Autour du thème de l’économie connectée, SAP France a organisé les 16 et 17 juin une série de parcours métiers scénarisés et de tables-rondes dans ses locaux, à Levallois-Perret, en présence de Robert Enslin, numéro 2 de SAP, responsable des ventes mondiales. Sur cet événement baptisé Networked Economy Forum, le dirigeant est revenu sur la nouvelle génération de solutions, S4/HANA, annoncée en février dernier, dont le code, qui peut co-exister avec celui de l’ancienne génération d’applications ERP (ECC 6.0), a été entièrement optimisé pour fonctionner avec la base de données en mémoire HANA. Sa première déclinaison s’est matérialisée dans l’application Simple Finance annoncée l’an dernier et destinée aux directions financières. Avec ce type d’offres, SAP veut séduire le comité de direction des entreprises. Hier, l’éditeur a effectué une rapide démonstration d’une application de tableau de bord basée sur Simple Finance, construite à partir de 250 millions de lignes de comptabilité, permettant d’explorer les données et de les réactualiser en temps réel. SAP assure que la migration vers S4/HANA s'opère plus rapidement qu'avec les précédentes générations. Il n'aurait fallu que quatre semaines à SAP pour l'effectuer en interne, nous a indiqué Robert Enslin. La partie logistique de l'offre est prévue pour octobre.
Démonstration de Simple Finance, hier dans les locaux de SAP France. Au centre, Henri van der Vaeren, directeur général de la filiale.
Le problème, selon Henri van der Vaeren, directeur général de SAP France, c’est que SAP n’est pas encore assez connu hors des bureaux des directions informatiques. « Nous avons pourtant des solutions très pointues dans les métiers avec la base HANA qui permet de faire sauter des verrous grâce au temps réel », a-t-il rappelé. Il assure rencontrer chaque semaine 2 à 3 « patrons métiers » qui n’attendaient pas SAP sur ces terrains. C’est donc à l’attention de ces directions opérationnelles et fonctionnelles (logistique, marketing, finance, ventes…) que l’éditeur a établi sur deux jours un parcours autour de l’économie digitale, avec une série de démonstrations sur des réalisations concrètes dans différents secteurs comme la distribution de détail. Dans ses locaux, il présente par exemple plusieurs scénarios en situation dans le prêt-à-porter avec les solutions connectées d’Hybris, associant capteurs et tablettes numériques.
Dans une boutique témoin, les équipes d'Hybris montrent les interactions possibles avec les clients par le biais d'écrans relayant des informations sur les produits examinés.
Parmi les autres étapes du parcours, SAP montre des applications dans les smart cities ou le sport (avec l’exploitation déjà connue des big data et de l’analyse prédictive mises à profit dans le décryptage des performances footballistiques). Un peu plus loin, une maquette sommaire du port de Hambourg évoque le projet mené avec T-Systems sur ce site de 7 200 hectares pour gérer le trafic de frêt en temps réel en s’appuyant sur la plateforme HANA Cloud. « Depuis une tablette, on vérifie en temps réel si un camion est lié à un container et dans le cas contraire, on envoie un message pour qu'il se détourne », nous a expliqué Frédéric Puche, directeur de l'Executive Briefing Center chez SAP France. « L'application permet aussi une organisation spatiale en indiquant aux camions sur quelle zone de parking ils doivent attendre lorsqu'un bateau est en retard. »
Dans le domaine agricole, SAP présente une application de Digital farming qui réunit un certain nombre de technologies. Le responsable d'une exploitation peut y voir l'éclaté de ses parcelles cultivées avec leurs différents statuts (analyse des sols, parcelle labourée, répartition de l'engrais, semis, irrigation, traitements, moisson). Les machines qui partent sur le terrain sont équipées d'objets connectés qui remontent en temps réel des informations qui pourront être utilisées pour la maintenance prédictive, la facturation à l'usage ou indiquer la quantité de fertilisant répartis par mètre carré, a expliqué Frédéric Puche. En récupérant des prévisions météorologiques externes annonçant une perturbation, on peut simuler l'averse et arrêter en conséquence les tâches d'irrigation prévues sur certaines parcelles. Les capteurs sur les moissonneuses fourniront par ailleurs des rendements géolocalisés en sortie des batteuses. Les données recueillies sur le terrain (richesse en sel minéraux, nappes d'eau naturelles, etc.) pourront être remontées sur un tableau de bord pour éviter de surconsommer des fertilisants ou d'irriguer inutilement.
