Coup de tonnerre dans la Silicon Valley. Après une année 2020 difficile marquée par une réorganisation de ses équipes de développement et de production, Intel a remercié son actuel CEO Bob Swan - et ancien directeur financier du fondeur - pour récupérer l'ancien enfant prodige de la maison, Pat Gelsinger, CEO de VMware depuis 2012. Durant 13 ans, ce dernier avait en effet gravi tous les échelons chez Intel pour finir CTO, avant de partir en 2009 chez EMC car le poste de CEO lui était barré. Au sein de la fédération EMC, Pat Gelsinger est devenu le CEO de la pépite VMware que Joe Tucci avait réussi à souffler sur le fil à Microsoft et IBM. Il revient aujourd'hui dans une maison qu'il connait très bien pour occuper finalement le poste de CEO, avec un siège au conseil d'administration.
De son côté, VMware, qui vient de perdre son COO Rajiv Ramaswami parti chez Nutanix fin décembre, a indiqué qu’il allait lancer un processus de recrutement pour nommer un CEO permanent et que Zane Rowe, son actuel CFO, deviendrait CEO par intérim. « Pat a amené la société à étendre notre solution de virtualisation de base et nos capacités au cloud, aux réseaux, à la 5G/edge et à la sécurité, tout en triplant presque les revenus pour atteindre près de 12 milliards de dollars », a déclaré M. Rowe dans un communiqué.
Pat Gelsinger va devoir réveiller Intel
Chez Intel, Pat Gelsinger a joué un rôle important dans la création de l’architecture du processeur 80486 original, tout en contribuant ensuite au développement de technologies clés, notamment l'USB et le WiFi, ce qui a conduit le fondeur à devenir le principal fournisseur sur les marchés des PC et des serveurs, hier dominés par les plateformes Unix avec PowerPC, Alpha, PA-Risc et Sparc. Chez VMware, il a piloté plusieurs transformations de l'éditeur, la dernière en date étant sa volonté de soutenir tout ce qui concerne Kubernetes avec son initiative Tanzu. Mais depuis le rachat d’EMC par Dell, la neutralité de VMware ne semblait plus être une des priorités de la société mère. Durant notre dernier entretien à VMworld Europe, Pat Gelsinger nous avait même avoué se rapprocher de Microsoft, son principal concurrent après Nutanix, sous les auspices de "la fédération Dell".
« Ayant commencé ma carrière chez Intel et appris aux pieds des pionniers des semi-conducteurs Andrew Grove, Robert Noyce et Gordon Moore, c'est un privilège et un honneur pour moi de revenir dans cette fonction de direction », a déclaré M. Gelsinger dans un communiqué de presse. Le dirigeant va devoir s’atteler à réveiller le fondeur, qui a perdu des parts de marché ces derniers trimestres au profit d’AMD sans réussir à percer sur le segment très dynamique des circuits graphiques. Les problèmes de fabrication ont également pénalisé l’activité d’Intel, qui n’exclut plus de faire appel à un fondeur extérieur, comme TSMC, pour graver certains composants. Le changement de direction était devenu inévitable chez Intel après certaines tribunes très critiques à l’égard de la stratégie de Bob Swan dont celle de Daniel Loeb, le CEO du fonds spéculatif Third Point LLC, publié en décembre dernier dans le Wall Street Journal et soulignant que « les difficultés de la société pourraient menacer l'industrie technologique américaine ». Il exhortait le fabricant de puces à envisager des alternatives, notamment la vente de certaines de ses acquisitions et la scission de ses activités de conception et de fabrication - une mesure qui mettrait fin au statut de longue date d'Intel en tant que premier fabricant américain de semi-conducteurs intégrés.