Les serveurs s'appuyant sur des designs génériques de processeurs conviennent parfaitement pour certaines applications. Néanmoins, pour accélérer certains traitements, IBM prévoit de leur adjoindre des co-processeurs de sa fabrication, ainsi que des circuits spécialisés. C'est ce qu'a expliqué Jai Menon, directeur technique de la division Systèmes et Technology d'IBM, à l'occasion d'une interview donnée la semaine dernière à nos confrères d'IDG News Service.
Big Blue va continuer à proposer des serveurs de base avec des processeurs x86. Mais, de plus en plus, il va aussi disposer de configurations serveurs et d'appliances optimisées pour des domaines particuliers, comme le cloud computing, les traitements transactionnels ou des secteurs d'applications tels que la médecine. « Tout le monde n'a pas besoin des mêmes machines, rappelle Jai Menon. Les systèmes x86 ne constituent pas une réponse adaptée pour tout, pas plus que les systèmes à base de Power ».
Certains pas ont déjà été faits dans cette direction, par exemple avec l'appliance CloudBurst (photo ci-dessus, à gauche), conçue pour accélérer les déploiements d'applications dans le cloud et les environnements virtualisés. Ou encore par l'adjonction de processeurs graphiques Nvidia en complément des processeurs dans certains serveurs lames pour booster les application scientifiques et mathématiques.
Des circuits reprogrammables
IBM développe maintenant des puces et des circuits reprogrammables qui peuvent décharger le processeur de certaines tâches, indique Jai Menon. Big Blue crée aussi un nouveau langage de programmation qui pourra fonctionner en tandem avec les accélérateurs afin de doper la performance du système.
En février, le groupe de Sam Palmisano a annoncé le processeur PowerEN (Power Edge of Network, photo ci-dessus, à droite) qui peut être utilisé de façon assez large, ou bien en tant que co-processeur vers lequel certains traitements, tels que des tâches réseaux, peuvent être transférés. La puce sera intégrée dans des serveurs et également proposée sur des cartes à insérer dans un port PCI (peripheral component interconnect).
IBM met par ailleurs l'accent sur les circuits FPGA (field-programmable gate arrays) qui peuvent exécuter des tâches spécifiques plus rapidement que les processeurs, par exemple, le chiffrement de données ou des transactions bancaires. Le constructeur en utilise déjà dans des serveurs pour les traitements XML.
Des modifications sont nécessaires au niveau de la couche logicielle pour tirer le meilleur parti de ces composants associés, précise Jai Menon. IBM supporte le standard OpenCL, un jeu d'outils de programmation conçus pour développer et gérer l'exécution de tâches parallèles entre des processeurs et des puces graphiques. Big Blue essaie de rendre les FPGA adaptables et facilement reprogrammables au travers d'un langage compatible Java baptisé Lime, toujours en phase de recherche, a ajouté le directeur technique. « On aimerait programmer les FPGA comme on le fait en programmation classique afin de pouvoir reconfigurer ces circuits à la volée pour les affecter à une nouvelle catégorie d'applications », explicite-t-il.
Selon lui, les FPGA reprogrammables pourraient réduire le besoin en Asic (application-specific integrated circuits), ces circuits spécialisés assignées à certaines tâches « Les Asic ne sont pas adaptables et ils sont longs et coûteux à élaborer ».
Cap sur les mémoires à changement de phase
A plus long terme, Jai Menon pense que les mémoires à changement de phase (phase-change memory, PCM) pourraient remplacer les actuelles mémoires dynamiques (DRAM) et révolutionner la façon dont les serveurs sont construits. Les PCM utilisent un matériau proche du verre qui peut passer de multiples états vers des formes cristallines en fonction de la façon dont ses atomes sont réarrangés.
« Elles sont suffisamment abordables pour qu'on puisse les rapprocher des disques et suffisamment rapides pour s'apparenter à de la mémoire », détaille Jai Menon. Lorsque leur prix diminuera, les utilisateurs pourront disposer de 5 à 10 fois plus de mémoire dans les serveurs par rapport à ce qu'apportent aujourd'hui les DRAM, affirme le directeur technique.
Ces mémoires seront par ailleurs non-volatiles. Les données ne seront pas perdues si l'alimentation d'un serveur tombe. « Vous pourrez concevoir différemment vos systèmes de gestion de fichiers et vos bases de données, et ces composants ont le potentiel nécessaire pour parvenir à diviser par trois la consommation électrique et le volume d'espace utilisé par les serveurs. »
IBM va continuer à développer ces PCM et les intègrera à ses serveurs, promet Jay Menon, sans indiquer toutefois à quelle échéance. Des industriels comme Samsung et Numonyx travaillent aussi sur les mémoires à changement de phase.
Illustration : Offre CloudBurst (à gauche), processeur PowerEN (à droite) - crédit photo : IBM
IBM va doper ses serveurs avec des puces spécialisées
IBM redouble d'efforts dans la construction de serveurs qui associent aux processeurs classiques des accélérateurs spécialisés développés par sa R&D, à la fois pour diversifier son offre et pour cibler des traitements spécifiques. Big Blue dirige aussi ses efforts vers les circuits FPGA qui peuvent remplacer les Asic pour exécuter certaines tâches plus rapidement que les processeurs. Et il s'intéresse aussi aux prometteuses mémoires à changement de phase.