Ce n'est pas une petite victoire : depuis quelques jours, Orange a modifié son contrat d'hébergement des autres opérateurs dans ses noeuds de raccordement optiques (NRO). Recadré par l'Arcep en décembre dernier, il a concrètement revu sa clause « assurances » et propose aujourd'hui des conditions tarifaires permettant d'optimiser les coûts des assurances (moins de 10000€ par an) pour les plus petits opérateurs. L'Association des opérateurs télécoms alternatifs (AOTA), lancée il y a tout juste un an, figurait parmi les acteurs dont le lobbying a permis cette évolution majeure dans le secteur. Son secrétaire, Nicolas Guillaume, assure que « grâce à cette action il va y avoir tout un tissu d'acteurs régionaux qui vont investir pour rentrer dans les noeuds de raccordement optiques d'Orange. Et dans les mois et années qui viennent, de nouveaux acteurs de détail et de gros vont arriver et animer le marché de la fibre à l'échelle d'une région en passant par les infrastructures d'Orange. »
C'est pour représenter ces opérateurs télécoms régionaux que l'AOTA a pris forme à la mi-mars 2017. « Nous arrivions à une époque charnière où l'Arcep s'intéressait au marché BtoB, avec des axes de développement qui ne correspondaient pas à ce que nous souhaitions » explique Nicolas Guillaume. « Nous nous sommes alors dit qu'il fallait se fédérer pour mieux se faire connaître des instances nationales et internationales, tout en participant aux politiques d'aménagement numérique du territoire localement. » De 22 adhérents initiaux, l'association en dénombre aujourd'hui 43 qui cumulent un chiffre d'affaires de 130M€ et 700 emplois directs dans toute la France.
Défendre les intérêts régionaux
L'association répond à un réel besoin puisqu'elle se propose de faire remonter par courrier à l'Arcep les problèmes que rencontrent par exemple les opérateurs de détail les réseaux d'initiative publique (RIP). Elle est, d'ailleurs, fortement soutenue par l'autorité de régulation qui l'a intégrée, quelques semaines à peine après son lancement, à ses analyses de marché. La dernière action de l'AOTA date de la semaine dernière. L'association a envoyé une demande à Bercy pour suspendre l'attribution des subventions aux collectivités qui ont choisi Covage comme délégataire pour mettre en place un RIP.
Cet opérateur de gros construit et exploite des réseaux de communication pour le compte des collectivités. Ses seuls clients sont les opérateurs de détail qui lui louent des capacités techniques pour les mettre à la disposition des clients finaux. Or, l'entreprise pose des difficultés opérationnelles aux opérateurs de détail, avec des retards de production, des modalités commerciales discriminantes, etc. L'AOTA avait, avant d'alerter le secrétariat au numérique, mise en garde l'entreprise par deux fois. « Notre travail n'est pas de bloquer l'aménagement numérique du territoire mais, au contraire, de nous assurer qu'il s'effectue bien », tempère Nicolas Guillaume. « En l'occurrence, il y a un disfonctionnement majeur du marché avec cet acteur. Notre souhait reste tout de même que Covage prenne conscience de ces problèmes et propose un plan d'actions précis et tienne des engagements envers les opérateurs de détail et ses collectivités clientes. »
Des partenariats européens et nationaux
En un an, l'association a su se rapprocher des institutions nationales et européennes pour faire entendre la voix de ses adhérents. Si elle n'entretient que des relations de courtoisies avec des acteurs comme la Fédération française des télécoms, l'AOTA a tissé des liens avec d'autres groupements. Fin janvier, elle a ainsi adhéré à l'ECTA, l'association européenne des opérateurs télécoms alternatifs, avec Bouygues et Free pour la France. Très récemment également, elle a créé un partenariat avec la fédération EBEN. Et l'AOTA vient d'annoncer aujourd'hui une association avec Syntec numérique. Ceci dans le but de mener des actions communes ainsi que des connexions professionnelles. « Quand vous êtes un intégrateur régional, le fait de savoir qu'il y a des opérateurs régionaux pas loin de chez vous qui déploient de l'infrastructure et qui peuvent vous accompagner est une bonne chose », indique le secrétaire de l'association.
L'AOTA avait aussi rencontré en 2017 le CDRT et proposé un partenariat à la précédente équipe. L'association attend aujourd'hui de rencontrer le nouveau président pour entériner cette demande. « Naturellement, rien ne s'oppose à ce que les adhérents du CDRT demande une adhésion individuelle à l'AOTA et inversement », précise Nicolas Guillaume.
Recherche d'adhérents dans le Centre et le Sud-Ouest
Pour poursuivre sur sa lancée, le groupement présidé par David Marciano souhaite désormais renforcer sa communication auprès d'autres opérateurs alternatifs et fédérer ainsi de nouveaux adhérents régionaux. Nicolas Guillaume table sur une cinquantaine de nouveaux membres d'ici le printemps. Des prospections vont être notamment réalisées dans le Centre, l'Auvergne et le Sud-Ouest où l'association n'a pour le moment pas ou peu d'opérateurs acquis à sa cause. Mais l'AOTA reste ouverte à tous, même à des corps de métiers proches de celui de ses membres comme les hébergeurs et les intégrateurs. Cependant, le secrétaire indique que l'organisation ne grandira pas indéfiniment et ne devrait pas dépasser la centaine d'adhérents.