Né dans les années 1840, l'éditeur britannique de livres spécialisé dans l'éducation Pearson a été le témoin de changements importants dans son secteur. L'innovation fait donc partie de son ADN, si l'on croit sa DSI, Marykay Wells. Cette dernière considère ainsi la planification de l'évolution de l'infrastructure informatique d'une entreprise comme une discipline à part entière, en constante évolution.
« Si nous n'établissons pas un plan clair et logique, qui tient compte de tous nos actifs et de tous les risques technologiques, cela peut entraîner des problèmes, explique-t-elle. Pour commencer, on finit toujours par allouer trop de budget à l'infrastructure existante plutôt que d'investir dans des innovations réellement stimulantes pour l'activité. Par ailleurs, on fonctionne en réaction aux problèmes et non en anticipation. Et tout cela finit par contribuer à une dette technique globale, qui non seulement grève le budget, mais exerce une très forte pression sur les équipes informatiques. » Pour pallier ce problème, Marykay Wells et le "technology working group" de Pearson, qui regroupe des dirigeants IT de toutes les différentes entités de la marque, ont défini 12 attributs clés, dont la sécurité et la maintenabilité, pour évaluer tous leurs actifs technologiques de façon cohérente. Ces audits de la dette technologique ont abouti à une image plus claire des risques majeurs, ce qui a permis à la DSI de hiérarchiser les projets.
Une approche basée sur les données
« Nous avons développé un algorithme pour jauger nos différentes applications en fonction de ces 12 critères et ainsi éliminer la dette technique avec une approche stratégique et standardisée », insiste-t-elle. Pour la DSI, l'objectif principal consistait à éliminer toute conjecture et à prendre des décisions en fonction des opportunités et des risques liés aux revenus. La DSI a ainsi adopté une approche très systématique basée sur des données et a conçu un tableau de bord qui fournit des représentations visuelles des éléments de l'infrastructure avec les risques les plus importants. « Cela n'a vraiment pas été un exercice simple, contrairement à ce que l'on pourrait penser, parce que tout le monde fonctionnait de manière différente », poursuit-elle.
« Nous avons développé un algorithme pour jauger nos différentes applications en fonction de 12 critères et ainsi éliminer la dette technique avec une approche stratégique et standardisée », précise Marykay Wells, DSI de Pearson. (Photo : Éric van den Brulle)
Non seulement ces outils aident aujourd'hui la DSI et son équipe à donner des scores de dette technologique à chaque entité de Pearson, mais ils fournissent aussi des informations précieuses sur les actifs, les applications et les produits déjà mis en place. Un moyen de planifier leur modernisation de façon plus stratégique. « Quand une entité dispose de ressources ou de produits technologiques dont une autre ne dispose pas, nous regroupons les ressources pour éviter les doublons », illustre Marykay Wells.
Embarquer le conseil d'administration
Elle rappelle par ailleurs qu'il était indispensable d'obtenir l'adhésion des dirigeants de l'entreprise et de s'assurer qu'ils comprennent que la dette technique ne se limite pas à un problème technologique. « Il fallait qu'ils réalisent que c'était une priorité, sans les noyer sous un discours technologique, insiste-t-elle. Il était essentiel de commencer par une discussion autour de la valeur, du business et de l'impact sur le client. Et d'expliquer que la dette technique finit par affecter les clients et les revenus. »
Et les résultats sont là. Marykay Wells précise ainsi qu'en 2023, Pearson a réduit de 55 % le nombre d'applications avec des scores de dette technologique élevés et de 58 % les incidents ayant un impact sur les clients et les employés. Et de conclure : « il est toujours plus facile de convaincre de l'intérêt d'un projet ou d'une idée, lorsque l'on peut produire des chiffres » !