En filigrane lors de la présentation des résultats trimestriels de janvier 2024, les suppressions de postes chez IBM auraient débuté. Selon Jason Andersen, un ancien cadre d'IBM aujourd'hui vice-président/analyste principal chez Moor Insights & Strategy, ce plan social ne concerne pas les collaborateurs les plus âgés, comme ce fût le cas à un moment et suscité des critiques. L’analyste écarte aussi le lien avec la GenAI qu’IBM avait laissé entendre. Pour lui, Big Blue fait tout pour que ces licenciements restent discrets, compte tenu de l'annonce faite en janvier par l’entreprise et de ses efforts récents en matière de réduction d’emploi. « Ça fait très longtemps qu’IBM utilise cette tactique », a ajouté Jason Andersen, qui a été pendant plus de huit ans chef de produit senior chez IBM, un poste qu'il a quitté en 2008.
Pas d’emplois encore remplacés par la GenAI
Publiée pour la première fois dans The Register, cette information sur les licenciements a été confirmée dans divers forums de discussion. Un courriel assez vague envoyée par la porte-parole d'IBM, Sarah Minkel, semble confirmer ces coupes salariales : « En début d'année, IBM a annoncé un très minime rééquilibrage de son personnel par rapport à son effectif mondial, et nous prévoyons toujours de finir l’année 2024 avec un niveau d'emploi à peu près identique à celui que nous avions au début de cette même année ». Sur la base des chiffres de l’effectif mondial de la société qui se situait à environ 288 000 personnes à la fin de l’année 2023, The Register a fait le rapide calcul suivant : « si le « pourcentage très bas à un chiffre » était de 1 %, le nombre de licenciements s’élèverait à 2 880 ; à 5 760 licenciements pour 2 %, à 8 640 licenciements pour 3 %, ou plus ».
L’an dernier, le CEO Arvind Krishna avait déclaré qu'IBM prévoyait de remplacer environ 7 800 emplois par l'IA, sans toutefois fournir de calendrier précis. Jason Andersen pense que cette référence à l'IA concernait l'IA générative et qu'il était beaucoup trop tôt pour imputer les licenciements en cours à la GenAI. « Je n'y crois pas. C'est un peu trop tôt. Peut-être dans deux ans », avait-il avancé, estimant que ces coupes n’interviendraient pas avant la fin de l'année 2026. L’analyste n'a pas pu confirmer directement que les licenciements en cours correspondaient à ceux dont IBM a parlé en janvier, mais il a pu constater qu’ils avaient eu lieu. « Par rapport aux six mois précédents, deux fois plus de personnes ont quitté IBM ces derniers mois pour une raison ou une autre. Et la société n'est pas la seule entreprise à procéder à des suppressions d’emploi. »
Un rééquilibrage sur le cloud
Il pense par ailleurs que les licenciements d’IBM n’ont rien à voir avec l'âge ou le sexe pour éviter toutes critiques. « Big Blue ne considère pas nécessairement les choses en termes de nombre. L’entreprise examine la situation d'un point de vue fonctionnel, en termes de contributeurs individuels au sein d'un groupe par rapport aux managers, explicitement, car à de nombreuses reprises, l’entreprise a été pointée du doigt à ce sujet, et qu’elle a mis en place certaines mesures pour prévenir ces critiques », a expliqué l’analyste. Parfois même, il a vu l'entreprise prendre des décisions opposées. « Par exemple, une personne jugée comme peu performante a pu bénéficier d'une seconde chance pour éviter que son licenciement laisse penser qu’il était lié à l’âge ou au sexe ».
Selon lui, un grand nombre de suppression de poste sont liés à des réductions d'effectifs dans le cloud, suite à un rééquilibrage des entreprises vers des environnements sur site. En 2020, au début de la pandémie, beaucoup d’entreprises sont allées trop loin dans le cloud. Pour autant, si aujourd'hui, on entend dire souvent que la GenAI va déboucher sur des réductions d’emploi, Jason Andersen estime que certains licenciements dans le cloud résultent d’une plus grande efficacité due à l'automatisation de l’IT et des opérations IT. « Étant donné qu'une grande partie de l'automatisation chez IBM exploite d'autres formes d'IA, très probablement l'apprentissage machine, on pourrait dire que l'IA est un peu impliquée dans ces licenciements, mais pas la genAI ».