Rares sont les études à traiter le rapport des Français aux semi-conducteurs. C'est pourtant la mission donnée par Intel à l'institut de sondage à Ipsos : relever leur perception et leur niveau de sensibilisation en la matière. Selon cette enquête menée en octobre 2022 par le biais de 1 500 entretiens auprès du grand public, 53 % des Français disent savoir ce qu'est un semi-conducteur, mais seulement 18 % déclarent très bien savoir de quoi il s'agit. « Nous avons voulu connaître l'impact que les semi-conducteurs peuvent avoir pour eux et la très grande majorité sait qu'ils font partie de leur quotidien », a expliqué Erwan Montaux, directeur général d'Intel en France. « 80 % des personnes interrogées disent qu'ils ont été sensibilisés sur ce sujet ou en ont entendu parler et 20 % disent avoir été directement impactés à cause de retards de livraison de produits qu'ils avaient commandés ».

Autre aspect de l'étude abordé - indisponible en ligne pour l'instant, mais que la rédaction a pu consulter -, celui de la dépendance de l'Europe - qui avance doucement ses pions avec le Chips Act - dans le domaine des puces vis-à-vis de pays étrangers. « 45 % des personnes interrogées disent que l'Europe a une carte à jouer et 61 % que s'ils avaient le choix, ils choisiraient des produits contenant des semi-conducteurs d'origine française », poursuit Erwan Montaux. Devant ce constat, que peut faire un acteur américain comme Intel qui conçoit et fabrique des puces par essence non concernées par la souveraineté européenne et encore moins françaises ? Le positionnement du fondeur apparaît plutôt habile : « Nous ne voulons pas seulement disposer de lieux de fabrication en Europe ce qui ne correspond pas à de la souveraineté, mais nous voulons mettre notre savoir-faire et partager notre propriété intellectuelle avec des industriels européens », poursuit Erwan Montaux. « ll est très important de créer un écosystème européen ou de le dynamiser. On ne parle pas que de fabrication, mais aussi de tout ce qui est en amont et en aval. On peut imaginer dans les années à venir que les puces les plus avancées soient designées, fabriquées et assemblées en Europe ».

Evolution de la production mondiale de semi-conducteurs selon le pays/région. (crédit : Boston Consulting Group / Semiconductor Industry Association)

L'activité de service de fonderie encore marginale

Sentant le vent tourner, Intel a créé l'an dernier son activité de services de fonderie (IFS) pour répondre aux besoins d'industriels de secteurs variés (automobile, services, énergie...) de faire fabriquer leurs puces. Le récent accord avec ARM montre d'ailleurs à quel point cette activité correspond à des ambitions particulièrement fortes. « Elle montre des résultats encourageants avec plusieurs dizaines de puces déjà en test pour une valorisation de 4 Md$. Nous voulons, à travers le Chips Act, garantir des capacités de production pour que les industriels européens fabriquent leurs puces et leur proposer nos brevets, y compris autour du x86 », conclut Erwan Montaux. Une fabrication européenne qui pourrait aussi coûter plus cher, sans pour autant devenir un repoussoir à l'achat puisque 69 % des personnes interrogées par Ipsos se disent prêtes à payer plus pour un produit incluant des composants électroniques fabriqués en France (64 % en Europe).

Intel traverse actuellement une période de turbulence et compte bien se relancer en misant plus que jamais sur IFS mais aussi sur les modèles de semi-conducteur haut de gamme les plus rentables. Le chiffre d'affaires de cette activité par rapport au reste du groupe reste cependant marginal (800 M$ sur 63 Md$). Mais le fondeur est plus que jamais décidé à avancer ses pions sur un marché au potentiel estimé à 1 000 Md$ sur lequel il est loin de faire cavalier seul. Selon une dernière étude de marché du Gartner, Intel a glissé à la 2e place juste derrière Samsung Electronics.