« Notre objectif est la sécurité totale, le 0 accident que certaines entreprises clientes atteignent déjà » martèle Eric Servolle, Directeur du marché BTP chez Manpower. Le spécialiste des ressources humaines a, dans le cadre de son activité d'agence d'intérim pour le secteur du BTP, des obligations réglementaires mais, depuis toujours, « une culture du soin du salarié avec une politique très pro-active » comme le souligne Eric Servolle. Et le secteur du BTP fait, globalement, de gros efforts pour réduire l'accidentologie du travail. Eric Servolle rapporte ainsi : « le taux d'accident du travail diminue fortement depuis plusieurs années ». Pour améliorer encore les scores et en faire un différenciant sur un marché difficile, Manpower a choisi d'utiliser un serious game développé spécifiquement pour le groupe par 2J Process en réalité virtuelle.

Réglementairement, Manpower a l'obligation de gérer les traditionnelles visites médicales périodiques. Il doit aussi sensibiliser son personnel à la prévention des accidents du travail. Jusqu'à récemment, le contrôle de cette sensibilisation prenait la forme de tests papier ou informatisés assez similaires à l'examen du code de la route : une série d'images statiques de mises en situation associée à un QCM. En cas de mauvais résultats, Manpower re-sensibilise l'intérimaire et lui fait repasser le test. Un individu rétif à se protéger des situations porteuses de risques ne sera pas envoyé sur des missions en lien avec ces risques mais, si nécessaire, réorienté vers des métiers moins dangereux.

L'intérimaire doit repérer tous les facteurs de risques dans un environnement complet dans lequel il se déplace. (crédit : Manpower)

Améliorer l'efficacité et l'attractivité

Utiliser la réalité virtuelle a été envisagé mi-2016. Le projet a effectivement été lancé avec 2J Process en février 2017. Un pilote au siège a été testé en mars 2017 avant un pilote sur 10 agences en mai. En juillet, les 70 agences dédiées au secteur du BTP partout en France étaient équipées. Tous les 15 000 intérimaires du BTP devraient avoir utilisé le serious game en réalité virtuelle Prévention 3D BTP d'ici fin 2017. La durée d'une session est de 15 minutes. Les situations ont été définies par les équipes de Manpower pour coller au mieux aux risques identifiés, notamment ceux jugés récurrents. Le test est jugé concluant si l'intérimaire a atteint 70% de bonnes réponses (identification adéquate des risques). Dans tous les cas, l'intérimaire bénéficie d'un débriefing. Le cas échéant, une formation ou des réunions de sensibilisation en agence et, parfois, en entreprises clientes.

L'utilisation de la réalité virtuelle a plusieurs avantages par rapport au test statique. « Le premier est évidemment le réalisme, via l'immersion totale dans un chantier, une mise en situation réelle » constate Eric Servolle. De la même façon, sur le plan pédagogique, la mémorisation est améliorée puisque l'intérimaire agit, il est formé par l'expérience pratique bien que virtuelle. Eric Servolle souligne : « l'impact psychologique est bien supérieur. » Mais les bénéfices sans lien direct avec la sensibilisation des travailleurs ne sont pas non plus négligeables. Eric Servolle admet ainsi : « utiliser la réalité virtuelle est spécifique à Manpower et des intérimaires inscrits chez des concurrents viennent ainsi nous voir après avoir entendu parler de l'outil sur des chantiers. Nous pouvons donc capter de la ressource humaine parfois rare. Et, bien évidemment, nous soignons une image d'innovation auprès des employeurs clients. »

Un dispositif technique simple

Pourtant, l'outil est assez simple. L'intérimaire s'installe dans une salle isolée, au calme, sur un siège à roulettes pour pouvoir être mobile. Le casque de réalité virtuelle est un casque intégrant un smartphone qui est connecté à un PC. Le calcul des scores est effectué sur ce PC et ensuite intégré au dossier RH de l'intérimaire. Manpower a bien sûr supporté un coût initial et règle ensuite une licence annuelle.

Ici lors d'une démonstration au siège, Prévention 3D BTP repose, pour la réalité virtuelle, sur un casque incluant un smartphone qui est relayé au PC. (crédit : Manpower)

Mais Eric Servolle, Directeur du marché BTP chez Manpower, insiste : « c'est un tout petit investissement par rapport aux enjeux. Je n'ai eu aucune difficulté à obtenir le déblocage du budget. Bref, le coût est un non-sujet. » Le déploiement étant encore récent, un bilan sur les usages de l'outil ne sont pas encore suffisants, en particulier en termes d'efficacité pédagogique réelle.