Les industriels quittent la commission pour la copie privée
Rien ne va plus au sein de la Commission dite d'Albis, chargée d'établir les montants des taxes pour copie privée s'appliquant aux ventes de matériels électroniques.
Alors que le vote sur l'application de cette taxe aux téléphones mobiles multimédia doit avoir lieu aujourd'hui, les représentants des constructeurs ont claqué la porte de la commission. Ils estiment que la décision, adoptée sur son principe le 24 janvier, illustre « le mauvais fonctionnement de cette instance ». Secimavi, SFIB, Simvelec et SNSII viennent ainsi de signer un communiqué commun pour dénoncer l'adoption d'un principe « frappé de nullité ».
Des industriels sans pouvoir de décision
Parmi les récriminations des constructeurs, figure en premier lieu la composition de la commission. « Elle est composée de 24 membres : la moitié représentent les ayants-droit, un quart les consommateurs et le dernier quart les industriels, explique Christophe Stener, président d'Alliances TIC et du SFIB (syndicat des fabricants de matériels informatiques et bureautiques). Les ayants-droit (12 voix) votent toujours ensemble, et deux organisations de consommateurs se rangent systématiquement du côté des ayants-droit. Comme les votes se déroulent à la majorité simple, les 14 voix emportent toutes les décisions. »
C'est ainsi que la commission a adopté le principe de la taxation des smartphones, au grand dam des industriels. « La commission aurait dû se poser deux questions, poursuit Christophe Stener : mon matériel peut-il stocker et restituer des fichiers protégés, les utilisateurs pratiquent-ils la copie privée à partir de leur téléphone multimédia ? » Deux interrogations qui auraient nécessité la mise en place d'une étude. Or, « les ayants-droit ont décidé d'appliquer la taxe sans juger nécessaire l'étude d'usage, que nous réclamons depuis six mois. Pour eux, un iPhone et un iPod sont deux appareils identiques : les smartphones ont donc vocation à être taxés comme les baladeurs. »
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Alors qu'ils avertissent que la prochaine décision fera l'objet d'un recours contentieux devant le Conseil d'Etat, les industriels rappellent qu'ils brandissaient la menace d'un carton rouge depuis plusieurs mois. Leur départ de la commission n'est certes pas définitif : ils posent trois conditions pour réintégrer les rangs et en appellent à l'arbitrage de la ministre de la Culture, Christine Albanel. Ils demandent en premier lieu que la contrefaçon ne soit plus prise en compte dans le calcul de la taxe pour copie privée imposée aux constructeurs. Selon ces derniers, il ne leur revient pas de supporter le poids du piratage. Deuxièmement, ils attendent de la ministre « qu'elle réaffirme le principe qu'on ne peut pas taxer un produit sans avoir démontré qu'il servait à quelque chose ». En clair, une étude d'opportunité doit être mise en place systématiquement. Enfin, puisqu'ils considèrent le fait qu'un collège puisse prendre des décisions seul est inique, ils demandent le passage à une majorité qualifiée des deux tiers pour les votes.
« Si l'on n'obtient rien, nous ne retournerons pas siéger, avertit Christophe Stener. Maintenant, la balle est dans le camp de la ministre de la Culture. » En attendant une éventuelle remise en place des règles de fonctionnement de la commission, celle-ci ne pourra pas adopter de décision ce 19 février. En constatant que le quorum ne sera pas atteint, le président remettra donc la réunion à une date ultérieure. Lors de cette deuxième convocation, le nombre de représentants présents ne posera plus de problème et, même en l'absence des industriels, la commission pourra procéder au vote.