« On va créer un champion européen de classe mondiale dans les paiements électroniques avec certainement la plus grande opération de rapprochement dans les paiements électroniques jamais effectuée », s'est félicité Gilles Grapinet, PDG de Worldline, lors d'un point presse ce lundi matin. Ce rapprochement, c'est celui entre Worldline - ancienne filiale d'Atos positionnée dans les transactions de paiements redevenue indépendante début 2019 - et Ingenico, spécialisé dans les terminaux et systèmes de paiement. Le montant de cette opération pourrait atteindre 2,5 milliards d'euros comprenant une partie en cash (1,5 milliard), l'émission d'obligations convertibles (500 millions) et le rachat des actions minoritaires suite au retrait de la cotation d'Ingenico (squeeze out) d'un montant maximal de 500 millions. Selon les termes de l’offre publique, les actionnaires d’Ingenico se verront recevoir 11 actions Worldline et 160,5 euros en numéraire pour 7 actions apportées.
Ce rachat est réalisé dans le cadre d'une OPA amicale proposée par le conseil d'administration de Worldline et approuvé par le conseil d'Ingenico. A l'issue du bouclage de ce rachat, les actionnaires d'Ingenico devraient représenter 35% de l'actionnariat de la future société et le conseil d'administration de Worldline sera élargi à 6 nouveaux membres et dont le directeur général sera Gilles Grapinet et le président Bernard Bourigeaud. Le nouvel ensemble fruit du rapprochement entre Worldline et Ingenico pointerait à la 4e place sur le marché porteur des terminaux et services de paiement sur lequel plusieurs concentrations ont été enregistrées, en particulier aux Etats-Unis, ces derniers mois (Global Payments/Total System Services, Fiserve/FirstData et FIS/Worldpay). La finalisation de ce rachat doit avoir lieu au 3e trimestre 2020, sous réserve de l'approbation des actionnaires respectifs des deux groupes et des autorités financières, commerciales et juridiques compétentes. D'après Worldline, les risques anti-concentration devraient pouvoir être gérés avec « un impact modéré » sur le regroupement des deux groupes, Worldline n'ayant par exemple quasiment aucune présence aux Etats-Unis.
Réallocation des effectifs sur les activités en croissance
L'activité de Worldline est répartie en trois grands pôles : un métier principal de services de paiement aux commerçants (400 000 clients), des services de traitements financiers et de sécurisation des paiements en France auprès de 300 banques et virements instantanés, et également des solutions technologiques dédiées aux paiements pour différents acteurs institutionnels dans le cadre de leurs prélèvements (impôts/taxes, sociétés de transport...). Côté Ingenico, le groupe est historiquement présent dans les systèmes et terminaux de paiement mais a fait évoluer son activité sur les services de paiement et Internet (Easycash, Ogone, Global Collect et Bambora, le partenariat avec la start-up Pundi X spécialisée en cryptomonnaie...). Sur le plan de la R&D, les niveaux de dépensent prévus se situent autour de 300 millions par an avec pour objectif d'accélérer sur l'enrichissement de solutions verticales, la blockchain, la sécurisation des transactions et la performance des traitements. Sans oublier la poursuite de sa transformation d'un modèle de vente de logiciels vers le cloud avec une progression de ses revenus plus récurrents.
Le nouvel ensemble composé de Worldline et Ingenico devrait peser 5,3 milliards d'euros de chiffre d'affaires pour un free cash flow de 600 millions d'euros. Aucune prévision de résultat net n'a en revanche été apportée. Le futur groupe comptera 20 000 employés : reste à savoir si les effectifs seront simplement l’addition entre ceux de Worldline (12 000) et d'Ingenico (8 000) et comment seront dès lors gérés les doublons, les deux entreprises évoluant dans un environnement certes complémentaire en termes géographique (Allemagne, Asie-Pacifique) mais similaire sur certaines activités. « On est une société qui a toujours su faire ses synergies, libérer des positions de travail et réallouer les effectifs sur les activités de croissance », a précisé Gilles Grapinet. Les deux groupes tablent par ailleurs sur 250 millions d'euros de synergies financières et opérationnelles d'ici 2024.