L'annonce de Big Blue arrive après la déclaration de Hewlett-Packard : il y a un mois, ce dernier révélait qu'il avait commencé à repenser le design de base des ordinateurs. « L'objectif d'IBM est de fournir les briques de base de systèmes capables de traiter intelligemment de grandes quantités de données tout en consommant moins d'énergie », a déclaré Tom Rosamilia, vice-président senior, Systems and Technology Group d'IBM. Ces ordinateurs seraient très utiles dans des domaines comme la recherche sur le cancer, la modélisation météo et ils pourraient gérer des services plus intelligents dans le cloud. « Certains accélérateurs comme les processeurs graphiques ont permis d'améliorer les performances des ordinateurs sur le court terme, mais il devient de plus en plus difficile de réduire la taille des processeurs à base de silicium pour améliorer les performances et baisser la consommation d'énergie », a ajouté le vice-président senior. « L'histoire offre plusieurs exemples de bonds technologiques. Mais si nous ne commençons pas à les inventer aujourd'hui, nous ne franchirons jamais cette étape », a-t-il encore déclaré.
Concevoir la base qui servira demain aux futurs PC
IBM travaille déjà sur la conception d'ordinateurs quantiques et de supercalcuteurs imitant le fonctionnement du cerveau. Depuis des décennies, les scientifiques développent des théories sur ces machines, mais elles s'avèrent difficiles à créer. « Ces ordinateurs du futur sont basés sur des architectures différentes de celles utilisées aujourd'hui, et nous ne savons pas encore quel nouveau type d'architecture privilégier par rapport à un autre », a déclaré le vice-président senior, Systems and Technology Group d'IBM. « Big Blue pourrait mélanger et combiner différentes technologies pour fournir les briques de base qui serviront à construire de nouveaux systèmes informatiques », a ajouté Tom Rosamilia. « Le système qui fonctionnera le mieux servira de socle aux technologies de demain et pour de nombreuses années », a-t-il encore déclaré. « Il faut planifier cela très en avance pour arriver à ce résultat et nous prenons l'affaire très au sérieux ». Les premiers fruits de cette recherche bénéficieront certainement en priorité aux ordinateurs à haute performance. Ensuite, ces technologies pourraient se retrouver dans les ordinateurs portables et desktop, mais Tom Rosamilia n'a pas été en mesure de dire combien de temps il faudrait attendre pour cela.
IBM commence à tester des wafer en graphène pour produire les puces de demain.
Dans le même temps, la loi de Moore énoncée en 1965 par le cofondateur d'Intel, Gordon Moore, continue à s'appliquer : celui-ci avait annoncé que la complexité des semi-conducteurs doublerait tous les deux ans. C'est encore le cas aujourd'hui, mais cette évolution exponentielle devrait marquer le pas dans la prochaine décennie. Les ingénieurs cherchent de nouveaux designs de puces pour augmenter les performances, d'autant plus que leur taille diminue. Intel se prépare à livrer des puces PC fabriquées selon le processus de gravure à 14 nanomètres et le fondeur projette de descendre au processus à 10 nanomètres dans les années à venir. « La dernière révolution dans la fabrication des puces date de 1950, quand les chercheurs sont arrivés à purifier le silicium, et il va devenir de plus en plus difficile d'intégrer davantage de fonctionnalités dans les puces quand on atteindra les 7 nanomètres et moins, à mesure que l'on se rapproche du niveau atomique », a expliqué Supratik Guha. « Mais on ne sait pas encore très bien par quoi le silicium sera remplacé », a ajouté le directeur scientifique.
IBM commence à tester des puces reposant sur des nanotubes de carbone pour remplacer le silicium.
Les nanotubes de carbone, ces cylindres en atomes de carbone, semblent l'option la plus prometteuse pour le remplacer. Les chercheurs d'IBM travaillent toujours sur la réduction de la taille de ces nanotubes, mais ils doivent aussi résoudre des problèmes de refroidissement, et beaucoup de questions se posent au sujet de la sécurité. « Cependant, tous les chercheurs s'accordent pour dire que ces problèmes techniques peuvent être résolus », a affirmé Supratik Guha. Les ordinateurs quantiques et neuronaux impliquent aussi des recherches sur le comportement de l'ordinateur. Dans le cadre de son programme Synapse, Big Blue développe des machines qui imitent le fonctionnement du cerveau. Celles-ci reproduisent approximativement la façon dont le cerveau traite l'information en parallèle, utilisant pour cela les milliers de milliards de connexions synaptiques des neurones. En 2011, IBM a montré une puce neuronale avec des synapses programmables ayant des capacités d'apprentissage pour la navigation et la reconnaissance de formes. L'objectif d'IBM est de construire une puce neuronale qui imite le cerveau humain, avec 10 milliards de neurones et 100 trillions de synapses, et ne consommant que 1 kilowatt.
Un ordinateur quantique déjà opérationnel chez D-Wave Systems ?Â
Les ordinateurs quantiques fonctionnent avec des bits quantiques (qubits) qui peuvent prendre les valeurs 1 et 0. Dans les ordinateurs classiques, les bits ne peuvent prendre qu'une valeur fixe de 1 ou de 0 à un moment donné. Grâce à leur capacité de stocker et de partager des données dans plusieurs états, les qubits pourraient permettre d'accélérer les temps de calcul. Mais il reste de nombreuses questions à résoudre, comme le bruit quantique, qui met les qubits dans un état où ils ne sont plus capables d'exécuter les programmes normalement. Le seul ordinateur quantique connu est vendu par D-Wave Systems, mais, plus tôt cette année, les chercheurs d'IBM ont émis des doutes quant aux capacités quantiques de la machine.