Les dessous de l'arrivée de Thierry Breton chez Atos
Un jour à peine après son annonce, la nomination de Thierry Breton à la tête d'Atos Origin ainsi que le brusque départ de Philippe Germond n'ont pas manqué de provoquer de nombreuses réactions.
Alors que le nom de Thierry Breton avait été évoqué pour reprendre les commandes d'Air France-KLM, d'Alcatel-Lucent ou encore de Carrefour, c'est finalement Atos Origin qui permet à Thierry Breton de retraverser l'Atlantique (il enseigne actuellement à l'école de Management de Harvard, aux Etats-Unis). Au sein de la SSII, l'inquiétude est de mise : « ça sent le roussi, une fois de plus », confie une informaticienne. Elisabeth de Maulde, présidente de Pierre Audouin Consultants est plus optimiste : « Thierry Breton ne vient pas tout à fait les mains vides, il a un parcours varié et une bonne vision du monde informatique et des télécoms. »
Et si France Télécom achetait Atos ?
La nomination de Thierry Breton soulève toutefois plusieurs interrogations. Pour commencer, pourrait-elle marquer un premier pas vers une revente de la SSII à France Télécom ? Thierry Breton a été PDG de l'opérateur entre 2002 et 2005, poussé par Didier Lombard, qui avait déjà appuyé sa candidature pour reprendre les rênes de Bull puis de Thomson. Ce même Didier Lombard est actuellement PDG de France Télécom. Pour les syndicats de l'opérateur historique, il n'y a pas de hasard et l'hypothèse d'une future revente ne fait aucun doute.
Le cabinet PAC est plus mesuré mais n'écarte pas l'idée : « Ce n'est pas impossible, observe Elisabeth de Maulde, et ce pour deux raisons : d'une part, Atos Origin a toujours fait l'objet de tentatives de rachat, et d'autre part, les marchés des télécoms et de l'informatique ont irrémédiablement tendance à converger. » BT a par exemple acquis plusieurs SSII, comme la Française Net2S en janvier dernier. Par ailleurs, France Télécom est à la fois l'un des plus gros clients d'Atos et un des principaux concurrents d'Orange Business Services. La SSII marche donc sur les plates-bandes de l'opérateur dans le secteur de l'intégration et de la VoIP en entreprise. Un rapprochement semble donc logique.
Philippe Germond évincé bien soudainement...
[[page]]Autre question : comment est-il possible que Philippe Germond ait été débarqué de manière aussi précipitée ? « D'après moi la soudaineté de ce départ est beaucoup plus surprenante que l'arrivée de Thierry Breton », souligne Elisabeth de Maulde. Après des mois de querelle avec les deux fonds d'investissement Pardus et Centaurus et même frôlé le démantèlement, Philippe Germond était parvenu à trouver un modus vivendi. Un plan de transformation avait même été voté en octobre dernier pour aider la SSII à se repositionner. C'est pourtant à l'unanimité que le conseil de surveillance d'Atos a désigné Thierry Breton pour remplacer Philippe Germond... donc avec l'aval de Pardus, Centaurus mais aussi de PAI Partners. Ce dernier, fonds d'investissement historique de la société, avait fait un retour surprise dans le capital d'Atos en juin puis en septembre 2008.
Perçu comme un véritable chevalier blanc, PAI Partners déclarait pourtant en juin vouloir « s'engager sur le moyen terme aux côtés de la direction pour l'aider à réaliser son plan de transformation ». Le « moyen terme » n'aura finalement duré que cinq mois, et aura coûté à Philippe Germond sa place. « La hache de guerre semblait être enterrée, peut-être que d'autres haches dont on ignorait l'existence ont refait surface », conclut Elisabeth de Maulde.