Vingt ans plus tard, un skipper du Vendée 2012, Arnaud Boissières, réalisera en course une expérience de télémédecine, avec des téléconsultations par visioconférence, électrocardiogramme, prise de tension sur la durée et en période de stress, analyse de données médicales à distance.
"On veut démontrer que si on est capable de le faire via satellite dans les conditions extrêmes des mers du Sud, on pourra le faire dans de meilleures conditions encore avec une liaison ADSL ou SDSL dans les déserts médicaux ruraux", explique à l'AFP Michel Rioli, directeur de la société partenaire, Rio-Telesanté. En Vendée, elle mène un projet "Telemedinov", qui va relier une vingtaine de sites inter-opérables, entre hôpitaux, médecins spécialistes, pharmacies, infirmiers, pour la prise en charge de quelque 110.000 personnes, dont des îles (Yeu, Noirmoutier).
70 millions de financement public
Une quinzaine de projets sont ainsi accompagnés à hauteur de 70 millions d'euros au total par les pouvoirs publics, souligne Pierre Simon, président de l'Association nationale de télémédecine (ANTEL), regroupant des professionnels de santé qui entend veiller à ce que la télémédecine "ne dérape pas" dans son essor actuel, par exemple vers un cap purement industriel.
Selon un relevé fin 2011 des Agences régionales de Santé, il y a 256 expériences ou projets de télémédecine en France, dans les chantiers prioritaires identifiés par l'Etat: accidents vasculaires-cérébraux, télé-imagerie, médico-social, télémédecine dans les prisons, télésurveillance des maladies chroniques.
"Par exemple vous avez un pacemaker, vous venez une ou deux fois l'an du fond de l'Aquitaine à Bordeaux pour vous entendre dire en une consultation de 10 minutes que votre pile marche bien. Or tout cela peut se faire par télétransmission, suivi des données à distance. Et cela permet de dire +on a reçu de votre pacemaker des données qui nous étonnent. Venez nous voir+", appuie le pneumologue Marc Sapène, qui pilote par ailleurs une étude de télémédecine sur l'apnée du sommeil sur 1 800 patients.
"En activité médicale quotidienne, il y a 50-60% des patients qu'on pourrait ne pas voir dans ces circonstances-là . Par contre on n'a pas suffisamment de temps pour des malades difficiles. Avec la télémédecine on peut mettre toute la force sur ces malades-là ", ajoute-t-il.
Télésurveillance des patients à risque
"Elle ne fera pas disparaître le facteur humain patient-docteur, mais va le replacer là où il doit être". D'ailleurs "les patients adhèrent, car ils voient les résultats, les déplacements évités, se sentent suivis sur la durée", assure Patrick Dary, un cardiologue féru de numérique, qui de son propre chef et avec une bourse, a mis en place en milieu rural en Haute-Vienne (Saint-Yrieix) une télésurveillance de 350 patients à risque d'AVC ou d'insuffisance cardiaque, via un réseau de 11 médecins, 3 maisons de santé et 2 maisons de retraite. A son échelle, il dit avoir réduit les hospitalisations de 10%.
La télémédecine, estime l'ANTEL, sera un "outil fort de réduction de l'inégalité de l'accès aux soins". Pour autant les habitudes "ne se changeront pas en deux minutes", convient le Dr Sapène. Celles des patients, mais surtout celles des professionnels, pour lesquels "il faudra inventer une nouvelle façon de rémunérer l'activité de soignant, autre que l'acte médical", particulièrement pour le télésuivi et la télésurveillance.