Très engagé dans le développement des PME françaises à tous les niveaux, qu’il s’agisse de financement ou de conseil, Bpifrance se préoccupe aussi de leur maîtrise des outils numériques. Sur ce terrain, la banque publique vient de lancer un guide pratique en ligne et l'app mobile Digital Guide. Une étude de Bpifrance Le Lab a en effet révélé que, sur 1800 dirigeants de PME-ETI interrogés, près de 9 personnes sur 10 ne faisaient pas du numérique une priorité stratégique pour leur entreprise. Encore une fois, il semble que ce soit la complexité du sujet qui rebute, tandis que n’apparaissent pas clairement les bénéfices qu’il serait possible d’en tirer. « Nous sommes persuadés que c’est fondamental pour les entreprises aujourd’hui, comme l’est la transformation environnementale », nous a indiqué Guillaume Mortelier, directeur exécutif responsable de l’accompagnement chez Bpifrance. Le guide et l’app mis gratuitement à disposition visent donc à « poursuivre la sensibilisation des entrepreneurs sur les enjeux digitaux ». Il s’agit concrètement de pouvoir « mettre en œuvre des initiatives assez simples pour montrer aux dirigeants et aux collaborateurs que l’on peut progresser avec le digital ».
Le Digital Guide accompagne pas à pas l'entreprise dans les actions proposées. Sur l’emailing, par exemple, dispose-t-elle d’un fichier clients avec les adresses, l’a-t-elle segmenté, a-t-elle un prestataire… Les connaissances sont testées au fil de l’eau avec des quiz. (Crédit : Bpifrance)
L’approche est différente entre les deux outils fournis. Sous l'intitulé « La transformation à l’ère du digital, guide pratique à destination des dirigeants de PME-ETI », l'outil en ligne présente 4 « ambitions stratégiques » axées sur le client final, l’organisation, l’écosystème et l’offre. « Nous proposons de réfléchir sur les objectifs, de hiérarchiser le projet, c’est très méthodologique ». Une fiche technique explique par exemple comment identifier les irritants clients, une autre, sur l'organisation interne, propose de cartographier les instances et les rites existants. D'autres fiches portent sur la recherche des bons partenaires et sur la façon de créer et d'imaginer des bouquets d'offres. « L’app est beaucoup plus dans une logique MooC, plus interactive ». Elle est disponible en version iOS ou Android et propose un sujet par semaine pour activer rapidement des actions numériques concrètes dans l'entreprise. « Nous allons vers les entreprises avec des outils qui correspondent à leur mode de fonctionnement ». L'essentiel est de réfléchir aux apports du numérique pour l'entreprise. « Quel impact sur la production, sur le pilotage de l’activité et sur la transformation 360, de la matière première jusqu’au client », expose Guillaume Mortelier. « Nous testons d’abord l’entrepreneur sur son niveau de maturité par rapport au digital et nous proposons des outils. Sur la vente, par exemple, comment mieux vendre en faisant de l’emailing qui permet d’atteindre des clients que l’on ne connaît pas, ou encore en utilisant Linkedin pour approcher les clients ».
La donnée client est partout : magasin, site internet, boutique en ligne, revendeurs, installateurs, centre d'appels, réseaux sociaux, salons. Mais par où commencer ? (Crédit : Bpifrance)
Une matrice de transformation digitale
Le guide en ligne fournit une matrice de transformation digitale qui servira de feuille de route aux PME, chacune disposant d’indicateurs pour se situer en fonction de sa situation : proximité avec les clients, degré de personnalisation de l’offre et/ou services additionnels, transversalité (ou pas) de l’organisation, existence de partenariats, développement d’un bouquet d’offres, etc.
« Une partie des PME s'est déjà saisie du sujet, ce sont les conquérants, qui représentent 10 à 20% de la population tandis qu’un 2ème groupe, autour de 50%, a compris que c’était important mais ne sait pas ce qu’il faut mettre en place ni s’orienter vers les bons prestataires », détaille Guillaume Mortelier. « L’enjeu pour nous, c’est de montrer des quick wins ». Le dernier groupe est celui des sceptiques. « Ceux que l’on n’entend pas, qui ne viennent pas à nos conférences, qui ne demandent pas de prêts et qui ont pourtant des enjeux de transmission énormes. Nous voulons accompagner les trois groupes », souligne le directeur exécutif de Bpifrance. « Les 1ers pour qu’ils gardent leur rythme, les 2èmes pour leur fournir des outils et les 3èmes pour les convaincre et qu’ils deviennent des apprentis ».
« Les dirigeants se comprennent entre eux »
De façon générale, l’accompagnement traditionnel de Bpifrance est structuré en 3 piliers : le conseil, la formation (en présentiel et en ligne) et la mise en relation. La banque publique réalise 2 000 missions par an avec des PME (coûtant en moyenne 12 000 €). « On les prescrit, on les co-finance - à 50/50 - et on qualifie le consultant qui fait la mission », nous a rappelé Guillaume Mortelier. L’établissement bancaire couvre 25 thématiques dont la « digitalisation ». « L’une des grosses problématiques en France, c’est la solitude, l’entrepreneur est replié lui-même et n’est pas capable de lire ce que lui rapporte l’écosystème. Notre rôle est de les faire venir dans des événements où on les met en relation avec des pairs pour discuter du digital, par exemple de la numérisation de la chaîne de production. Les dirigeants se comprennent entre eux ». Une prochaine réunion aura ainsi lieu à Valence sur ce thème, avec le témoignage d’un fabricant de meubles pour enfants qui travaillait en marque blanche. Il expliquera comment il a valorisé sa marque en ouvrant un canal sur Internet et en recourant au numérique pour suivre les stocks.
L’enjeu du guide et de l’app lancés la semaine dernière par Bpifrance, c’est de « donner envie aux entrepreneurs, leur montrer qu’ils peuvent faire eux-mêmes quelque chose et les amener vers des dispositifs plus impactants », résume Guillaume Mortelier.