Les opérateurs mobiles virtuels (MVNO) doivent pouvoir concourir sur un pied d'égalité avec les opérateurs hôtes lors du lancement de la 4G. C'est ce que demande l'Autorité de la concurrence face aux récentes conditions du marché, déclenchées par l'arrivée de Free Mobile et de ses offres à petit prix sans terminal subventionné ainsi que face à l'arrivée de la 4G.
S'agissant des conditions tarifaires, l'Autorité de la concurrence relève que, même s'il existe un espace économique viable sur le segment des offres prépayées et les offres classiques, les MVNO ne semblent pas en mesure de reproduire, dans des conditions de rentabilité minimale, les offres low cost, en particulier celles à 19,99 € actuellement proposées par les quatre opérateurs de réseau, Orange, SFR, Bouygues Télécom et Free Mobile.
Les conditions techniques inadaptées
De plus, l'Autorité pense que certaines conditions techniques de leurs contrats ne leur permettent pas non plus, à ce jour, de répliquer les offres de services haut de gamme que leurs opérateurs hôtes sont en train de lancer en s'appuyant sur la 4G. Sont notamment en cause les débits de téléchargement et l'accès à des innovations techniques permettant notamment d'améliorer la couverture de leurs clients, telles que l'utilisation de femto-cellules, ainsi que l'accès à des services de géolocalisation.
L'Autorité souligne que les engagements pris devant l'Arcep par les opérateurs mobiles disposant d'un réseau doivent entrer en application avant même le lancement des premières offres commerciales 4G  Or, l'Autorité constate que les MVNO peuvent rencontrer certaines difficultés pour répliquer les offres lancées par les opérateurs de réseau. Elle rappelle que certains opérateurs se sont notamment engagés à ne pas restreindre la liberté commerciale de leurs MVNO, à accueillir des full MVNO sur leur réseau et à faire droit à toute demande raisonnable d'accès et à pratiquer des tarifs raisonnables. L'Autorité considère qu'aucune barrière technique ou tarifaire ne doit être artificiellement érigée par les opérateurs de réseau au risque de désavantager les MVNO dans la dynamique de la concurrence.
Un taux d'attrition important
Les MVNO déclarent qu'une part importante de leur clientèle - laquelle se caractérise par un profil de faible consommation et était essentiellement positionnée sur des offres prépayées - migre vers les forfaits post-payés d'entrée de gamme à prix réduit de Free Mobile et des trois autres opérateurs de réseau.
L'arrivée de Free Mobile a entraîné une baisse significative des prix de détail et l'émergence d'un nouveau segment de marché représenté par les offres SIM nues sans engagement. Les trois plus anciens opérateurs de réseau ont répliqué en lançant de nouvelles offres, notamment sous des marques dites « low cost » : Sosh (Orange), B&You (Bouygues Telecom) et Red (SFR).
Double concurrence : la 4G haut de gamme et le low cost
Commercialisés uniquement sur internet, ces forfaits sans engagement et sans téléphone (offres dites « SIM nues ») sont proposés à des prix plus bas que les offres classiques reposant sur le principe d'un subventionnement du terminal en contrepartie d'un (ré)engagement sur 12 ou 24 mois. Dans le même temps, la 4G associé au haut débit mobile constitue, selon les opérateurs, une rupture technologique qui va permettre le développement d'offres haut de gamme intégrant des prestations d'échanges de données : navigation rapide sur internet, consommation d'images et de communications vocales en Haute Définition, visioconférence, etc.
L'Autorité enregistre que les trois opérateurs les plus anciens ont indiqué réfléchir à un  positionnement prix de ces offres afin de promouvoir un nouveau modèle économique s'appuyant à la fois sur des offres low cost et sur des offres premium.
Pour l'Autorité, les engagements des quatre opérateurs de réseau, Orange, SFR, Bouygues Télécom et Free Mobile, doivent, en toute rigueur, s'appliquer avant même le lancement des premières offres commerciales 4G.  L'Autorité estime que les MVNO doivent en effet être en mesure de proposer leurs offres dans les mêmes délais que leurs hôtes, ce qui suppose qu'une offre de gros leur ait été proposée. L'absence de visibilité à long terme tout comme la lenteur des négociations commerciales brident la capacité des MVNO à innover et à explorer la demande et limitent de ce fait leur autonomie commerciale.
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Une part de marché des MVNO à 13%
L'Autorité de la concurrence tire un bilan positif de l'arrivée des MVNO. Elle estime que les opérateurs mobiles virtuels ont contribué à animer le marché de la téléphonie mobile et rencontré un certain succès en contribuant à enrichir l'offre proposée aux consommateurs. Entre 2008 et 2012, leur part de marché globale est ainsi passée de 5 à 13 % du parc mobile grand public.
Mais elle considère que les conditions tarifaires et techniques faites aux MVNO actuellement semblent limiter leur capacité à réagir et à concurrencer efficacement les offres des opérateurs de réseau sur le marché de détail à l'heure d'une forte baisse des prix et de l'arrivée de la 4G.
L'Autorité considère que les MVNO éprouvent des difficultés pour être présents sur l'ensemble des segments du marché (en particulier low cost et haut de gamme) et que par conséquent la crainte existe de voir marginaliser ces acteurs qui ont contribué, depuis 2004, à l'animation concurrentielle du marché. L'Autorité a été saisie par l'association Alternative Mobile, qui représente les opérateurs virtuels et vient de rendre son avis aujourd'hui.
En 2008, l'Autorité avait déjà réagi
L'Autorité souligne que dans son avis de 2008 (voir avis 08-A-16 et le communiqué du 30 juillet 2008), elle avait relevé que les conditions d'hébergement techniques et tarifaires imposées par les opérateurs de réseau aux MVNO étaient particulièrement contraignantes et ne leur permettaient pas de proposer des offres commercialement intéressantes pour les consommateurs. Cette situation expliquait leur faible développement en France.
L'Autorité avait alors réclamé un renforcement de la concurrence sur le marché de gros de l'hébergement, et s'était, à cet égard, déclarée favorable à l'attribution d'une quatrième licence. Elle avait également insisté sur la nécessité de déverrouiller les contraintes contractuelles pesant sur les opérateurs mobiles virtuels (durée des contrats, exclusivité, clauses de préemption et de préférence portant sur la cession des actifs).
Ces préconisations avaient contribué, du point de vue même de l'association Alternative mobile, à une amélioration de leurs conditions d'hébergement (possibilité de devenir full MVNO) et à l'entrée de Free mobile sur le marché.
Des services innovants
L'Autorité estime que les opérateurs mobiles virtuels ont été à l'origine d'innovations commerciales intéressantes pour le consommateur, dont certaines sont d'ailleurs devenues par la suite le standard du marché. Elle cite :
- les forfaits SMS illimités et 1ères gammes de forfaits sans engagement
- les forfaits tout illimité grand public
- les forfaits pour les frontaliers et les voyageurs réguliers
- les forfaits au compteur
- les forfaits personnalisables
L'autorité note également que, afin de se démarquer des opérateurs de réseau, les MVNO se sont positionnés sur des niches de marché, ciblant des besoins spécifiques non encore couverts. Certains MVNO se sont par exemple adressés à une clientèle de jeunes consommateurs, avec des offres tournées vers la musique et les contenus multimédias.
Plus récemment, de nouveaux MVNO se sont développés sur le segment des appels vers l'international, ciblant spécifiquement la demande émanant des consommateurs étrangers ou d'origine étrangère, les offres dites « communautaires ».