En direct de Barcelone - Comme tous les ans, les opérateurs, équipementiers et autres fournisseurs de services mobile se sont donnés rendez-vous au Mobile World Congress à Barcelone. Et comme l’année dernière, la 5G est sur les stands d’un grand nombre d’exposants. Les initiatives s’étaient d’ailleurs multipliées avant le salon avec des expérimentations fixes aux Etats-Unis dans la bande des 28 GHz avec AT&T et Verizon mais également en France avec Orange et Ericsson avec une démonstration à 15 GB/s en ondes millimétriques entre 3 et 30 GHz. En France, ce sera la bande des 3,5 GHz qui sera réservée à la 5G.
Yves Bellego, directeur technique Europe chez Orange, nous a indiqué sur le salon que la roadmap pour « la vraie 5G utile » pour les clients est encore en cours de définition chez l’opérateur. « Il faut y aller étape par étape. Le test avec Ericsson est une étape utile afin de mieux comprendre les clients et avancer dans les développements. » S'il n’y a toujours pas de planning 5G précis chez Orange qui poursuit le développement de la couverture 4G, (notamment sur les TGV avec la SNCF) sans réellement parler de 4,5 ou 4,9 G ni même de 5G NR, on comprend bien après une rapide tour d'horizon qu'il n'y a pas vraiment d'urgence.
Des développements verticaux pour la 5G
Pour autant, l’opérateur travaille sur des usages verticaux exploitant certaines technologies 5G avec notamment un POC baptisé Towards 5G - réalisé de décembre 2016 à janvier 2017 - avec PSA, Ericsson et Qualcomm. Une architecture 5G sur un réseau 4G a été testée pour étudier des services pour les véhicules avec des communications entre véhicules (V2V), entre véhicules et infrastructures (V2I) et entre véhicules et piétons (V2P) avec une latence de 17 ms. Soit un temps de réaction 8 fois rapide qu’en 4G en passant par un cloud radio (RBS) et un cloud cœur. Une topologie propre à l’architecture 5G.
Cette modélisation 3D du quartier des Halles permet à Orange d'affiner ses algorithmes gérant le débit moyen des clients avant l'arrivée des services 5G.
Parmi les services testés, Yves Bellego met en avant l’exemple d’une ambulance qui arrive derrière des véhicules avec une alerte envoyée aux automobilistes afin de dégager le passage (Emergency Vehicle). Second exemple, See Through qui permet à un conducteur de « voir à travers un camion » via l’écran de son automobile. « L’usage du réseau est particulièrement importante dans ce dernier cas. Ces expérimentations nous permettent de savoir ce qui sera vraiment utile avec la 5G », nous a précisé lé directeur technique. Une autre démonstration 5G d’Orange repose sur une simulation du quartier des Halles à Paris pour optimiser les débits mobiles en fonction du nombre d’utilisateurs. « Il s’agit ici d’offrir un débit moyen pour tout le monde en lissant le débit même si un client s’éloigne de l’antenne. Nous travaillons ici sur les algorithmes pour gérer et optimiser le lien avec le client. […] La 5G, ce n’est pas qu’un réseau radio, c’est aussi le slicing et la latence. Il ne faut pas limiter la 5G à la radio comme le font les annonces autour de la 5G fixe. Nous voulons que la 5G apporte de vraies améliorations pour le système jusqu’en 2030 et après. A l’heure actuelle, il n’y a toujours pas de terminaux ni même de chipset. Si les télécoms font toujours rêver, le travail consiste aujourd'hui à assurer une évolution progressive. »
La 5G avec les Jeux
Chez les fournisseurs, le son de cloche est bien sûr un peu différent. Pour Gilbert Marciano, directeur marketing chez Nokia France, la roadmap 5G suit celles des prochains grands évènements sportifs, à avoir les JO d’été en Corée du Sud en 2018, les JO d’hiver au Japon en 2020 et la Coupe d’Europe de football en Europe la même année. « En 2018, nous aurons des stations de base, le software et les antennes, la seule question qui reste est celle de la disponibilité des terminaux mobiles ». Trois axes de développement 5G sont menés de concert chez l’équipementier : l’IoT avec une capacité d’un million d’objets par cellule. Un nombre qui paraît très important mais à la Défense si on prend en compte l’environnement très dense avec notamment ses soubassements, cette capacité peut être vite atteinte. Second axe, le très haut débit mobile avec un maximum de 15 à 20 GB/s par cellule.
Cette antenne 5G massivement Mimo de Nokia est adaptée au marché américain. (Crédit S.L.)
Terminons avec les communications critiques qui demandent une latence très faible comme pour les communications entre véhicules (V2V) ou le pilotage de robots à distance. Cette latence peut être réduite à 40 à 50 ms avec une cible inférieure à 1 ms entre le device et le réseau. Aujourd’hui, Nokia voit très bien la 5G dans l’industrie 4.0 mais moins pour les utilisateurs à l’exception de certains usages comme la diffusion de flux vidéo et le gaming avec la VR. La 5G peut également répondre à des besoins ponctuels comme lors des manifestations sportives ou culturelles avec un service premium pour les clients dans un stade, proposer différents angles de vue vidéo sur les terminaux mobiles ou mobiliser toutes les ressources réseau en cas d’incident pour récupérer le contrôle de toutes les caméras vidéo et piloter les secours et l’évacuation des participants. Il s’agit ici d’adresser de façon plus différencier les besoins BtoB.
Nokia prêt à démarrer sa 5G First
Pour le déploiement de son offre 5G, Nokia mise sur 5G First avec Verizon, un préstandard qui repose sur la release 16A. Il s’agit toutefois d’une 5G fixe réserver à un usage résidentiel qu’Orange estime pouvoir adresser avec sa plate-forme 4G. Pousser dans ses derniers retranchements, la 4,5 G est par exemple capable d’atteindre un débit de 1 GB/s en agrégation. En 4,9 G, Nokia annonce être capable de monter à 3 GB/s (60 MHz) en réduisant la latence. Des briques 5G sont aujourd’hui déjà disponibles mais il ne s’agit que d’une préfiguration de ce qu’on aura en 5G.
Beaucoup d'IoT et un peu de 5G sur le stand de Huawei au MWC 2017. (Crédit S.L.)
Chez Huawei, le discours est étonnamment modeste sur la 5G. « La standardisation est une chose mais la commercialisation sera plus longue, notamment pour la disponibilité des chipsets pour les terminaux mobiles », nous a indiqué un porte-parole de l’équipementier chinois Zhienheng Ren. « Le développement de la partie logicielle, la diffusion et l’optimisation prendrons du temps. Nous poussons la 4,5 G car la 5G mettra du temps à arriver ». Ce ne sera pas avant plusieurs années selon le fournisseur qui ne risque pas à donner de date précise. Comme chez ses concurrents, Huawei utilise déjà certaines technologies 5G pour déployer de nouvelles antennes. Des teste sont d’ailleurs en cours à Shanghai avec des ondes millimétriques et des clouds radio assurant une latence de 0,46 ms et un débit de 13 GB/s. Si la 5G est donc bien sur les rails, la commercialisation des premiers services mobiles n’est pas attendue avant 2020, voir même 2021.