Fuzz, condamné pour atteinte à la vie privée, vient de fermer
Le tribunal de grande instance de Paris vient de condamner en référé fuzz.fr (un site d'informations alimenté par les internautes et exploité par la société Bloobox), à verser 1000 euros de dommages et intérêts et 1500 euros de frais de justice pour atteinte à la vie privée. Le tribunal accuse fuzz.fr d'avoir laissé en ligne un lien impliquant deux célébrités, et renvoyant vers un autre site, avec un article complet.
Eric Dupin, créateur de fuzz.fr se défend avec véhémence contre cette accusation, considérant qu'il agit en tant qu'hébergeur de contenu et non pas éditeur de site, auquel cas sa responsabilité n'est pas engagée sur les articles publiés par les internautes. Furieux, Eric Dupin a même fermé fuzz.fr. Sur son blog, on peut lire : « Le tribunal dans son ordonnance a retenu ma responsabilité d'éditeur en considérant que j'organisais l'information sur Fuzz en opérant un tri et une hiérarchisation des liens par catégories. Si vous connaissez notre site et le fonctionnement des Digg-like vous savez tous parfaitement que ceci est inexact. »
En tant qu'aggrégateur, Fuzz ne modère pas les liens postés par les internautes. Depuis la loi sur l'Economie numérique (LCEN, qui date du 21 juin 2004), ces sites sont considérés comme de simples hébergeurs, qui fournissent aux internautes des espaces de stockage, mais ne sont pas responsables des informations publiées. Ils sont obligés de supprimer des contenus illicites (pédopornographiques, racistes, négationnistes, etc.) qui leur sont signalés, mais uniquement sur demande par lettre recommandée. Ca n'a pas été le cas d'Eric Dupin, qui a directement été assigné en justice, le TGI considérant que Fuzz est un éditeur, donc bel et bien responsable du contenu qu'il diffuse.
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Cette affaire n'est pas sans rappeler celle qui a opposé Olivier Dahan (qui a gagné un procès contre le site Lespipoles le 28 février dernier) ou encore Jean-Yves Lafesse (qui s'est vu pour sa part débouté par le TGI de Paris dans son procès contre Dailymotion et Youtube). Elle n'a pas manqué de susciter de vives réactions dans la blogosphère.
Mais ce jugement très contesté remet surtout sur le tapis la problématique du flou le plus complet qui règne autour du statut d'hébergeur ou d'éditeur de sites Internet, notamment en raison de l'émergence des sites participatifs. D'après Christiane Féral-Schuhl, avocate associée du cabinet Feral-Schuhl / Sainte-Marie, « il faut redéfinir ces statuts, l'avenir de ces sites (comme leur fermeture) sera lié au régime de responsabilité qui sera retenu ».
Rappelons toutefois qu'il ne s'agit que d'un jugement en référé, c'est-à -dire traité en urgence afin de faire cesser des troubles « manifestement illicites », mais qu'il peut faire l'objet d'un jugement au fond. Le célèbre avocat blogueur maître Eolas estime pour sa part qu'Eric Dupin a tout intérêt à lâcher le dossier, étant donné qu'il s'en sort avec une condamnation relativement légère comparée à la demande initiale (35 000 euros)... sans compter le formidable coup de publicité que lui apporte cette affaire.