Le partage de designs de puces pourrait stimuler le développement des processeurs et améliorer l’expérience sur les smartphones Android. Mais Google pourrait aussi se servir de ce levier pour unifier le fonctionnement des terminaux Android et mettre fin à certaines incompatibilités, chaque fabricant de matériel restant maître de ses appareils et de ses puces. La fragmentation du monde Android contraste avec l'intégration des produits Apple qui développe ses propres puces et propose une expérience cohérente à l’utilisateur. Selon The Information, Google voudrait co-développer les puces afin d’avoir son mot à dire sur les technologies, aussi bien celles des processeurs que celles des appareils photo.
Un grand nombre de technologies de pointe dans les domaines de la réalité augmentée et de la réalité virtuelle pourraient modifier la façon dont on utilise les terminaux mobiles, et selon les analystes, Google voudrait prendre de l'avance dans ces secteurs pour offrir des expériences cohérentes sur tous les terminaux Android. « Si l’on prend le problème d’un point de vue holistique, un contrôle sur le hardware pourrait en effet contribuer à lisser les usages », a déclaré Nathan Brookwood, analyste principal chez Insight 64.
Des partenaires pour développer ces puces
Grâce à ses puces Exynos, Samsung propose déjà des applications de réalité virtuelle dans ses derniers smartphones Galaxy. Qualcomm, Nvidia, MediaTek et d'autres ont aussi développé des GPU qui peuvent gérer du graphique haut de gamme et fournir des expériences AR et VR. Mais à l'heure actuelle, les expériences varient en fonction des matériels. Google pourrait éventuellement baser ses designs de processeurs sur des architectures vendues sous licence par ARM et les puces graphiques pourraient être dotées de capacités AR et VR, mais il faudrait des années pour y parvenir. La firme de Mountain View va donc avoir besoin de partenaires spécialisés dans la conception de puces graphiques.
Pour l’instant, la société a mis une puce Nvidia dans sa tablette expérimentale Project Tango capable, selon Google, de voir le monde en 3D. Mais « le géant du Net n’a pas les coudées franches pour intervenir sur les conceptions de puces faites par des partenaires dont la stratégie consiste à doter les dispositifs de caractéristiques uniques pour mieux les différencier », a expliqué Roger Kay, analyste principal chez Endpoint Technology Associates. Google aura besoin de Samsung - le plus grand fabricant de périphériques Android - comme partenaire s’il veut que les choses bougent dans la conception de puces.
Un investissement payant à long terme
La puce conçue en interne par la firme de Mountain View pourrait devenir une sorte de modèle de référence, à l’image de ce qui s’est passé avec son ordinateur portable Chromebook Pixel et avec d’autres composants. Mais Google n’a probablement pas l’intention de devenir lui-même un fabricant de puces et entrer dans un marché déjà très concurrentiel où les marges restent faibles. « Les fondeurs peuvent facilement passer à côté ou anticiper trop vite de nouvelles fonctionnalités, comme c’est arrivé par le passé, et il est possible que Google essaye de mieux accorder le développement du hardware avec l’évolution des fonctionnalités », a déclaré Jim McGregor, analyste principal chez Tirias Research.
Le meilleur exemple de cette marche désordonnée est peut-être l’arrivée du 64-bits sur les appareils mobiles. Les fabricants de téléphones ont livré des terminaux 64-bits avant la sortie de la version Android compatible. Et il faut environ deux ans aux fabricants pour ajouter une nouvelle spécification dans une puce. Google peut mobiliser d’énormes ressources pour concevoir des puces ou un hardware, comme il l'a fait pour les serveurs et pour son smartphone Project Ara. Les efforts accomplis par l’entreprise de Mountain View pour apporter de la cohérence à l'écosystème Android devraient finir par payer. « Mais on n’y est pas encore », a déclaré l'analyste Roger Kay.