On se souvient tous du lancement en catastrophe des deux fournisseurs de cloud souverain avant l'élection présidentielle de mai 2012. Financé autour de 285 millions d'euros, le projet Andromède, porté par l'État, Orange, Thalès et Dassault Systèmes (Capgemini avait préféré se retirer du projet) ambitionnait de concurrencer les principaux clouds publics d'origine américaine, IBM, HP, Microsoft, Amazon Web Services ou Rackspace. La Caisse des Dépôts devait investir 135 millions d'euros, France Telecom et Thalès 60 millions chacun et Dassault Systèmes 30 millions. Las, après le retrait de Dassault Systèmes en avril 2012, le projet était entré dans une zone de turbulences après la décision du Comité du fonds pour la société numérique et du commissaire général à l'investissement, René Ricol, de financer deux projets de clouds plutôt qu'un seul.
Après plusieurs mois de chassés croisés, les deux projets de clouds souverains français cofinancés par l'État ont été lancés début septembre avec le concours du Fonds National pour la Société Numérique (FSN), avec d'un coté SFR/Bull (Numergy) et de l'autre Orange/Thalès (Cloudwatt).
Numergy a-t-il pris l'avantage sur Cloudwatt ?
Si Numergy a pu démarrer rapidement avec un entrepenant Philippe Tavernier à sa tête (notamment à l'Europe), en reprenant il est vrai l'infrastructure cloud sur base VMware développée par HP pour SFR, Cloudwatt a connu un sérieux retard à l'allumage. Malgré la nomination de Patrick Starck, aujourd'hui sur le départ, et le choix de partir sur la prometteuse plate-forme OpenStack, Cloudwatt est resté très discret et s'est borné à lancer une timide plate-forme de stockage en ligne au printemps 2013 alors que tous les clients attendaient un cloud compute. En juin dernier, Patrick Stark nous expliquait que « notre projet ne se résume pas à une question de timing. Pour se développer dans un marché du cloud public qui est en train de s'ouvrir et de démarrer, il faut une infrastructure complète, des solutions et prendre le temps de les développer ».
Las, les retards dans la mise en service du datacenter de Val de Reuil - où sont hébergés les deux pods de Cloudwatt - et dans les choix techniques OpenStack - développement sur la version Grizzly avant de bifurquer sur la release Havana - n'ont pas aidé le cloud builder français à occuper le terrain médiatique et commercial. Les relations avec les deux principaux actionnaires ont-elles été plus difficiles que prévues notamment face à OBS qui pousse également ses offres cloud à destination des mêmes cibles ? Patrick Starck paie-t-il aujourd'hui des choix stratégiques et une dispersion des ressources sur un marché qui n'attend pas ? Les affaires Prism/XKeyScore et l'espionnage systématique et à grande échelle de la NSA en est aujourd'hui le meilleur exemple...