Selon Malik Saadi, analyste principal chez Informa, « le fait que Nokia travaille sur une version Android maison - le projet Normandy - pour faire tourner ses smartphones bas de gamme signifie que le constructeur a besoin de l'OS de Google pour être compétitif sur ce segment de plus en plus important du marché ». En effet, le marché des smartphones est en pleine transformation et dans les prochaines années, les terminaux low-cost seront le principal moteur de la croissance. Ce marché a déjà aidé Nokia à maintenir ses volumes de vente au moment où sa famille de smartphones Lumia était en difficulté. Mais ce n'est plus le cas cette année, puisque le constructeur n'a pas réussi à trouver sa place dans le déferlement de smartphones Android à bas prix. C'est pour contrer cette menace que Nokia a travaillé sur sa propre version de l'OS de Google. La variante de Nokia sera basée sur le code Open Source d'Android, mais, selon plusieurs rapports, elle aura sa propre interface utilisateur et ses propres services. « Cela permettrait à l'entreprise de réduire l'écart de prix et de performance entre sa ligne de smartphone Asha actuelle et la famille Lumia basée sur Windows Phone », a déclaré Malik Saadi.
Google n'est pas responsable des difficultés de Nokia, ce sont plutôt les concepteurs de processeurs comme Qualcomm et MediaTek. « Leur politique de design de référence est beaucoup plus favorable et plus avantageuse en terme de coût aux nouveaux entrants qui développent des smartphones Android à bas coût et rendent les produits de Nokia moins attractifs », a déclaré l'analyste. Selon Qualcomm, « les programmes de référence permettent de proposer un guichet unique où les fabricants peuvent trouver les outils et les ressources dont ils ont besoin de façon mettre rapidement et à moindre coût leurs matériels en production ». D'autant que « la qualité des produits a fait d'immenses progrès », comme l'a déclaré Johan Lodenius, directeur du marketing chez MediaTek. « En choisissant Android, Nokia pourrait également profiter de ces programmes au lieu de se faire écraser par eux », a estimé l'analyste d'Informa.
Un programme Nokia Android mort-né avec le rachat par Microsoft ?
Mais, le sort réservé aux smartphones de Nokia concernera bientôt Microsoft. L'acquisition de la division Devices & Services de Nokia a été approuvée par les actionnaires et par les régulateurs européens et américains. La transaction devrait être finalisée au cours du premier trimestre de l'année prochaine. Dès le bouclage du rachat, Microsoft devra décider de la stratégie qu'elle adoptera sur le segment des smartphones à bas coût. Pour Roberta Cozza, directrice de recherche chez Gartner, « la meilleure option pour Microsoft serait de faire descendre le prix de ses Windows Phone en dessous des 100 dollars HT ». Par ailleurs, celle-ci pense peu probable que Microsoft sorte des mobiles sous Android.
Microsoft va devoir aussi trouver la manière de retenir les utilisateurs prêts à acheter un téléphone plus cher. S'ils optent pour Android, ils peuvent préférer un Galaxy de Samsung à un Windows Phone. « Mais si Nokia installe au-dessus d'Android une interface utilisateur qui ressemble à Windows Phone, cela pourrait être évité », selon Malik Saadi. En attendant, la pression à la baisse sur les prix se poursuit. En même temps qu'Android 4.4, Google a lancé son « Projet Svelte ». Celui-ci vise à réduire les besoins en mémoire d'Android afin que l'OS puisse « tourner confortablement » sur les smartphones d'entrée de gamme dotés de 512 Mo de RAM seulement. Quelle que soit la voie que choisira Microsoft, la bataille pour dominer le marché avec des produits à moins de 100 dollars va se durcir.