Favoriser les introductions en bourse (IPO) des acteurs technologiques à Paris. Tel est le grand défi que veut relever le gouvernement. Pour ce faire, il souhaite proposer des mesures d’accompagnement (dont financières) et mettre en place un cadre législatif plus souple. « L’objectif est de créer des conditions de marché propices et d’accompagner les entreprises pour les années à venir. L’introduction en bourse est une étape cruciale du développement de ces entreprises innovantes pour leur permettre d’accélérer leur croissance » annonce le gouvernement dans un communiqué. Même si le cercle des licornes françaises s’est agrandi ces deux dernières années, il n’en reste pas moins difficile pour elles de franchir le pas de l’introduction en bourse.
Pour soutenir les start-ups dans toutes leurs phases de développement, le gouvernement s’appuie évidemment sur la mission French Tech. Cet écosystème, qui aide aujourd’hui les jeunes sociétés à travers divers programmes d’accompagnement (Next40/120, Green20, Agri20, DeepNum20, Health20 pour ne citer qu’eux) va désormais suivre ses protégées après leur IPO. « Les relations avec l’administration seront ainsi maintenues dans la durée avec les entreprises tech cotées », du moins c’est que Bercy espère. Il est également prévu de mettre davantage en avant les sujets « IPO » et « tech cotée » lors des événements organisés par la French Tech à travers l’Europe. S’ajoute à cela, l’initiative Choose France, « pour que l’an prochain, des fonds d’investissement étrangers dédiés à la « tech cotée » soient invités au sommet à Versailles ». Enfin, le ministère des Finances veut renforcer l’initiative Tibi - lancée à Bercy en 2020 et visant à favoriser le financement des entreprises technologiques - qui a déjà permis de recruter 60 spécialistes IT au sein des fonds labellisés.
Des IPO pour 10 licornes en 2025
Un chantier de taille qui devrait donner un coup de pouce pour la réussite de l’ambitieux objectif que s’est donné le gouvernement. « Voir 10 licornes françaises réaliser leur introduction en Bourse, à Paris, d’ici à 2025, dont 2 avec une valorisation supérieure à 5 milliards d’euros ». Bruno Le Maire, ministre de l’Economie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique a ainsi déclaré : « L’introduction en Bourse est une étape indispensable dans le continuum de financements à disposition des entreprises en croissance. L’écosystème de notre pays, fort de ses 27 licornes, doit s’approprier encore davantage cet outil indispensable à l’émergence de champions mondiaux. Je suis à leurs côtés pour que Paris, première place financière européenne, devienne aussi la première place de financements des start-ups ».
Plein d’espoir, le message l’est. En pratique, cela risque d’être plus compliqué. La pandémie, l’inflation, le contexte géopolitique mondial sont autant de facteurs qui font réfléchir à deux fois avant de s’embarquer dans une aventure comme celle de l’IPO. Dans le monde des start-ups – où ces dernières sont souvent considérées comme plus aventurières que d’autres entreprises – une mauvaise décision peut tout faire basculer. Les levées de fonds en capital-risque cette année l’ont montré, l’heure n’est pas au financement de ces jeunes structures. Le marché est dur et nombreuses sont celles qui ne peuvent pas rivaliser avec le marché américain. C’est ici qu’intervient le soutien financier. Bpifrance et la Caisse des Dépôts et Consignations prévoient de consacrer respectivement 500 millions d’euros et 300 millions d’euros. Ces investissements seront consacrés aux entreprises technologiques dans le cadre de leur IPO. Bercy précise toutefois que « le rôle de l’Etat n’est pas de participer à toutes les introductions en bourse, mais il pourra, lorsqu’il l’estime pertinent, utiliser les différents outils à sa disposition pour soutenir certaines opérations.
Un cadre législatif plus souple pour pousser à l’IPO
Au niveau européen, le gouvernement français vient toquer à la porte de la Commission européenne afin que cette dernière soutienne les mesures spécifiques prises en faveur des start-ups dans la course à l’IPO. La Commission européenne, elle, travaille sur le Listing Act, un règlement destiné à simplifier les exigences d’admission à la cote, ainsi que post-cotation, « afin de rendre les marchés des capitaux plus attrayants pour les entreprises de l’UE et de faciliter l’accès des PME aux capitaux ». Une première proposition législative de cette réforme des règles devrait d’ailleurs être publiée avant la fin d’année.
Enfin, en France, le gouvernement souhaite lancer l’instruction d’un travail législatif pour encourager les entreprises à réaliser leur introduction en bourse en France. Concrètement, un cadre autorisant les droits de vote multiples sur les sociétés cotées pourrait être mis en place et « permettre au management des licornes françaises de conserver le contrôle effectif de leurs entreprises après leur cotation (au même titre que pour les entreprises non cotées) ». La France cherche à travers cette proposition à assouplir les règles pour faciliter la cotation de ses coqs français. La procédure d’entrée en bourse est lourde et coûteuse pour les entreprises, en particulier les PME. Cela dissuade certaines de lever des fonds sur les marchés des capitaux, et de facto, les prive des avantages de la cotation, comme l’accès à une plus large base d’investisseurs et une croissance plus forte permettant de créer des emplois. Toutefois, le gouvernement n’est pas dupe. Jean-Noël Barrot, ministre délégué chargé de la Transition numérique et des Télécommunications, a déclaré : « La conjoncture étant actuellement dégradée, c’est bien un chantier de long terme que nous lançons, avec des résultats à évaluer d’ici plusieurs années ».