Sur un marché des télécoms BtoB évalué à 7 milliards d’euros avec d’un coté des opérateurs installés et de l’autre des indépendants qui font monter les enchères quant à leur cession, Bouygues Telecom Entreprises cherche à calmer le jeu : « Certains se comportent comme des acteurs grand public » explique François Treuil, directeur général de Bouygues Telecom Entreprises. Lors d’un petit-déjeuner de presse la semaine dernière à Paris, ce dernier a réexpliqué le positionnement BtoB du troisième opérateur français qui vient de finaliser les rachats de Nerim et Keyyo. Ces deux opérateurs alternatifs, désormais pilotés par Pierre Amann pour le premier et Luc Perraudin pour le second, vont venir aider Bouygues Telecom a développé ses offres auprès des PME.
« On trouve deux marchés dans le marché, avec d’un coté les grands comptes, ETI et services publics où Bouygues Telecom travaille avec une entreprise sur trois, soit une part de marché de 30% environ, et de l’autre les PME, au nombre de 800 000, où nous ne possédons que 10% de part de marché. Et, nous sommes plus forts sur le mobile que sur le fixe ». Pour gagner plus rapidement des parts de marché, Bouygues Telecom a donc choisi de passer par la case rachat pour accélérer sur le BtoB. « On essaye de passer de 10 à 15% [pour la donnée] sur les PME, avec un cap à deux, trois ans. Nous sommes à 30% pour les mobiles et on veut aussi progresser. Pour le fixe, nous sommes à 4% et on veut monter à 10% le plus vite possible en maîtrisant 100% des paramètres ».
Un appoint bienvenu sur le segment PME
« Nerim, avec un chiffre d’affaires de 30 millions d’euros, principalement auprès des PME, va pouvoir proposer des offres couplées mobiles/FTTH ou fibre optique reposant sur les lignes de Bouygues Telecom. Ils achetaient auparavant leurs lignes chez Orange, aujourd’hui, ils le feront chez nous », indique le dirigeant de la branche entreprise de l’opérateur. « Keyyo a un très bon savoir faire auprès des entreprises de 1 à 50 salariés avec une offre 100% digitale. C’est l’opérateur le plus digital avec des coûts très maîtrisés […] On ne peut pas envoyer un vendeur trois fois par an dans une PME qui affiche un budget télécom annuel de 2 000 euros ».
L’opérateur compte surfer sur la fin du RTC ou la montée en puissance du SD-WAN – avec Versa - pour conquérir des clients, mais sans démultiplier son catalogue de produits et services. Le cloud (Iaas et PaaS) et la cybersécurité ne sont, par exemple, pas directement traités pas Bouygues Telecom Entreprise. « Faire tout, ce n’est pas faire les choses bien », souligne le dirigeant de l’opérateur BtoB. « Quand nous livrons un accès IP, il est décontaminé, mais nous ne faisons pas d’audit des postes de travail et pas d’analyse des logs ». Des partenaires sont mis en avant si besoin, mais Bouygues Telecom Entreprises n’est pas un acteur de la cybersécurité comme peut l’être OBS avec son entité Cyberdéfense dirigée par Michel Van Den Berghe, et ce même s'il a créé une joint-venture avec Telefonica, Telefonica Business Solutions France pilotée en France par Anne Perrin.
Un opérateur industriel avec 1 400 employés
Confronté à plus grands que lui sur le marché des entreprises, mais également à plus petits, Bouygues Telecom Entreprises poursuit ses investissements dans les infrastructures, avec plus de fibre, et entend bien profiter des déboires d’un concurrent – SFR pour ne pas le citer – pour progresser sur tous les fronts. Avec ses 1 100 employés, et 300 de plus avec ses deux nouvelles filiales Nerim et Keyyo, l’opérateur « industriel » entend également contenir l’arrivée d’Iliad sur son marché avec le rachat de Jaguar Networks en janvier dernier. « Free est encore marginal mais SFR qui a perdu le marché du retail tente de se rattraper sur celui du gros (les fibres de 10 à 10 méga ». Les prix du gros ont chuté sur les infrastructures, mais la conquête des entreprises est difficile, car il n’existe pas de portabilité du numéro comme pour les téléphones mobiles. « Les investissements nécessaires pour l’inventaire de l’équipement, l’audit, les services et les coûts de switching d’un réseau de données grèvent les 12 premiers mois d’exploitation. On ne commence à gagner de l’argent qu’au bout d’un an. Pour un contrat de 400K€ par an, la migration nous coûte le même prix », indique M. Treuil. Il est nécessaire de fluidifier le marché des entreprises et c’est le travail de l’Arcep. « Quand on gagne un client, on aimerait récupérer les informations de routage, mais ce n’est pas toujours le cas. Heureusement, l’arrivée du SD-WAN devrait nous aider pour les migrations même si le SD-WAN n’est pas encore très bien connu des PMI/ETI »
Lors de cette matinée chez Bouygues Telecom Entreprises l’arrivée de la 5G pour un usage professionnel a bien évidemment été abordée notamment dans un cadre IoT. « Les offres BtoC arriveront avant le BtoB une fois les fréquences attribuées et les infrastructures déployées ». L’opérateur attend encore certaines précisions réglementaires, notamment le sort réservé à Huawei, pour un déploiement en 2021/2022. « Nous allons assister à un basculement avec une segmentation des usages : régler les problèmes de saturations dans les centres-villes, redonner de l’air à certains usages, débit garantie, GPR, implémentation de classes de services…Mais tout ne basculera pas sur la 5G ». Mais tout ne basculera pas sur la 5G ». On peut facilement augmenter la bande passante sur des réseaux fixes avec des coûts marginaux mais avec la 5G, qui nécessite un câblage – ou un recablage - en fibre de tous les points d’accès, il va se passer un peu de temps avant de passer au 10 gigabit/s.