 issus de prestataires) a mis en place un dispositif de gestion de carrières destiné à faciliter le transfert de compétences au sein de ses équipes et d'accroître son attractivité. Le point sur cette initiative avec Yves Caseau, DSI de Bouygues Telecom.
Lemondeinformatique.fr : Quels sont les enjeux et la philosophie du dispositif de gestion de carrières mis en place au sein de la DSI?
Yves Caseau : Notre société évolue dans un environnement en perpétuel mouvement, qui change très vite et qui exige que nous nous adaptions en permanence pour continuer à accroître notre qualité de service. Pour s'adapter, le plus important n'est pas tant d'avoir les bonnes compétences que de bénéficier d'un processus qui permette de les accueillir et de les former. Face à ce constat, nous nous sommes posés la question de la façon dont nous pourrions faire vivre notre portefeuille de compétences, en dehors du mouvement des entrées et des sorties des collaborateurs et des actions de formation classiques, afin qu'il gagne en souplesse. Pour y répondre, nous avons monté un dispositif de formation et de transmission des compétences. L'idée qui se trouve au coeur de ce dispositif est de faire en sorte que l'ensemble des collaborateurs de la direction des systèmes d'information profite des connaissances des plus expérimentés.
L'autre enjeu est de rendre la DSI plus attractive en offrant aux informaticiens des projets intéressants mais aussi un environnement intellectuellement stimulant, où chacun peut progresser. C'est une arme de guerre anti turn-over, bien que ce dernier soit pour l'instant peu élevé.
Comment se concrétise ce dispositif ?
Nous avons mis en place des « filières » ou parcours professionnels, qui permettent d'identifier et de récompenser l'excellence technique, mais aussi la volonté et la qualité de la transmission des compétences. Les personnes qui les intègrent ont à leur disposition un ensemble de « moyens » pour progresser, comme, par exemple, un accès facilité aux plus hauts niveaux de management, des accès à des conférences en France et à l'étranger, à certaines formations particulièrement pointues, etc. Elles intègrent par ailleurs le réseau interne de partage de connaissances et de bonnes pratiques qui leur permet de développer leurs savoirs et de participer à la croissance des compétences de la DSI, ce qui est essentiel. En effet, ce réseau constitue véritablement notre poumon interne. Enfin, pour accroître la visibilité et la reconnaissance des compétences de ces personnes à l'extérieur de la société, nous montons des parcours de formation certifiants dont elles pourront profiter.
Combien avez-vous de filières ? Comment y accéder et combien de niveaux comptent-elles ?
Nous avons trois filières qui comptent chacune deux niveaux de compétences distincts. La première rassemble 50 à 60 collaborateurs et s'adresse aux experts techniques de tout type, des architectes, des experts métiers, des spécialistes du développement, de l'exploitation et de l'intégration, etc. La deuxième totalise 30 à 40 collaborateurs et concernent les directeurs de projets La troisième, qui a été lancée il y a trois mois est réservée aux spécialistes des tests (40 à 50 collaborateurs).
Tous les informaticiens peuvent faire la demande pour accéder à ces filières, à condition d'être cooptés par une personne déjà en place. Ils doivent remplir un dossier qui sera examiné par un comité de la DSI. Les candidats sont évalués sur trois axes : leur état d'esprit, disponibilité et qualités relationnelles, leurs compétences et leurs qualités pédagogiques. Ce dernier axe se mesure, par exemple, par leur capacité à produire des documents accessibles à tous, même sur un sujet très technique.
Ce dispositif ne risque t-il pas de créer de différenciations entre les collaborateurs de la DSI ?
Nous manquons encore de recul pour répondre à cette question puisque la première filière a un an environ. La meilleure façon d'y répondre jusqu'à présent est pour nous d'être totalement transparent sur le dispositif, de l'ouvrir à tous et de justifier les éventuels refus. Par ailleurs, jusqu'à présent, la sélectivité a plutôt un effet stimulant. Elle crée de l'émulation et de l'envie au sein de nos équipes.