Les applications sont souvent le fruit de co-innovation, ci-dessus par exemple, celle présentée par Frédéric Puche, responsable de l'Executive Briefing Center, dans le domaine agricole, qui recourt aux technologies de positionnement géospatial de Luciad.
Uber intégré à la plateforme Concur de SAP
« Challengez-nous sur vos applications », a défié Henri van der Vaeren avant d’abattre une autre carte, celle du Design Thinking, processus d’innovation autour duquel réfléchit une équipe multidisciplinaire. L’exercice est de plus en plus souvent encadré par les fournisseurs (cf la greenhouse de Deloitte). « Nous vous proposons d’organiser chez nous l’un de vos Comex pour que nous vous aidions à voir de quelle façon l’innovation digitale peut faire évoluer vos métiers, avec des experts de différents secteurs ou domaines, comme l’assurance, la finance, etc. »
Le « Digital Framework » présenté par Robert Enslin engage les entreprises à matérialiser leur digitalisation sur cinq piliers : autour de S4/HANA, les réseaux Ariba et Fieldglass pour gérer la collaboration avec les fournisseurs, les solutions omnicanales d'expérience clients Hybris et Concur, l'Internet des objets couplé au big data et la gestion des collaborateurs. Mais attention, a averti Henri van der Vaeren, à pas recréer dans le cloud la complexité des SI on-premise.
Hier, comme caution aux nouveaux modèles promus par l’économie numérique, SAP avait convié l’inévitable Uber, le service de transport urbain propulsé au niveau mondial. La société intervenait en tant que partenaire. Sa plateforme, qui met directement en relation des véhicules avec chauffeurs avec des utilisateurs via une app mobile, est en effet intégrée à celle de Concur (gestion des déplacements et dépenses professionnelles), rachetée par SAP en 2014. Son défi : supporter sa croissance qui s’accélère - actuellement 2 millions de trajets gérés par jour- et continuer à diversifier ses services, comme en France avec le covoiturage UberPool, a notamment indiqué Alexandre Droulers, responsable du développement d’Uber sur l’Europe de l’Ouest. « Notre focus, c’est le milliard de véhicules sur la planète utilisés à 4% du temps ».
Pour exposer les transformations induites par l’économie des plateformes, SAP avait auparavant fait intervenir Geoffrey Parker, professeur à l’Université de Tulane (Louisiane) et chercheur au MIT. Ce dernier a détaillé les vertus de l’économie de réseaux face à la chaîne de valeur linéaire traditionnelle organisée autour de produits vendus de façon indépendante. « Nous sommes dans un monde où le modèle du produit standalone est vulnérable », a-t-il indiqué en mettant en avant les capitalisations boursières atteintes par les plateformes. « La valeur du réseau augmente avec le nombre croissant de personnes qui le rejoignent ». D’où l’importance de savoir mobiliser autour de celui-ci une communauté de développeurs. Et si toutes les entreprises n’ont pas vocation à se transformer en plateformes, toutes y participeront, prédit Geoffrey Parker.
Les plateformes s'ouvrent aux contributions externes et mobilisent autour d'elles des communautés de développeurs. Les réseaux qui se sont constitués dans les services de transport urbain, comme Uber, ou de location de résidences, comme Airbnb, devraient par la suite s'étendre à des secteurs régulés comme la santé ou la production d'énergie, selon Geoffrey Parker.