La prochaine technologie réseau sans fil 6G, qui remplacera la 5G et arrivera peut-être d'ici 2030, devrait offrir des débits de l’ordre de plusieurs centaines de gigabits par seconde. Les progrès techniques nécessaires sont lents, mais il y a des avancées. Jusqu'à présent, l’absence d'interface entre le spectre térahertz (THz) et les lignes de transmission optiques dures faisait obstacle au développement technologique. En effet, comment connecter les térahertz, essentiellement un spectre de fréquence hertzien situé entre les micro-ondes et l'infrarouge, aux lignes physiques nécessaires aux transmissions de données sur les longues distances ? Déjà, la courbure de la Terre, d'une part, limite la ligne de visée, si bien qu'un câblage réel est nécessaire pour les grandes distances. Les courtes distances peuvent également être entravées par des obstacles environnementaux : à mesure que l'on s'éloigne du spectre, à mesure que les longueurs d'onde diminuent, le blocage par des objets, la pluie ou le brouillard, devient de plus en plus apparent.
Des chercheurs de l'Institut de technologie de Karlsruhe (KIT) affirment avoir trouvé comment réaliser la liaison à la fibre optique. Dans un communiqué, ils expliquent qu’il faut développer des modulateurs fonctionnant sur la nanophotonique ou nano-optique plasmonique, une technologie de piégeage de la lumière à l’échelle nano (basée ici sur du silicium) qui « couple directement l'antenne du récepteur à une fibre de verre ». En d'autres termes, la radio devient un élément du câble. Selon ces chercheurs, « la nano-optique plasmonique permettra des connexions térahertz avec des débits de données très élevés de plusieurs centaines de gigabits par seconde ».
50 gigabits/s dans les labs
Lors de ses tests, l'équipe de recherche a fait la démonstration d'une liaison térahertz « intégrée de façon transparente » à la fibre en utilisant une liaison au niveau du récepteur térahertz. Elle a pu obtenir une transmission térahertz vers la fibre optique de 50 gigabits par seconde. À titre de comparaison, les débits de transmission de données sans fil par voie hertzienne avec la technologie LTE et l’usage des ondes radios sont généralement de 20 mégabits par seconde (Mb/s) environ, ce qui est loin de ce que l'équipe a produit. Verizon, en phase de lancement de la vague 5G millimétrique aux États-Unis, affirme que les vitesses courantes de son service 5G fixe seront de l’ordre de 300 Mb/s environ.
Les autres défis de la 6G
La connexion fibre-térahertz n'est pas le seul domaine où des progrès sont nécessaires pour mettre en œuvre la 6G au cours des prochaines années. Selon les experts, il faudra aussi maîtriser le multiplexage spatial en térahertz pour obtenir les débits souhaités. Le multiplexage spatial est le lieu où les signaux de données individuels sont diffusés en flux. Chaque bit de la bande passante est ainsi utilisé et réutilisé en permanence, ce qui améliore l'efficacité de la bande passante. Il faudra aussi améliorer l'efficacité en développant des antennes MIMO plus performantes qui pourront mieux exploiter les signaux à voies multiples envoyés sur plusieurs routes.
Il faut également prendre en compte l’affaiblissement du signal de pénétration, autrement dit la différence entre la force du signal lorsqu'il entre dans un bâtiment ou une structure et l'air. La perte augmente avec les fréquences plus élevées, comme c'est le cas pour le térahertz. Mais le niveau de l’affaiblissement dépend du matériau traversé. Dans le cas d’un verre clair, par exemple, la perte de pénétration globale est moins élevée qu’avec des cloisons sèches. Cela signifie qu’il faudra peut-être revoir la nature des matériaux de construction utilisés pour les bâtiments en s’appuyant de nouvelles sciences des matériaux pour tirer parti du débit de données offert par la 6G.
Des expérimentations aux Etats-Unis
Au mois de mars dernier, la Commission fédérale des communications américaine (FCC) a annoncé une nouvelle catégorie de licences de spectre expérimentales pour les fréquences comprises entre 95 GHz et 3 THz afin que les opérateurs de téléphone et les scientifiques puissent travailler sur ce spectre. « Nous pensons que la 6G arrivera vers 2030 », a déclaré Ari Pouttu, professeur à l'Université d'Oulu et architecte système 5G, à notre confrère de Network World lors d’une rencontre en Finlande l'an dernier. « La 6G pourrait offrir des débits de plusieurs téraoctets par seconde et une latence de l'ordre du millionième de seconde (microseconde) », avait-il ajouté.