Pendant la conférence Sapphire, qui se tient à Orlando (Floride) jusqu'à aujourd'hui, SAP a fait part de ses nombreux projets sur lesquels l'éditeur allemand de solutions de gestion compte se forger une place dans le secteur du cloud computing. On y trouve aussi bien une « suite modulable » d'applications professionnelles que de l'intégration de données ou encore du PaaS (Platform as a Service). La conférence se situe quelques mois après l'acquisition, pour 3,4 milliards de dollars, de SuccessFactors, un rachat qui lui a donné accès à un grand nombre d'applications cloud HCM (Human Capital Management - Gestion du capital humain) et à ce que les dirigeants appellent « un ADN de cloud », c'est à dire de l'expertise pour vendre ce type de services. Avant cette opération, SAP était essentiellement et depuis un certain temps un fournisseur de solution en mode SaaS (software as a service). L'activité de l'entreprise est aussi restée largement circonscrite au logiciel sur site, tirant ses revenus de long cycles de vente et de mises à jour, auxquels s'ajoutent les coûts de maintenance annuels. Un modèle très différent de la tarification par abonnement et du cycle rapide des mises à jour des produits dans le cloud.
Lars Dalgaard, le PDG de SuccessFactors, a été choisi pour superviser la stratégie cloud de SAP et il doit participer sur Sapphire Orlando à un keynote en compagnie du co-CEO Jim Hagemann Snabe, afin de donner plus de détails sur les projets conjoints des entreprises. Cela inclut des applications couvrant différents domaines liés aux ressources humaines, à la finance, aux clients et aux fournisseurs, a indiqué Sven Denecken, vice-président de la stratégie et de l'innovation conjointe pour les solutions cloud computing, dans une interview précédant la conférence.
Modularité des solutions
Dans les deux premières catégories, SAP devrait annoncer l'intégration de son logiciel de paie mondiale dans le cloud, à partir du portail Employee Central de SuccessFactors. SAP a également prévu de sortir Financials OnDemand, un produit destiné aux grandes entreprises qui sera également relié au portail Employee Central. Cette annonce pourrait refléter la montée en gamme de concurrents comme Workday, qui a fait des incursions dans les grandes entreprises grâce à son logiciel de gestion des ressources humaines à la demande, et qui voudrait désormais attirer également les grands comptes vers son produit financier.
Sur la partie des « clients », le CRM (Customer Relationship Management/Gestion de la Relation Client), l'application Sales OnDemand de SAP profite désormais de mises à jour trimestrielles, ce qui met le produit à niveau égal avec des concurrents comme Salesforce.com. En outre, SAP a annoncé la disponibilité d'une autre application, Social Customer Engagement, qui doit permettre aux spécialistes du marketing et aux commerciaux de communiquer avec les clients sur des sites comme Facebook. En ce qui concerne la partie « fournisseurs », l'éditeur allemand prévoit de continuer à développer ses applications Sourcing et Information Interchange OnDemand, que les entreprises peuvent respectivement utiliser pour faire des commandes et gérer leurs factures. Certaines fonctionnalités de ces applications sont essentiellement inspirées de la suite ERP (Enterprise Resource Planning) Business ByDesign, laquelle, en retour, continuera à être encore disponible dans sa forme complète, comme l'a précisé Sven Denecken. « Nous pensons vraiment qu'il y a un marché particulier pour ça. Le fait de proposer une suite modulable permet aux clients d'adopter les produits à leur rythme, à leur manière », a t-il ajouté.
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« Surtout, les applications cloud de SAP seront toutes calquées sur une même approche qui prend en compte la mobilité, les réseaux sociaux et l'analyse des big data », a encore expliqué Sven Denecken. « Un grand nombre de fournisseurs dissocient ces éléments, mais nous les voyons plutôt comme les composantes d'une offre cloud complète ». En outre, « SAP va faire en sorte d'améliorer les interfaces utilisateurs accessibles via son logiciel », a ajouté le vice-président des solutions cloud. « Nous avons prévu de continuer à adopter le standard HTML5 et, dans ce domaine, nous avons déjà beaucoup de choses à montrer cette semaine », a t-il déclaré. « Quoiqu'il en soit, SAP va continuer à développer des interfaces de clients natifs pour terminaux mobiles, l'iPhone en particulier », a t-il ajouté.
PaaS et cloud financier dans les tuyaux
Mardi, SAP a aussi annoncé sa prochaine offre PaaS, du nom de NetWeaver Cloud, qui intègrera sa base de données in-memory HANA. « NetWeaver Cloud pourra être utilisée avec des offres PaaS concurrentes comme Cloud Foundry de VMware », précise l'éditeur. D'autres détails ont été révélés mardi, comme un projet de services d'intégration de données dans le cloud de SAP, pour connecter des applications à la demande et sur site. La société a aussi l'intention d'attirer des fournisseurs d'intégration de données de tierce partie, comme Mulesoft et Cast Iron d'IBM, selon un communiqué.
Lors de la conférence Sapphire, elle a voulu démontrer que le déploiement de logiciels dans le cloud ne présentait pas de difficulté. Les dirigeants de SAP et de SuccessFactors ont également parlé de la facilité avec laquelle les deux entreprises avaient pu rapidement utiliser leurs produits respectifs. En 6 semaines, SuccessFactors a pu exploiter Sales OnDemand, Sourcing OnDemand et Travel OnDemand, ainsi que Business ByDesign, selon un communiqué. SAP a également l'intention d'utiliser la suite BizX de SuccessFactors pour son propre système HCM, et celle-ci est accessible à tous les employés de SAP depuis cette semaine.
Parmi toutes les annonces, celle concernant une application financière à la demande a particulièrement intéressé Paul Hamerman, vice-président et analyste principal chez Forrester Research. Celui-ci note que malgré la présence de Workday et de NetSuite sur le marché, le niveau d'adoption des clouds financiers est resté « très loin derrière » celui des HCM et CRM à la demande. Pourtant, selon lui, un marché est bel et bien en train d'émerger pour ces types de logiciels. « Je pense que SAP voit l'opportunité que représente ce marché », estime-t-il.
Etant donné le grand nombre d'annonces faites lors de la conférence, il semble que SAP a voulu « montrer sa capacité d'innovation », a déclaré l'analyste de Forrester Research. Cependant, il ne sait pas si l'éditeur allemand prévoit de consacrer beaucoup de temps à parler de son logiciel phare ERP sur site, qui représente encore l'essentiel de ses revenus. SAP a insisté sur la difficulté de fournir une mise à jour complète de sa Business Suite, actualisant son logiciel par des packs périodiques. Mais la dernière version majeure du logiciel date de 2009, et il n'y en a pas de nouvelle en vue. « Leur stratégie a consisté à innover autour de l'ERP et non pas à travers lui », a déclaré Paul Hamerman. « Je pense que les clients attendent autre chose de la feuille de route de l'ERP, que cette succession de packs pour actualiser le logiciel ». Néanmoins, selon l'analyste, le renouvellement des interfaces utilisateurs est un bon signe pour les anciens clients ERP. « SAP a pris du retard en matière de convivialité et s'est vu dépassé », a t-il estimé. « Il a compris qu'il ne devait pas négliger cet aspect dans sa stratégie et qu'il devait y apporter une réponse ».