Les cas usages de l'intelligence artificielle - et surtout ses sous-catégories que sont les machine et deep learning - se multiplient jour après jour. Que ce soit aussi bien à des fins de maintenance prédictive, de détection de l'évolution d'une maladie que de la prédiction des ventes en pics de saisonnalité, on ne compte plus les applications qui en tirent parti. Sans surprise, le secteur des ressources humaines et en particulier du recrutement s'est emparé de ces technologies afin de faciliter l'embauche de collaborateurs et les aider à trouver les perles rares.
Déjà embarquées dans l'analyse et le traitement des données de CV, les technologies IA commencent à être de plus en plus utilisées dans les entretiens d'embauche eux-mêmes. Sur ce créneau, de nombreux acteurs se positionnent comme HireVue, Modern Hire (ex Montage et Shaker), Sparkhire, Sonru, TalentSonar, Talview... Leur postulat ? Aider les recruteurs à détecter la masse de données produites par un candidat lors de son entretien, aussi bien celles relevant de l'expression orale (nombre de mots, lexique utilisé...), que des émotions (tremblement de la voix, intonations, expression faciale...) ou du comportement (réactions physiques, posture...).
Unilever et IBM séduits par le recrutement vidéo augmenté à l'IA
Les entreprises faisant appel à ce type de solutions sont nombreuses, c'est le cas notamment pour IBM, Dunk'in Donuts ou encore Unilever. Pour ce dernier, leader des produits de grande consommation (Axe, Dove, Lipton...) qui compte 170 000 employés, le recrutement en vidéo augmenté à l'IA utilise la technologie de Hire Vue. Son principe ? Enregistrer les réponses des candidats à des questions d'entretien prédéfinies et analyser des éléments tels que les mots-clés, l'intonation, le langage corporel, avec synthèse automatique des résultats au responsable du recrutement. A noter que cet outil n'est pas utilisé en tant que moyen final d'embauche mais entre dans un processus débutant avec un dépôt de candidature (de plus en plus sur les réseaux sociaux comme Linkedin) et une batterie de tests en neuroscience. Mais la décision finale du recrutement reste bel et bien entre les mains d'un humain.
Complémentaire, la technologie IA dans le processus de recrutement une aide précieuse pour le recruteur permettant de déboucher sur des gains non négligeables. « L'intelligence artificielle et l'entretien vidéo sont peut-être plus aptes à identifier des candidats prometteurs qu'une interview classique, ce qui permet d'économiser de l'argent et de réduire le temps d'embauche », expliquait déjà en 2017 Deloitte dans son étude Talent acquisition: Enter the cognitive recruiter. « Par exemple, Hilton a utilisé une plateforme d’interviews vidéo pour réduire son cycle de recrutement de six semaines à cinq jours seulement. Les entretiens vidéo peuvent réduire les questions d’évaluation avant l'embauche de 200 à 5 et de ne réaliser plus qu'un entretien pour la finaliser ».
Vers une fracture entre candidats ?
Intéressante, cette technologie ne rallie cependant pas tout le monde à sa cause. D'autant qu'elle pourrait créer un fossé entre des générations de candidats sachant maîtriser leur gestuelle et réactions et d'autres moins. « «Cela va favoriser les personnes qui savent bien faire des entretiens vidéo et tout ensemble de données comportera des biais qui excluront des personnes qui auraient réellement été excellentes dans cet emploi », a indiqué Anna Cox, professeur d'interaction homme-machine à l'University College London (UCL).