Les problèmes liés aux accès indirects aux applications de SAP, effectués à partir d’un autre logiciel, et les coûts additionnels qu’ils répercutent sur le prix des licences ont provoqué quelques maux de tête ces dernières années dans les entreprises qui exploitent l’ERP de l’éditeur allemand. Les utilisateurs accèdent de cette façon aux données gérées dans SAP sans se connecter directement à l’ERP. La façon de calculer le coût de licence diffère alors de la tarification appliquée lorsqu’un utilisateur nommé accède directement au système de gestion. Cette question a été l’objet du procès qui a opposé SAP au fournisseur de spiritueux Diageo à qui l’éditeur réclamait des millions de livres pour des accès indirects à ses logiciels.
Quelques mois plus tard, SAP réglait discrètement un différend du même ordre avec son client AB InBev. Il fallait donc clarifier la situation. En avril dernier, SAP a annoncé vouloir adopter une approche transparente sur cette question avec un nouveau modèle de vente, d’audit et de facturation. Ce dernier est basé sur l’usage et sur la consommation faite des logiciels SAP. L’éditeur décrit un modèle « basé sur les documents » dans lequel « l’utilisation d’un système ERP à travers un accès numérique indirect serait facturé sur la base de la création initiale de ces documents et sa valeur basée sur le nombre total de documents créés ». Cela signifie qu’il n’y a plus de décompte d’utilisateurs ni de tentative pour définir ce qu’est un utilisateur intervenant de façon indirecte.
Intervenant sur la conférence Sapphire, la semaine dernière à Orlando, Sonya Swann, responsable de la tarification et de la commercialisation chez SAP, a tenté de démystifier un peu plus le nouveau modèle qui est devenu optionnel pour les utilisateurs depuis avril dernier. « Historiquement, SAP facturait ses licences à l’utilisateur et de nombreux concurrents utilisent encore cette méthodologie, mais nous prenons des dispositions pour moderniser notre approche », a-t-elle expliqué. « Ce modèle fonctionnait bien quand l’ERP est devenu un produit majeur et que la plupart des utilisateurs y accédaient directement depuis leur clavier. Les temps ont changé et nous avons réalisé que la façon de consommer l’ERP avait radicalement changé. » Il existe maintenant plusieurs façons d’utiliser l’ERP, à la fois depuis son clavier et à travers différentes interfaces et applications. « Ce qui change, c’est la façon de tarifer l’accès indirect à l’ERP. L’utilisation depuis le clavier se facture de la même façon qu’avant », pointe Sonya Swann. Par ailleurs, SAP ne facturera jamais les utilisateurs pour une intégration entre applications SAP, ce qui peut s’avérer être un argument de vente décisif pour pousser un produit comme la nouvelle suite de logiciels C/4HANA CRM, par rapport à un logiciel concurrent comme Salesforce qui a justement été au coeur des problèmes d’accès indirect rencontrés par Diageo.
9 processus clés générant des documents
« Nous avons un nouveau modèle pour facturer les accès indirects qui est optionnel. Au lieu de le baser sur les utilisateurs, nous nous dirigeons vers une tarification basée sur le nombre de transactions traitées dans SAP ERP et que nous désignons sous le nom de documents », explique Sonya Swann. « Donc, lorsque vous traitez des transactions, vous payez et quand vous n’en faites pas, il n’y a aucun coût ». Dans le cadre de ce modèle de licencing, son équipe a identifié 9 processus clés associés à un système ERP, chacun d’entre eux générant ce que SAP appelle un document et par voie de conséquense, un coût pour les clients. Par exemple, un processus order-to-cash (de la commande au paiement), qui crée un document de vente, ou bien un processus plan-to-produce (du projet à la production) qui génère un document de fabrication.
7 de ces 9 processus sont associés à une tarification assortie d’un coefficent multiplicateur de 1, mais pour compliquer un peu plus les choses, les processus « financier » et « matériel » qui sont moins valorisés se voient affectés un coefficient multiplicateur de 0,2. Sonya Swann compare ce mode de facturation à une carte prépayée. « Vous achetez un ensemble de documents et nous ne vous demandons pas quels sont vos types de processus. Simplement, vous estimez annuellement l’usage moyen et c’est ce qui correspond à votre licence », expose-t-elle. Les actions de lecture, de mise à jour et de suppression de ce document initial à travers un accès indirect n’entraînent pas de coûts supplémentaires. « Nous ne compterons que le nombre de documents créés depuis un système externe à partir de l’ERP SAP, tout le reste comme le fait de lire ou de mettre à jour une transaction est inclus et ne sera pas facturé de nouveau », a expliqué Sonya Swann.
Des benchmarks pour estimer le nombre de documents
SAP a également fourni des benchmarks pour les clients qui n’ont pas de données historiques afin qu’ils puissent faire une estimation du nombre de documents dont ils ont besoin sur une période de licence d’un an. Avec ce modèle optionnel, il y a maintenant trois options pour les clients de SAP : ne rien faire si la façon dont les licences leur sont facturées leur conviennent, procéder à une échange de licences vers le nouveau modèle en ajoutant un addendum décrivant la tarification et, enfin, transformer son contrat dans le dans le cas des clients SAP ERP S/4 HANA qui veulent consolider leurs anciens contrats. Pour avoir des détails sur le sujet, les entreprises concernées pourront s’adresser à leur club utilisateurs (en France, l’USF). Le site ASGU, Americas SAP Users Group, fournit des informations sur son centre de ressources en ligne.
L'activité d'audit séparée des équipes commerciales
Dans le cadre de cette évolution, SAP va aussi séparer ses activités de ventes de licences de ses activités d’audit. « Les clients et SAP se sont quelquefois affrontés pour faire correspondre d’anciens contrats commerciaux avec les exigences des activités digitales actuelles », admet l’éditeur dans un communiqué. « Lorsque cela intervient lors de négociations liées à l’achat de nouveaux logiciels, cela peut quelquefois provoquer une certaine frustration ». Désormais, les équipes de vente ne pourront plus réaliser ou interrompre des audits de licence ce qui, historiquement, leur donnait un avantage dans les négociations.
Matthias Medert, vice-président, responsable de l’audit de licence et de la conformité au niveau mondial, est également intervenu sur la conférence Sapphire d’Orlando au côté de Sonya Swann. Il a parlé de changer la « perception chez certains clients que l’audit poussait à la vente de licences » en assurant que c’était quelque chose que SAP voulait changer. Matthias Medert a également évoqué la création des capacités d’audit cohérentes sur l’ensemble des zones géographiques et abordé l’ouverture d’outils qui permettront aux clients de réaliser eux-mêmes leur audit plus facilement. « Quelquefois, un audit amène de la tension et nous nous apercevons que tout se déroule plus facilement si l’audit ne débouche pas une surprise », a-t-il indiqué. « Donc, notre intention est de vous permettre de contrôler l’usage de vos licences aussi bien que possible par vous-mêmes en vous donnant les mêmes outils que mes auditeurs utilisent à chaque fois que vous le voudrez ».