Les membres de la commission sur la Chine de la Chambre des représentants des États-Unis ne comptent pas laisser le gouvernement de leur rival s'en tirer comme ça. En effet, alors qu'en début de semaine, la Commission chinoise des affaires du cyberespace a pris la décision de bloquer la vente de certains produits Micron dans son pays, certains politiques états-uniens estiment que le ministère du Commerce américain devrait imposer des restrictions commerciales à Changxin Memory Technologies (CXMT), premier fabricant chinois de DRAM.
Pour rappel, le gouvernement chinois a interdit l'utilisation de certains composants Micron dans plusieurs secteurs, en raison de craintes que ces produits posent pour la sécurité de la chaîne d'approvisionnement des infrastructures technologiques clés du pays. Pour la secrétaire de presse de la Maison Blanche, Karine Jean-Pierre, ces affirmations ne « reposent sur aucun fait ». Elle ajoute que le ministère du Commerce est actuellement en contact direct avec la RPC (République populaire de Chine) afin de clarifier la situation. « Nous sommes certainement troublés par la décision de la RPC et les récents raids contre des entreprises américaines », a-t-elle déclaré. Ajoutant, que ces mesures étaient incompatibles avec les affirmations de la Chine selon lesquelles elle ouvre ses marchés et s'engage à mettre en place un cadre réglementaire transparent. Surtout que CXMT est l'entreprise chinoise la plus susceptible de bénéficier de cette interdiction des produits Micron.
Les tensions ne cessent de croître entre les Etats-Unis et la Chine
« Les États-Unis doivent faire comprendre à la RPC qu'ils ne toléreront aucune coercition économique à l'encontre de leurs entreprises ou de leurs alliés », a déclaré le républicain Mike Gallagher, président de la commission spéciale sur le parti Communiste chinois, dans un communiqué. « Le ministère du Commerce devrait immédiatement ajouter ChangXin Memory Technologies à la liste des entités bloquées et veiller à ce qu'aucune technologie américaine, quelles que soient ses spécifications, ne soit transmise à CXMT, Yangtze Memory Technologies Corp (YMTC) ou à d'autres entreprises de la RPC opérant dans ce secteur », a-t-il continué. Ajoutant que le ministère du Commerce devrait également veiller à ce qu'aucune licence d'exportation américaine accordée à des entreprises étrangères de mémoires semi-conductrices opérant en RPC ne soit utilisée pour se substituer à Micron.
L'action de cette semaine représente le dernier différend en date dans la guerre commerciale en cours qui a vu les administrations présidentielles américaines de Joe Biden et de Donald Trump interdire l'utilisation de matériel fabriqué en Chine dans les réseaux américains et imposer des contrôles à l'exportation pour empêcher que les technologies informatiques les plus récentes ne tombent entre les mains de leur rival.
En octobre et décembre 2022, l'administration Biden a successivement mis en place des contrôles à l'exportation des semi-conducteurs puis, des interdictions pour les entreprises américaines de vendre leurs produits à une liste de 36 fournisseurs IT chinois. Parmi les entreprises concernées figurait YMTC, le plus premier fabricant de composants en Chine. À la suite de ces actions, les pays et les juridictions qui ont été involontairement pris dans le feu croisé de ces sanctions commerciales ont promis des investissements conséquents pour soutenir la fabrication nationale de semi-conducteurs.
Le reste du monde prit entre deux feux
Face à ces tensions et afin de tenter de réduire la dépendance chronique du continent européen à la Chine et aux Etats-Unis, le Conseil européen et le Parlement européen sont parvenus, en avril dernier, à un accord pour investir 3,6 Md$ pour renforcer les capacités de fabrication de semi-conducteurs sur le vieux continent (principalement et STMicroelectronics). Le tout, dans le but d'attirer 43,7 Md$ supplémentaires d'investissements privés.
De son côté, Micron a récemment annoncé qu'il investirait 500 milliards de yens (3,6 Md$) pour introduire la lithographie par ultraviolets extrêmes (EUV) au Japon. L'Américain s'est également engagé à dépenser 20 Md$ pour construire ce qu'il présente comme la plus grande usine de semi-conducteurs jamais construite aux États-Unis. Ce site doit voir le jour dans le comté d'Onondaga, dans l'État de New York. Le mois précédent, Micron a donné le premier coup de pioche d'une usine de fabrication de mémoires près de son siège à Boise, dans l'Idaho.