C’est la dernière décision prise par la CEO Meg Whitman pour redresser l'une des plus anciennes entreprises de la Silicon Valley : la scission de l’activité services qui sera ensuite récupéré par Computer Sciences Corp (CSC). Rappelons que la division services de HPE est en grande partie issue du rachat d'EDS en 2008 pour un montant de 13,9 milliards de dollars. Pas plus tard que l'an dernier, Hewlett-Packard avait scindé ses activités en deux, séparant la vente de produits et services de datacenter (HPE), et la vente de PC (HP Inc.). Aujourd’hui, HPE poursuit ce découpage, pariant sur le fait qu'une entreprise plus petite aura plus de flexibilité pour s’adapter et attirer de nouvelles entreprises dans un monde de plus en plus dominé par le cloud. HPE prévoit d'achever sa « scission-fusion » d’ici mars 2017. La nouvelle entreprise sera dirigée par Mike Lawrie, président du Conseil d’administration, président et CEO de Computer Sciences Corp. Meg Whitman disposera d’un siège au conseil d'administration, et les autres administrateurs seront nommés pour moitié par HPE et pour moitié par CSC. En France, CSC possède près de 2500 salariés sur ses trois sites dont Paris et Toulouse. Rappelons enfin que même si Capgemini l’avait démenti, la SSII française avait envisagé un rachat de CSC.
Selon HPE, « cette décision s’inscrit de façon logique » dans la stratégie engagée pour redresser l’activité de services aux entreprises, qui a lutté, pendant des années, pour développer ses ventes et améliorer sa rentabilité. Essentiellement, la scission annoncée hier consiste à se séparer de l’activité résultant de l’acquisition en 2008 de la société de services EDS, pour laquelle HP a dépensé 13,9 milliards de dollars environ. « Les services cloud font de plus en plus partie de la vie des entreprises, et il devient beaucoup plus difficile de rivaliser dans la vente de services IT », a déclaré Charles King, analyste chez Pund-IT. Comme d'autres analystes qui ont commenté la transaction, celui-ci s’interroge sur le timing de l’opération. Selon lui, elle a peut-être été préparée dès le mois d’octobre, quand HP a entériné la première scission de ses activités en deux entités distinctes.
Une lente déconstruction du meccano HP
Depuis lors, HPE s’est positionné comme partenaire de la « transformation » auprès des grandes entreprises, promettant de les aider à s’adapter aux technologies émergentes comme l’analyse big data, la mobilité et le cloud. Cependant, après la scission de sa division services, le message risque d’être plus difficile à faire passer auprès des clients. « Comment être un partenaire stratégique de la transformation sans l’appui d’une activité de services solide ? », s’interroge pour sa part l’analyste de Gartner, Thomas Bittman. Selon lui, la division des services techniques de HPE, qui s’est enrichie de nouveaux services, reprendra une partie de l’activité. Celui-ci doit rencontrer l’équipe dirigeante de HPE aujourd’hui et espère obtenir plus de détails sur l’opération. « HPE sera également plus libre de s’associer de façon très ciblée avec d'autres fournisseurs de services, ce qui pourrait être intéressant », a-t-il déclaré, évoquant des secteurs comme la sécurité gérée.
Charles King exprime des préoccupations similaires. « Il y a lieu de se demander si HPE ne sera pas confrontée à des handicaps concurrentiels face à des entreprises comme IBM, Dell et Lenovo qui disposent de services aux entreprises conséquents », s’interroge ainsi l’analyste. Ce dernier pense également que HPE va s’appuyer sur des partenariats. Dans un communiqué, Meg Whitman a déclaré que les clients bénéficieraient de « services plus solides et plus polyvalents, mieux à même d'innover et de s’adapter à un paysage technologique en constante évolution ». Les actionnaires HPE détiendront environ 50 % de la nouvelle entreprise. HPE dit qu'ils gagneront environ 8,5 milliards de dollars en « valeur après impôt ». « La fusion des entreprises permettra également de réaliser des économies de coûts d'environ 1 milliard de dollars la première année », a encore précisé HPE, mais l’opération de scission coûtera aussi de l’argent.
Les actionnaires sont satisfaits
L’annonce faite hier ne fait pas état de licenciements, mais l'an dernier, HPE avait déjà fait savoir qu’elle supprimerait 33 000 emplois d'ici 2018, en plus des 55 000 suppressions déjà annoncées. « La situation doit être terriblement difficile pour les salariés des services de HP, déjà très démotivés par les dégraissages successifs », a estimé pour sa part Charles King. Hier, HPE a aussi annoncé ses résultats financiers. Le chiffre d'affaires net du deuxième trimestre a atteint 12,7 milliards de dollars, en hausse de 1 %, par rapport à l’année précédente. « C’était la première fois, en cinq ans, que les activités de HPE ont augmenté d’une année sur l’autre », a déclaré l’entreprise. Le bénéfice net a atteint 320 millions de dollars, contre 305 millions de dollars à trimestre égal un an plus tôt. Les investisseurs ont bien réagi à l’annonce de mardi, l'action de HPE gagnant 11 % à 18,10 dollars à la clôture des marchés. Quant aux actions de CSC, elles ont grimpé de 28 % à 45,50 dollars quelques heures après l’annonce.