Google est encore une fois rattrapée par les affaires de concurrence et c’est en France que cela se passe. L’Autorité de la concurrence vient en effet d’infliger une amende de 150 millions d’euros à la firme californienne pour abus de position dominante. Le régulateur reproche à Google l’adoption de règles de fonctionnement de sa plateforme publicitaire (Google Ads). Elles sont jugées opaques, difficilement compréhensibles et appliquées de manière inéquitable et aléatoire.
A l’origine de la plainte, la société Gibmedia, éditrice de plusieurs sites (météos et renseignements téléphoniques), avait vu son compte Google Ads suspendu sans préavis. Elle avait alors saisie l’Autorité de la concurrence pour pratiques anticoncurrentielles de la part de Google. Le régulateur s’est donc penché sur ces comportements et a enquêté sur les règles de la plateforme publicitaire. Le moins que l’on puisse dire est qu’elles sont confuses dans leur formulation et leur interprétation, constate l’Autorité. Ces règles ne reposent « sur aucune définition précise et stable, ce qui donne toute latitude à Google pour les interpréter selon les situations ». Et de donner l’exemple d’un produit ou d’un service « normalement gratuit » interdit selon les règles de Google Ads de « facturer des frais aux utilisateurs ». Or en l’absence de définition précise de la notion de « normalement gratuit », Google a jugé en 2014 le site annuaires-inverse.net conforme à ses règles, avant de le suspendre en 2015 sans que le site ait changé son modèle économique.
Une amende et des obligations
Autre constat, les changements des règles n’ont pas fait l’objet d’une information ou d’une notification auprès des annonceurs concernés. Cette instabilité des règles maintient donc certains annonceurs dans une situation d’insécurité juridique et économique. De même, les règles étaient appliquées de manière discriminatoire. Ainsi, des sites ont été suspendus notamment ceux de Gibmedia pour violation des règles, alors que Google continuait à diffuser des annonces similaires. L’Autorité considère que la firme de Mountain View « a appliqué des propres règles de manière incohérente ».
Ces différents travers et obstacles ont pu décourager le développement de sites innovants ou restreindre la publicité autour de sites à faible notoriété. Les sages de la rue de l’Echelle n’ont pas trouvé d’intentionnalité dans la stratégie de Google, mais la qualifie « au mieux de négligence, au pire d’opportunisme ». En conséquence, Google est condamné à 150 millions d’euros d’amende.
De plus, l’Autorité ordonne à l’entreprise de « clarifier la rédaction des règles de Google Ads et de revoir les procédures d’information concernant les modifications des règles » et de « clarifier les procédures de suspension », ainsi que « mettre en place des procédures d’alerte, de prévention, de détection et des traitement des manquements à ses règles ». Par ailleurs, Google devra « organiser une formation annuelle obligatoire pour les personnels chargés de l’accompagnement personnalisés des entreprises présentes sur Google Ads ». Enfin, un rapport annuel sera communiqué à l’Autorité précisant « le nombre de plaintes déposées à son encontre par les internautes français, le nombre de sites et de comptes suspendus, la nature des règles violées et les modalités de la suspension ».