La nécessité de mieux comprendre le rapport des jeunes à Internet, aux plateformes et aux réseaux sociaux apparaît d’autant plus forte dans la période actuelle où les mesures de confinement liées à la crise du Covid-19 impliquent une utilisation plus grande des outils numériques. C”est précisément à cette problématique que l’Institut Montaigne a souhaité apporter des éléments de réponse. Les jeunes Français de 11 à 20 ans sont-ils conscients des risques du numérique ? Disposent-ils d’une maîtrise des outils suffisante et d’un recul adapté pour déjouer les pièges et adopter en toutes circonstances une conduite numérique responsable? En partant d’une enquête menée par le Pew Research Center auprès des adolescents américains, l’Institut Montaigne a cherché à collecter des données précises sur les adolescents français, en examinant tout particulièrement quatre grandes dimensions : le cyberharcèlement et les cyberviolences, la consultation de contenus choquants, le rapport à la vérité en ligne et la protection de la vie privée sur Internet. Les résultats de l’enquête d’opinion conduite apparaissent proches de ceux obtenus aux États-Unis. Sous l’intitulé Internet: le Péril jeune, elle a permis de pointer plusieurs faits marquants.
Principaux messages: Si les jeunes indiquent être conscients des risques potentiels du Net et savoir y faire face (94%) l’enquête souligne que les phénomènes de cyberviolence les touchent particulièrement. Ainsi, plus d’un jeune sur deux (56%) dit avoir été victime de cyberviolences au moins une fois tandis qu’un sur trois (35%) y a déjà été confronté à plusieurs reprises. Dans le détail, un adolescent sur cinq déclare par exemple qu’il lui est déjà arrivé plus d’une fois d’être « victime d’insultes » (18%), ou de « recevoir des images intimes non demandées » (17%). 13% des sondés avouent avoir été à plusieurs reprises victime «de rumeurs » et aussi de «menaces » (9%), tandis que plus d’un jeune sur cinq a plusieurs fois vu « un groupe se créer contre lui » ou que « des images intimes de lui soient mises en ligne sans son accord» (5%). Enfin, près d’un jeune sur quatre reconnaît avoir commis des cyberviolences.
Les jeunes filles particulièrement exposées
Une proportion équivalente de garçons et de filles ont subi ce phénomène mais les filles ont tendance à être victimes de rumeurs répandues à leur encontre en ligne (39% contre 26% pour les garçons) ou à recevoir des messages non désirés au contenu sexuellement explicite (29% contre 20% pour les garçons). 40% des jeunes déclarent avoir été confrontés à au moins deux situations différentes caractérisant un harcèlement ou une intimidation en ligne. À cet égard aussi, les filles sont davantage ciblées puisque 15% d’entre-elles disent avoir vécu au moins 4 des situations identifiées contre 6% des garçons.
Dans le même temps, les jeunes pensent majoritairement que leurs parents appréhendent bien le cyberharcèlement (59%) mais que leurs professeurs (58%), les entreprises de réseaux sociaux (66%) et les responsables politiques (79%) ne parviennent pas à résoudre ce problème. Environ 6 parents sur 10 craignent que leur enfant soit intimidé en ligne (59 %) ou échange des images à caractère sexuel (57%) mais la plupart sont confiants dans leur capacité à apprendre à leur enfant comment bien se comporter en ligne (45%). Le rapport pointe également une mauvaise compréhension des dispositifs réglementaire (comme le RGPD), législatif (loi française "Informatique et Libertés" de 1978, ou éducatifs (intégration des enjeux de protection des données personnelles dans les cycles d’enseignement).
Des incertitudes face à la législation
En effet, 6 parents sur 10 indiquent qu’ils ne sauraient pas vers quelle administration se tourner si leur enfant était victime de cyberviolence. Ce n’est donc pas le manque de dispositifs qui peut être déploré, mais plutôt la complexité et la multiplicité de ceux existants, considère l'Institut Montaigne. Pour l’organisme, ces enjeux multiples de protection, mais aussi de compréhension et de réaction nécessitent de prendre en considération trois principaux piliers, à savoir la formation, l’accompagnement et la responsabilisation pour remédier à cette situation.