Sensation étrange que de se demander si nous allions pouvoir arriver (en avion) à Barcelone, sujette à une tempête ayant largement bousculé le fonctionnement de son aéroport, pour discuter avec des personnes du monde entier de mobilité bas carbone, d'aménagement et de résilience des territoires.
C'est donc avec un salon bien vide les premières heures et une légère schizophrénie que la 1ère journée du Smart City Expo édition 2025 a commencé. Premier constat, le mot IA n'est pas omniprésent sur les stands, Nvidia cependant est partout.
Moins d'innovation, plus de concret
La Smart City a toujours couvert de nombreuses thématiques qui, dans le fond, peuvent se résumer à une interrogation majeure : « Comment faire évoluer nos villes pour qu'elles répondent mieux aux impératifs des époques et aux besoins des citoyens ».
En effet, la plupart des villes et zones géographiques présentes au salon sont millénaires et vont plutôt chercher à montrer leurs évolutions que leurs révolutions. Malheureusement, cette année l'aménagement du territoire est au centre des attentions avec les catastrophiques inondations ayant frappé Valence et donc, dans une moindre mesure, d'autres zones de l'Espagne comme Barcelone.
Cela rend les démonstrations plus concrètes et plus anxiogènes. Le débat se pose : s'il y a 10 ans, les municipalités ne voulaient pas de jumeaux numériques pouvant inquiéter leurs citoyens sur les phénomènes climatiques, ne doivent-elles pas aujourd'hui montrer qu'elles ont conscience des risques et enjeux et, encore mieux, qu'elles mettent tout en oeuvre pour y répondre ?
L'autre constat est que les stands sont désormais moins orientés vers les fournisseurs de technologies et davantage vers le partage de connaissance entre acteurs du secteur public. Les technologies n'ont en effet pas de révolutions à présenter à quelques exceptions près et l'IA générative n'a pas de cas d'usage probants, hormis éventuellement sur la surveillance vidéo avec des annonces de l'inévitable Nvidia et de ses partenaires. De l'autre côté, les budgets publics se resserrent et l'intérêt se concentre plutôt sur le partage de bonnes idées.
Tous ensemble, chacun de son côté ?
Le nombre d'acteurs publics proposant de l'innovation est une excellente nouvelle et une réelle démonstration que tous les modèles ont une valeur ajoutée pour les citoyens, encore faut-il réussir à mutualiser, partager et éviter de répéter des micro-réussites.
Mes homologues américains étaient frappés de voir que les stands se multipliaient, un pour l'Union européenne, un par pays, un par agglomération/länder/canton/région...et un par ville dans certains cas. Même le thème de la mobilité donnait l'impression de voir fleurir des initiatives toutes plus intéressantes les unes que les autres, mais qui allaient certainement manquer d'interconnexions entre elles à un moment.
Comment réussir une collaboration internationale pour répondre aux enjeux climatiques dans un tel mille-feuille, quand bien même tous les acteurs présents avaient une réelle volonté de partager. Signalons au passage la qualité des panels proposés et des interactions.
Les deuxième et troisième jours du salon furent largement placés sous le signe des élections américaines. Chacun sur son téléphone regardant les notifications défiler. Aucune effusion de joie, quelques larmes à sécher chez certaines et certains, en direct. Une drôle d'ambiance au démarrage, un constat implacable pour conclure. Nous allons devoir tous travailler ensemble malgré tout, dans le même sens.
Rémy Letemple est analyste Secteur Public chez IDC EMEA.