Coup de tonnerre chez SAP. Vishal Sikka, CTO du groupe et l'un de ses principaux dirigeants, quitte la société. Membre du conseil executif, il supervisait l'ensemble du développement des produits de l'éditeur d'origine allemande. Il était en particulier responsable de la plateforme de traitement en mémoire HANA sur laquelle SAP a énormément misé ces dernières années. Ce départ, pour lequel Vishal Sikka a invoqué -très classiquement en pareilles circonstances- « des raisons personnelles », entraîne un remaniement important quelques semaines seulement avant le départ prévu du co-CEO Jim Hagemann Snabe qui doit laisser Bill McDermott seul à  la tête de SAP.
Un départ qui pourrait préfigurer un changement de stratégie chez SAP
Dans un communiqué, Hasso Plattner, co-fondateur de SAP qui a suscité le développement de HANA par ses travaux personnels, souligne qu'aucune société ne peut faire ce que fait SAP dans le cloud avec la plateforme HANA actuellement et il « remercie personnellement Vishal » pour avoir contribué à amener SAP à ce stade. « Nous resterons amis alors qu'il entame la prochaine étape de son parcours », juge-t-il utile d'ajouter.
Le dernier commentaire souligne la relation personnelle et professionnelle qui s'est nouée entre Hasso Plattner et Vishal Sikka au cours des dernières années chez SAP alors que l'éditeur lançait HANA, base de données en mémoire sur laquelle il a porté son logiciel de gestion phare (la Business Suite) et dont il a élargi la portée. La plateforme de traitement in-memory est maintenant exploitée pour un ensemble de services dans le cloud.
En manière de plaisanterie, Vishal Sikka avait coutume de présenter HANA comme sa « petite fille ». (ici sur Sapphire Now 2012 à Madrid, photo LMI)
Il y a neuf mois, SAP avait annoncé que Jim Hagemann Snabe allait quitter son poste de co-CEO de l'entreprise, tout en gardant un siège au conseil de supervision. Le départ de Vishal Sikka pourrait indiquer un changement de stratégie de SAP compte-tenu des nominations qui lui succèdent, selon l'analyste Ray Wang, chairman de Constellation Research, interrogé par nos confrères d'IDG News Service. Dans la foulée de cette annonce, la société indique qu'elle nomme au conseil éxecutif Robert Enslin, responsable mondial des ventes, et Bernd Leukert, responsable de l'innovation chez SAP, deux personnes qui ont joué un rôle central dans la transition de SAP vers le cloud et l'adoption de HANA, indique le co-CEO Bill McDermott dans un communiqué. « Les clients de SAP recherchent de l'expérience opérationnelle et les meilleures pratiques pour supporter leur propre transformation au travers de l'innovation sans perturbation ».
Vishal Sikka déçu de ne pas se voir confier un poste de co-CEO ?
Bernd Leukert a rejoint SAP en 1994 et il a orchestré le portage de la Business Suite sur HANA. C'est lui désormais qui pilotera l'organisation du développement au niveau mondial dans la redéfinition des applications métiers sur la plateforme cloud HANA, précise le communiqué de SAP. Robert Enslin de son côté est arrivé chez SAP en 1992 et a commencé par renforcer la présence de l'éditeur en Afrique du Sud avant de passer en Amérique du Sud. Il a ensuite été vice-président senior de la région Amérique du Nord. A eux deux Bob Enslin et Bernd Leukert totalisent 42 années d'expérience chez SAP, souligne ce dernier.
Le départ de Vishal Sikka suggère un parallèle avec celui de Shai Agassi en 2007. Lui aussi était responsable technologique du groupe allemand et il était pressenti pour devenir son prochain CEO. Il a quitté la société lorsque le co-CEO de l'époque, Henning Kagermann, a étendu son contrat de deux ans, ce qui conduisait Shai Agassi à devoir selon toute probabilité accepter un poste de co-CEO. Il est possible que Vishal Sikka ait espéré se voir confier les fonctions de co-CEO et qu'il ait récemment appris que ce ne serait pas le cas ou peut-être pas tout de suite. Quoi qu'il en soit, son héritage au sein de SAP est très important « à un moment où SAP avait besoin d'une direction sur les futures plateformes », a pointé Ray Wang. Pour lui, les enjeux sont différents avec Bern Leukert qui prend sa suite. Quoi qu'il en soit, l'enjeu est de taille pour SAP : « Peuvent-ils créer rapidement des apps que les gens voudront acheter ? », s'interroge l'analyste.