Née le 18 février 1998, la société Ikoula spécialisée dans l'hébergement web et de newsgroup n'a pas la folie des grandeurs dans son ADN. Enracinée à ses débuts à Courbevoie - terre d'accueil historique de nombreux infogéreurs et prestataires IT -, l'entreprise co-fondée par Jules-Henri Gavetti et Caroline Mertens a misé sur une croissance raisonnée de ses activités. « La société a été financée avec mon PEL pour créer une SARL avec 50 000 francs de capital », nous a raconté Jules-Henri Gavetti, président d'Ikoula. « Au début on s'est positionné sur la création de sites web mais comme on n'a pas été trop doué pour ça on s'est positionné sur l'hébergement de forums et de newsgroups avec PlaneteTechno.com puis d'autres de VTT et des sites de WAP mobiles qui ont fait un gros carton ». Alors que d'autres acteurs - OVH en tête - avaient fait le choix d'héberger sous FreeBSD, Ikoula a misé sur Windows. « Le fait de mettre du VBScript dans les pages était très développé car accessible à tous les développeurs n'ayant pas un grand niveau et se tournant vers des langes interprétés. On a pris le contre-pied de Perl et Python avec des services développés en ASP comme Javoue.com », poursuit Jules-Henri Gavetti.
Installée à Boulogne (92), Ikoula a fait le pari de miser sur la région pour localiser ses datacenters. « On est parti en province, à Reims, où on a acheté [en 2006] un datacenter et transféré toutes nos ressources de Courbevoie », rappelle le président d'Ikoula. Pourquoi Reims ? « On a été très bien accueilli dans cette région et on avait un rémois dans l'équipe », raconte amusé Jules-Henri Gavetti. « Notre motivation est que l'on devenait en s'installant ici le plus gros acteurs par rapport à certains fournisseurs d'infrastructures ».
Le datacenter de Reims d'Ikoula s'étend sur 3 000 mètres carrés de surface. (crédit : Ikoula)
L'avenir en pods
Poursuivant sa stratégie de conquête raisonnée au niveau régional, le groupe a en 2014 acheté un autre site à Laon (Nord). De mêmes capacités, puissance et surface (3 000 mètres carrés), ces deux sites reposent cependant sur des briques techniques totalement différentes. « Comme dans le secteur aéronautique où les avions sont équipés de deux moteurs différents, nous avons opté pour des briques réseaux et systèmes variant d'un site à l'autre comme Cisco et Huawei. Les éléments de climatisation, de sécurité physique et d'incendie sont aussi différents tout comme les équipes de maintenance et de supervision », fait savoir Jules-Henri Gavetti. L'objectif de cette isolation est simple : s'assurer que des problèmes sur un site ne puissent pas se retrouver dans un autre, et que les mêmes faits débouchent sur les mêmes conséquences. En l'absence de synergies, des coûts supplémentaires sont engendrés par ces choix d'architecture, sans toutefois impacter de façon significative les comptes.
Car depuis sa création, Ikoula est rentable et affiche un résultat net positif, par exemple en 2017 de quelques centaines de milliers d'euros pour un chiffre d'affaires d'environ 10 millions d'euros pour 60 collaborateurs, sachant que 20 recrutements sont prévus (support technique) d'ici la fin de l'année. « On est chaque année en croissance à deux chiffres », explique Jules-Henri Gavetti. « On fait de la croissance en bon père de famille sans l'idée de jouer la carte de l'hypercroissance. Cela n'empêche pas certains de nos produits d'afficher des croissances de 200 à 300% ». Parmi elles, on trouve en particulier les pods, lancés en 2015, pour proposer une infrastructure cloud déployable facilement dans une bureau, une agence, permettant de déborder vers d'autres environnements en fonction des besoins. « Dans les pods, on place toute la technologie cloud public que les clients aiment comme Cloudstack, openswitching, Zabbix, etc. auxquelles on ajoute des ressources open source de logs, machines virtuelles, etc. à la carte », précise Jules-Henri Gavetti. Proposés à l'achat, les pods d'Ikoula vont être proposés sous peu en marque blanche pour les opérateurs. « On va avoir une forte accélération sur les pods, cela va nous permettre d'étendre nos capacités d'investissement et d'aller beaucoup plus vite », indique le dirigeant.
Les géants US dans la spirale du Cloud Act
Ciblant essentiellement les PME, Ikoula n'a pas pour ambition d'aller lutter contre Amazon, Azure ou encore Google sur le terrain du cloud public. Mais cela n'empêche pas le défenseur du cloud gaulois de jeter quelques pierres dans le jardin des géants américains. « En termes de droit pénal, cela va devenir très compliqué pour les entreprises US de ne pas faire figurer dans leurs contrats qu'elles sont soumises au Cloud Act », avance Jules-Henri Gavetti. « Contrairement aux acteurs locaux, les grands players changent leurs CGV et les clients n'ont pas d'autre choix que de les accepter ou de faire demi-tour », avance le dirigeant.