Le retour de Pat Gelsinger à la tête d’Intel en janvier 2021 avait été un coup de tonnerre dans la Silicon Valley. Aujourd’hui, c’est un nouveau coup de semonce après l’annonce par la firme de Santa Clara du départ « à la retraite » de son patron charismatique et sa démission du conseil d’administration. Dans un communiqué, le dirigeant souligne que « ce jour est bien sûr doux-amer, car cette entreprise a été ma vie pendant la plus grande partie de ma carrière professionnelle ». Il a commencé chez Intel en 1979 où il a joué un rôle important dans la création de l’architecture du processeur 80486 original, tout en contribuant ensuite au développement de technologies clés, notamment l'USB et le WiFi, ce qui a conduit le fondeur à devenir le principal fournisseur sur les marchés des PC et des serveurs, hier dominés par les plateformes Unix avec PowerPC, Alpha, PA-Risc et Sparc. 

Cependant, il avoue dans le communiqué, « l'année a été difficile pour nous tous, car nous avons pris des décisions difficiles mais nécessaires pour positionner Intel dans la dynamique actuelle du marché ». Il fait référence ici aux résultats financiers de la société qui affichaient une perte historique de 16,6 Md$, mais aussi à la récente coupe des subventions promises par l’administration Biden au nom du Chips Act. Sans parler des difficultés à concurrencer Nvidia sur les accélérateurs et des problèmes dans certaines puces. La mise « à la retraite » de Pat Gelsinger s’apparente donc plutôt à une sanction contre celui qui était considéré il y a presque 4 ans comme un deus ex machina.

Un binôme pour co-diriger Intel par interim

Avec le départ de Pat Gelsinger, effectif depuis le 1er décembre, Intel a décidé de nommer David Zinsner et Michelle Johnston Holthaus, comme co-dirigeant par interim. Le premier est l’actuel directeur financier et le second était jusqu’alors directeur de la division client computing. Un communiqué indique que Michelle Johnston prend également les rênes de l’activité Produits regroupant la division client computing et les offres pour les datacenter, l’IA, les réseaux et l’edge. Sur le conseil d’administration, Frank Yeary, adminstrateur indépendant occupe la place de président par interim et annonce que le conseil va chercher un remplaçant à Pat Gelsinger.

Son successeur aura la lourde tâche de remettre Intel sur les rails et d’aller plus loin que le plan présenté par son prédécesseur en septembre dernier. Il s’articulait autour de trois objectifs : améliorer l'efficacité de la division Foundry, atteindre l'objectif de 10 Md$ d'économies annoncé précédemment (avec 15 000 suppressions de poste et l’abandon d’investissement en Europe), et renforcer la franchise x86 tout en développant la stratégie IA. Des rumeurs ont circulé sur des ventes d’actifs comme Altera, d’autres ont prêté à Qualcomm l’ambition de racheter Intel (une piste qui s’est refroidie la semaine dernière selon Bloomberg). Même les politiques américains ont discuté des différentes options pour la survie d’Intel. Une de celles-ci serait un rachat par AMD ou Marvell de l’activité conception de puces.