Selon les experts, même si la technologie 5G apporte d'énormes améliorations par rapport aux réseaux sans fil sous licence de la génération précédente, les bandes de fréquences de la 5G reposent sur une science physique déjà ancienne. Il peut être difficile de déterminer avec précision quelles fréquences utilisera la technologie 5G, notamment parce qu'elles varient fortement d'un pays à l'autre et même d'un opérateur à l'autre. En France, c’est la bande des 3,4/3,8 GHz (11 blocs de 10 MHz) qui sera utilisée dans un premier temps par la 5G. Mais globalement, la plupart des données 5G transiteront par trois groupes de fréquences principaux.
Fréquences basses : entre 650 MHz et 1 GHz
Les basses fréquences - de 650 MHz au plus bas, jusqu'à 1 GHz environ - sont particulièrement prisées par les opérateurs de téléphonie mobile qui déploient la 5G. Dans cette gamme de fréquence, les signaux se propagent sur des distances relativement longues, ce qui signifie que les fournisseurs de services peuvent couvrir une vaste zone à partir d’un seul point d'accès. Cependant, selon Bill Ray, analyste chez Gartner, dans la partie inférieure du spectre de radiofréquences, l’usage de la 5G est sérieusement limité. « Ce sont des fréquences très populaires », a-t-il expliqué. « Et l'armée et les chaînes de télévision en possèdent encore beaucoup ». Selon lui, cela pose un problème, car si la capacité des canaux est la même dans la partie basse et dans les hautes fréquences, c'est-à-dire que, si un canal de 5MHz de large dans la gamme des 850 MHz offre le même débit qu'un canal de 5 MHz de large dans la gamme des 2,6 GHz, le manque de spectre disponible signifie qu'il n'y aura tout simplement pas assez de canaux pour délivrer les vitesses de connexion élevées promises par la 5G. Pour atteindre des vitesses plus élevées, la 5G utilise des canaux plus larges. « En 3G, la transmission standard était de 5MHz de large », a ajouté Bill Ray. « En 5G, les créneaux ont 100 MHz de large, ce qui veut dire que le canal de transmission peut aller de 2,4 à 2,5 GHz ».
Fréquences moyennes : sub-6 GHz et ruée sur le spectre
La plupart des gains de performance et d'efficacité promises par la technologie 5G repose sur des parties du spectre proches du WiFi, dont la gamme de fréquence dite « sub-6 GHz » se situe entre 2,4 GHz et 6 GHz. Cette caractéristique oblige les fournisseurs de services habitués à jouer avec le spectre sans fil à changer de stratégie. « Les fréquences inférieures à 6 GHz offrent un nouveau spectre à exploiter à ces fournisseurs », a déclaré Patrick Filkins, analyste principal de la recherche chez IDC. « Ils disposeront notamment de canaux plus larges et d’une meilleure latence ». Un autre problème, c’est qu’une partie du spectre de cette bande de fréquences est en libre usage. C’est le cas en particulier du spectre Citizens broadband radio service (CBRS), un système de partage dynamique dans la bande 3 550-3 700 MHz, et le spectre Genera Eccess Authorized (GAA) de niveau 3 ouvert et flexible pour de nombreux utilisateurs potentiels, compris entre 3,5 GHz et 3,7 GHz. Ce dernier spectre utilise un système dit d'accès prioritaire, les opérateurs historiques, en particulier la marine américaine et les stations terrestres de satellites étant les premiers à bénéficier de cet accès prioritaire. Cependant, les autres peuvent utiliser les fréquences partout où ils n'interfèrent pas avec les opérateurs historiques. Il va sans dire que les transporteurs avides de spectre sont intéressés par cet accès. A mesure que les opérateurs individuels occuperont une part de ce précieux spectre, la couverture 5G continuera de s'étendre et les avantages qu’il offre par rapport au WiFi deviendront plus évidents dans certains cas d’usage particuliers. Le spectre 5G est attribué à un titulaire de licence par zone géographique, alors que le WiFi n’est pas soumis à cette règle d’exclusivité. N'importe qui peut l'utiliser n'importe où, ce qui laisse craindre des chevauchements de signaux et des interférences. « La manière dont le cellulaire est déployé est très déterministe. L'un de ses gros avantages par rapport au WiFi, c’est qu'il permet de surmonter ce problème d'interférence pour lequel le WiFi n'apporte pas encore de réponse forte », a déclaré M. Filkins.
Le bon côté des choses : l’onde millimétrique
Malgré toute son optimisation et sa sophistication, la 5G a encore besoin d’une grosse quantité de bande passante pour tenir ses promesses de débit à l'échelle du gigabit. Et malgré la quête énergique de bande passante dans les basses fréquences par l'industrie du sans-fil, il n'y a tout simplement pas assez d'espace disponible dans les fréquences sub-6 GHz et 1 GHz qui comptent parmi les plus recherchées. Heureusement, il y a la technologie des ondes millimétriques, qui fonctionne entre 24 et 60 GHz, selon l'expert auquel on s’adresse et la technologie concernée. Ces bandes de fréquences particulièrement élevées permettent des canaux de transmission particulièrement larges, et donc des vitesses de connexion fulgurantes. Mais elles ont aussi beaucoup d'inconvénients. « La seule chose positive avec les fréquences d'ondes millimétriques, c'est qu'elles sont vides, et il y a donc beaucoup d'espace », a déclaré Bill Ray.
Grâce à la physique fondamentale, les signaux dans la gamme des ondes millimétriques ne se propagent pas très loin par rapport à ceux des régions inférieures du spectre RF, et ils ne traversent pas les objets solides comme les murs et les fenêtres. Cela signifie que pour couvrir une zone donnée, même à l'intérieur d'un seul bâtiment, il faut déployer un nombre très important de points d'accès. « La technologie n'est pas encore adaptée pour un déploiement en entreprise », a déclaré M. Filkins. « L’histoire manque encore de consistance, mais cela reste très prometteur ». La technologie des ondes millimétriques existe depuis au moins une décennie. Le monde du sans-fil sans licence a longtemps fonctionné avec la norme 802.11ad, laquelle n’est rien d’autres que du WiFi fonctionnant sur des fréquences d’ondes millimétriques. Qualcomm et Huawei fabriquent tous deux des équipements fonctionnant dans cette gamme de fréquence, mais les limites de cette technologie, plus le nombre très limité de terminaux pouvant réellement en tirer parti, font qu'elle est restée sur la touche.
Une technologie d'avenir
Bien sûr, cela ne durera pas éternellement. La demande croissante de bande passante sans fil laisse penser que le besoin de spectre sera tellement élevé qu’il faudra faire appel aux ondes millimétriques pour y faire face. « Le reste du monde finira par utiliser les ondes millimétriques, mais c’est encore trop tôt », a déclaré M. Ray. Pour l'instant. En effet, parce que l'ajout d'antennes et de modems à ondes millimétriques aux téléphones mobiles et aux ordinateurs portables augmente leur coût unitaire d’à peine 20 euros, selon M. Ray, les ondes millimétriques resteront une technologie d'avenir.