Outre un chantier hors-norme, c’est aussi un sujet de débat voir de polémique. La fin du réseau cuivre d’Orange est bel et bien lancé avec un agenda établi. Mais pour la concurrence, sur ce plan présenté auprès de l’Arcep et soumis à consultation publique, le compte n’y est pas. Aussi bien dans sa dimension technique, que sur l’aspect gouvernance. Sur le premier point, l’extinction du réseau cuivre va se dérouler en deux étapes. L'une est commerciale avec la fin au 1er janvier 2026 des offres cuivre (xDSL) dans les zones où les opérateurs ont installé la fibre (suivant ainsi le plan Très haut débit de l’Etat). Orange demande, dans le cadre de cette phase de transition, la possibilité d’aller plus vite et donc de réduire les délais de préavis. La seconde phase se déroulera entre 2026 et 2030 et prévoit la fermeture technique du réseau. L’extinction se fera progressivement avec des lots de communes éligibles.
Pour la concurrence, ce plan reste nébuleux et pas assez précis. Ainsi pour SFR, « pendant la période de transition 2020-2025, subsistent, en particulier, bien trop d’incertitudes pour justifier une possible réduction des délais de préavis et de fermetures (zones de fermeture commerciale et fermeture technique) ». Le parallélisme avec le plan Très haut débit est aussi critiqué par Bouygues Telecom : « Cette fermeture commerciale nationale, conditionnée dans le plan d’Orange à la finalisation totale, et dans les délais, du plan France Très Haut Débit met en risque la totalité du plan de fermeture ». L’opérateur s’attend à ce que les délais du plan ne soient pas respectés et hypothèquent donc l’agenda de l’arrêt du réseau cuivre. Un point agace aussi Bouygues Telecom, la possibilité pour Orange de déroger à la règle du 100% fibré avant d’éteindre le cuivre. « Cette remise en cause est particulièrement préoccupante car elle renforce le risque de « déclassement numérique », souligne-t-il. Iliad, de son côté, en profite pour réclamer la création d’un service universel haut débit avec un minimum de 10 Mbits par ménage.
Ne pas laisser Orange décider seul de tout
L’autre point de crispation de la concurrence, c'est la gouvernance du projet. Ils sont unanimes sur ce sujet, Orange ne doit pas faire cavalier seul. « En pratique, cette gouvernance supposée partagée n’en est pas une : Orange décide, puis éventuellement concerte, et in fine Orange reste seule décisionnaire », peut-on lire dans la réponse d’Iliad. Pour cela, Bouygues Telecom plaide pour « mettre en place un véritable pilotage industriel de ce projet national ». Même son de cloche chez SFR, qui réclame « une transparence totale et un nécessaire accompagnement d’Orange sur les modalités de fermeture ».
Message entendu du côté de l’Arcep qui juge dans un communiqué, « essentielle la mise en œuvre par Orange d’une gouvernance (nationale et locale) et d’un pilotage de projet adaptés aux enjeux et difficultés d’un tel chantier ». L’opérateur historique a également répondu à ces différents questionnements en promettant des « temps d’échange » sur les plans de fermeture et les lots de communes concernées. L’opérateur détaille acteur par acteur sa méthode de concertation intégrant l’ensemble des acteurs, mais en restant le maître du projet. Comme on le voit, la bataille sur l’arrêt du réseau cuivre promet d’être acharnée avec comme volonté pour la concurrence d'empêcher de voir un monopole se récréer sur la fibre. Ils n’ont pas envie de revivre les affres du dégroupage, qui avait en son temps été une bataille de chiffonnier entre France Telecom et les opérateurs alternatifs…