A quelques jours du passage à la nouvelle année, la décision de la Poste de créer une « e-lettre rouge » en lieu et place du timbre rouge pour le courrier urgent a du mal à passer. L’affaire n’est pourtant pas récente, car le groupe avait dévoilé en juillet dernier la transformation de ses offres courrier et en particulier cette fameuse lettre urgente dématérialisée.
« Pour les besoins ponctuels d’envois urgents, comme par exemple pour résilier un abonnement, La Poste proposera l'e-lettre rouge, envoyée depuis Laposte.fr jusqu’à 20h, imprimée par La Poste à proximité du destinataire, dans le respect de la confidentialité du contenu, et distribuée le lendemain sous enveloppe arborant un dessin de timbre rouge », pouvait-on lire dans un communiqué. Le prix du service est de 1,49 euros TTC (tarif jusqu’à 6 pages en noir et blanc, il faudra ajouter 0,30 € pour la couleur). Pour expliquer sa décision, le groupe mettait en avant le changement des usages, « en 2010, les ménages envoyaient 45 lettres prioritaires, seulement 5 en 2021 », soit 300 millions de plis chaque année sur un total de 7 milliards.
Accentuer la fracture numérique
A l’époque, cette décision était presque passée « comme une lettre à la Poste ». Le syndicat Force Ouvrière était monté au créneau en novembre dernier pour dénoncer la fracture numérique engendrée par cette innovation. Le Défenseur des droits alerte depuis quelques temps sur la dématérialisation et l’inégalité d’accès au service public. Certaines populations (personnes âgées, handicapées, étrangères) ont des difficultés avec « cette marche forcée » à la dématérialisation des actes administratifs. Dans son rapport de suivi, le Défenseur constate par exemple que 15% des Français ne disposent pas d’une connexion Internet à leur domicile ou encore que 28% des personnes s’estiment peu ou pas compétentes pour effectuer une démarche administrative en ligne.
Pour répondre à cette problématique, la Poste prévoit un système où les bureaux de Poste pourront prendre une photo de la lettre avec leur mobile nommé « Smartéo » et l’envoyer. Problème, ces bureaux sont de plus en plus espacés sur le territoire et implique que la personne puisse se déplacer. Autre inconvénient soulevé, la présence d’un tiers ne garantirait plus le secret des correspondances. Argument balayé par la Poste interrogée par nos confrères de Ouest-France en soulignant que « les agents s’engagent à respecter scrupuleusement les informations concernant la vie privée dont il aurait connaissance dans l’exécution de son service. » Une bien belle déclaration, qui ne rassure en rien ! Sur la conservation des données, le groupe a indiqué à BFM que le courrier sera sauvegardé pendant 1 an pour que l’expéditeur puisse y avoir accès en cas de réclamation « selon les règles RGPD et les datacenters sont sécurisés et basés en France ».