C’est grâce à Anacrim que l’affaire Grégory refait aujourd’hui surface. Cette plateforme d’analyse de bases de données multi-formats (lieux, dates, personnes, etc.) a permis de mettre en évidence plusieurs éléments que les enquêteurs avaient manqué à l’époque. « Nous avons importé cette solution au début des années 90. La version que nous utilisons maintenant a une dizaine d’années », précise la lieutenant-colonel Karine Lejeune, porte-parole de la Gendarmerie Nationale. Cette mouture est basée sur la solution Coplinks de la société canadienne I2, qui a été rachetée par IBM en 2011.
Dans le cadre de l’affaire Gregory, ce sont 12 000 pièces (procès, verbaux, auditions des témoins, analyses ADN) du dossier qui ont été analysés par la plateforme. « Nous les intégrons via une interface dédiée. Il a fallu entre 6 et 8 mois à deux analystes pour toutes les rentrer dans Anacrim », détaille Karine Leujeune. Elle précise que seule des pièces venant du dossier d’instruction peuvent être utilisées dans Anacrim pour respecter la procédure d’enquête. L’utilisation de métadonnées extérieures entrainerait l’invalidation de celle-ci.
Visualiser graphiquement les tenants et les aboutissants de l'enquête
Pourvue comme la plupart des solutions analytiques d’une interface de visualisation graphique, Anacrim met ainsi en évidence les liens qui relient les différents protagonistes d’une affaire. « La plateforme nous permet de resituer tous les éléments dans le temps et l’espace et ainsi de confronter simultanément les différents témoignages et informations, ce qu’une personne physique ne peut faire. Imaginez si une personne seule devait mémoriser tous les PV d’auditions d’une enquête pour pouvoir les confronter », explique la lieutenant-colonel.
Il est aussi possible pour les enquêteurs de cibler certains lieux ou protagonistes et de visualiser graphiquement leurs liens avec d’autres éléments de l’enquête. Ce sont en tout cas ces fonctionnalités de visualisation graphique qui ont permis aux enquêteurs de faire la différence de la cadre l’affaire Gregory. Utilisée par le Service Central du Renseignement Criminel (SCRC) ainsi que toutes les autres sections de recherches, Anacrim a également fait ses preuves dans les affaires Heaulme, Marion Wagon ou celle des disparus de l’Yonne. « Ce n’est pas une solution miracle. Nous l’utilisons surtout dans le cadre d’enquête faisant apparaitre beaucoup de protagonistes et d’interaction, comme dans la lutte contre le trafic de drogue », tempère Karine Lejeune.