Le coût reste un sujet majeur pour les clients de SAP en général, encore plus quand il s'agît de s'envoler dans le cloud. On parle ici du prix de l'offre proprement dite ou de sa maintenance, mais c'est surtout le coût total des projets de migration d'une configuration on premise vers le cloud qui préoccupe les entreprises francophones. Bernard Cottinaud, chargé de mission au sein de l'USF, l'a confirmé, chiffres à l'appui, à l'occasion de la convention annuelle de l'association, à Lille les 9 et 10 octobre. Lors de la présentation de l'enquête de satisfaction 2024 de l'USF, deux des trois freins les plus importants à une migration vers Rise with SAP résident ainsi dans l'incertitude sur les coûts futurs (53 %) et le manque de ROI (41%).

Un constat qu'il est difficile d'imputer à une méconnaissance du cloud en 2024, puisque le temps de la découverte et du défrichage de la version Rise de l'ERP semble bien révolu. L'enquête de l'USF montre en effet que 40% des adhérents qui ont répondu ont au moins évalué la solution, alors qu'ils n'étaient que 8% il y a deux ans. 13% ont même déjà signé avec SAP.

Olivier Nollent, Pdg de SAP France, annonce 135 clients Rise with SAP sur cloud privé et 61 Grow with SAP, sur cloud public, en France. L'incertitude sur les coûts et les bénéfices demeurent donc bel et bien, malgré cette progression de la version cloud dans les stratégies des entreprises. « Un travail reste à faire pour mettre en regard le coût d'un fonctionnement Rise with SAP par rapport à la version on premise, analyse Bernard Cottinaud. Une comparaison d'autant plus difficile que les deux versions ne font pas la même chose ».

Un manque de recul sur le cloud

Avec le cloud, les entreprises n'ont en particulier pas le même recul du temps long qu'avec la décennie de pratique sur le on premise, comme l'a laissé entendre le président de l'USF, Gianmaria Perancin, lors de l'ouverture de la convention. « S'agit-il d'une question de structure, de technique, d'accompagnement du changement, de formation ? », s'est-il interrogé. Même si les chiffres datent de deux ans et ne concernent pas, loin de là, uniquement les migrations Rise with SAP, il s'est également référé à une étude de Veritas Technologies, datant de 2022 donc, qui montrait que la quasi-totalité des entreprises francophones (97%) auraient dépassé leur budget cloud initial.

Dans son introduction, Gianmaria Perancin a rappelé les promesses du cloud en général. Présentation mâtinée d'une légère ironie sur certains points. Flexibilité, accès global à la donnée, accélération de l'innovation et protection cyber. Tels sont les quatre traits les plus positifs attribués au cloud. Ces promesses du passage dans le cloud, lorsqu'elles sont tenues, vont cependant de pair avec des risques plus ou moins nouveaux, plus ou moins importants.

L'importance de la réversibilité des contrats

Parmi ceux-ci, Gianmaria Perancin a en tout premier lieu cité la dépendance accrue à certains acteurs et la difficulté associée à « sortir de liens complexes et coûteux » à défaire. Avec un sujet majeur, celui de la « réversibilité des données, mais aussi des services ». Pour le président de l'USF, les entreprises doivent « renforcer leur capacité à préparer les contrats, mais aussi regarder de près les travaux de la Commission européenne sur l'interopérabilité des services dans le cloud ». Sans surprise, il évoque aussi la « question cruciale de la souveraineté de la donnée. [...] Où sont-elles stockées, qui y a accès, sont-elles chiffrées convenablement ? Est-ce que la clé de chiffrement protège aussi en matière de conformité par rapport à la loi, par rapport au RGPD ? »

La question de pénurie de compétences dans les entreprises clientes, mais aussi chez les partenaires, et même les éditeurs, est une autre préoccupation majeure. Les ERP, SAP en tête, n'échappent pas à cette difficulté et trouver les profils nécessaires à des déploiements ou des bascules complexes, sur un marché des compétences IT en pénurie en général, demeure une préoccupation. Comme l'a rappelé Gianmaria Perancin, il s'agit d'ailleurs non seulement de compétences techniques ou de développement d'application, mais aussi de compétences juridiques, d'urbanisme, de gestion des projets, de gestion des licences, qui sont totalement nouvelles.

Choisir le cloud à son rythme

Enfin, et c'est une question récurrente qui concerne directement SAP, la relativité du temps est une réalité entre éditeur et entreprise clients. Quand SAP aimerait voir les entreprises embarquer dès aujourd'hui vers le cloud, les clients répondent « demain, peut-être après-demain », plaisante à peine Gianmaria Perancin. Point de mauvaise volonté, comme il l'a rappelé, cependant. Mais les entreprises ont des contraintes opérationnelles, stratégiques, organisationnelles, financières. Elles ont des objectifs stratégiques qui ne se résument pas à la migration de leur ERP dans le cloud. Et comme le président de l'USF l'a résumé avec une des formules qu'il apprécie : « le passage dans le cloud doit être choisi, et non subi ». À bon éditeur, salut.