C'est l'histoire d'une mairie qui entendant presque des voix. La capitale de la région Centre-Val de Loire testait depuis octobre 2021 un système d'audiosurveillance algorithmique (ASA) couplé aux caméras de vidéosurveillance installés sur son espace public. Saisi par l'association La Quadrature du Net dans la foulée, le Tribunal administratif d'Orléans a rendu son verdict contre la ville qui vient d'être condamnée dans cette affaire. "Ce jugement est un avertissement pour les promoteurs de cette surveillance toujours plus débridée de l’espace public", a réagi La Quadrature du Net. "Avec ce jugement, le tribunal administratif d’Orléans ne déclare pas seulement l’ASA illégale : il estime également qu’un contrat passé entre une commune et une entreprise pour mettre en place ce type de surveillance peut-être attaqué par une association comme La Quadrature."
Le système du fournisseur Sensivic permet selon la ville la "détection automatisée des bruits anormaux" par le biais de dispositifs "de vibration de l'air" installés sur certains points de son territoire. Sa mise en oeuvre dans le cadre d'une convention avec la mairie a été cependant été jugée contraire à la loi.
La convention entre Orléans et Sensivic annulée, la ville condamnée
"En cas de correspondance entre un son capté et un type de son recherché (bris de vitre, détonations, cris …), la caméra de vidéoprotection associée au détecteur est orientée vers la source du son et un signal est émis à destination de l’agent du centre de sécurité chargé du suivi du dispositif qui peut identifier la personne se trouvant à l’origine ou à proximité du bruit anormal capté par le dispositif ", peut-on lire dans le jugement du Tribunal. "En tant qu’ils collectent et utilisent ainsi des informations se rapportant à des personnes susceptibles, au moyen des caméras avec lesquelles ils sont couplés, d’être identifiées par l’opérateur, les dispositifs litigieux procèdent ainsi au traitement de données personnelles [...] La convention litigieuse méconnaît l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et les articles 4, 8 et 10 combinés de la directive (UE) 2016/680 du 27 avril 2016 ainsi que 4, 5 et 88 de la loi du 6 janvier 1978, dès lors qu’aucun texte légal ou réglementaire, et notamment pas le code de la sécurité intérieure, ne fonde le traitement prévu par la convention, qui constitue une ingérence grave dans le droit à la vie privée et à la protection des données personnelles des habitants."
La convention signée le 12 octobre 2021 entre la commune d’Orléans et la SAS Sensivic est ainsi annulée, la ville étant condamnée par ailleurs à verser à La Quadrature du Net 1 500 € au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.