Au total, dans les deux procès intentés contre Motorola, Apple revendique pas moins de six brevets (on peut en lire le détail dans le document Patently Apple). La procédure fait aussi office de contre-attaque contre Motorola, qui avait affirmé au mois d'octobre qu'Apple violait 20 de ses brevets.
Deux brevets attirent l'attention du non spécialiste : le United States Patent 7812828, intitulé Ellipse Fitting for Multi-Touch Surfaces ou Structure en Ellipse pour surfaces multitouch. Celui-ci concerne « les fonctions se rapportant au suivi simultané par plusieurs doigts ou résultant des contacts avec la paume de la main au moment où celle-ci se rapproche de l'appareil, le toucher et le glissement induit par le système de détection de mouvement de proximité, le multipoint de surface. L'identification des configurations et la caractérisation des déplacements manuels intuitifs permettant une intégration sans équivalent de la frappe, de la pause, du pointage, du défilement, de la manipulation d'images 3D, et de l'écriture sur un appareil informatique ergonomique et polyvalent. » L'autre brevet concerne le Multipoint Touchscreen, c'est à dire l'écran multipoint. Celui-ci est décrit comme « un écran tactile ayant une interface transparente capable de détecter les frappes multiples ou les quasi frappes pouvant se produire simultanément et à des endroits distincts sur le plan de l'écran tactile et capable de produire des signaux distincts en fonction de la localisation de la frappe sur la surface de l'écran tactile, chacun étant associé à une frappe. »
Utiliser Motorola pour intimider Google ?
Autrement résumée, cette description pour juriste concerne dans les deux cas le toucher sur un écran avec plusieurs doigts en même temps. Jusque là , la firme de Cupertino n'avait jamais impliqué ses brevets dans des procédures engagées contre des fabricants de smartphone. Par exemples, les actions judiciaires menées contre HTC et Nokia ne ciblaient pas spécifiquement le multi-touch. Dans le passé, ce qu'Apple a, au plus, revendiqué, à la fois contre les deux constructeurs, concernait « un appareil à écran tactile, la méthode, et l'interface utilisateur graphique pour la détermination des commandes résultant de l'application de calculs heuristiques». Cette définition avait été alors reconnue comme le brevet clef d'Apple en matière de multi-touch. Mais comme l'a souligné Nilay Patel du site Engadget, elle ne décrit en rien ce qui ressemble vraiment au multipoint. Le brevet couvre simplement la manière dont un iPhone réagit quand on lui demande de faire défiler une fenêtre de haut en bas, ou d'un côté à l'autre de l'écran, selon l'angle de frappe du doigt sur l'écran.
Cela semble assez irréel aujourd'hui, mais il y a bien eu un temps où les smartphones, hormis l'iPhone, ne disposaient pas du multi-touch. Palm avait ouvert la voie avec son Pre, sans être poursuivi. Android avait suivi. Maintenant ce procédé fait partie des caractéristiques communes à tout smartphone. Selon la rumeur, Google aurait conclu un gentleman's agreement avec Apple, par lequel elle s'engageait à ne pas utiliser ce système sur Android. Mais depuis Apple et Google sont devenus d'âpres rivaux sur le marché du smartphone, si bien que l'accord, passé dans le cadre d'un partenariat fragile, a sans doute échoué. Apple n'attaquera probablement pas directement Google en justice. Si bien que pour l'instant seul Motorola se retrouve au banc des accusés pour d'avoir utilisé l'une des fonctionnalités les plus importantes de l'iPhone et les conséquences pourraient s'avérer importantes. Mais comme dans tous les procès actuellement en cours où la propriété de brevets est en jeu, celui-ci ne devrait pas être résolu de sitôt.
Apple met le multi-touch au coeur d'un procès contre Motorola
La plainte déposée par Apple contre Motorola n'est qu'une étape de plus dans un litige de propriété de brevets compliqué, sauf qu'elle met le multi-touch, une fonctionnalité que l'on retrouve dans la plupart des smartphones actuels avec écrans tactiles, au coeur de la bataille.Â