La sanction est tombée et elle est lourde. Google a abusé de sa position dominante sur le marché des moteurs de recherche pour promouvoir illégalement son service de comparaison de magasins, a finalement statué ce mardi l’autorité antitrust de l'Union européenne infligeant à la société californienne une amende de 2,42 milliards d'euros (2,72 milliards de dollars). La conséquence pourrait être encore plus grande dans les façons dont Google présente les résultats de recherche aux utilisateurs de l'UE.
La Commission européenne a en outre donné 90 jours de délai à la société pour changer ses façons ou elle devra faire face à des amendes supplémentaires allant jusqu'à 5% du chiffre d’affaires mondial quotidien de sa société mère Alphabet pour chaque jour que l'infraction a continué. La décision de la Commission vise la façon dont Google utilise son service de recherche pour promouvoir un autre service, «Google Shopping», précédemment connu sous le nom de Google Product Search et Froogle.
Combattre les habitudes installées
Google affiche son propre service dans ses résultats de recherche généraux, au-dessus de celui des services de comparaison concurrents, a déclaré la Commission, notant que même le service concurrent le mieux classé apparaît en moyenne uniquement à la page quatre des résultats de recherche de Google. « En conséquence, les concurrents sont beaucoup moins susceptibles d'être cliqués », a déclaré Margrethe Vestager, commissaire européenne à la concurrence, lors d'une conférence de presse mardi.
Sur un des blogs, la firme de Mountain View a répondu que « les utilisateurs préfèrent généralement les liens qui les mènent directement aux produits qu'ils souhaitent, et non aux sites web où ils doivent répéter leurs recherches ». Les concurrents ont vu leur trafic diminuer jusqu'à 90% en raison du comportement de Google, a déclaré madame Vestager, tandis que Google a gagné des revenus en conduisant les visiteurs à son propre service. « Il a refusé à d'autres entreprises la chance de concourir selon leurs mérites », a-t-elle déclaré.
L'abus de position dominante commis par Google. Source: StatCounter
Shivaun Raff, PDG et cofondateur de Foundem, un moteur de recherche britannique spécialisé dans les prix des produits et principal plaignant de l'affaire, s'est félicité de la décision de la Commission d'interdire les actions de Google. « Bien que l'amende record de 2,42 milliards d'euros soit susceptible de dominer les manchettes, l'interdiction des pratiques de manipulation de la recherche immensément dangereuses de Google est beaucoup plus importante" » a-t-elle déclaré.
Margrethe Vestager a pointé que c'était à Google de décider exactement de la façon de se conformer à la décision. « Google ne peut pas simplement arrêter ce qu'il fait maintenant et le remplacer par des pratiques similaires qui ont le même effet anticoncurrentiel », a-t-elle déclaré, avertissant la compagnie que la Commission surveillerait ses comportements de près pendant un certain nombre d'années. La Commission a analysé 5,2 téraoctets de résultats de recherche, soit l'équivalent de 1,7 milliard de recherches, en conclusion, a-t-elle déclaré. La Commission a également mené des expériences pour voir si les préférences des utilisateurs pour les meilleurs résultats de recherche étaient liées à leur pertinence, ou simplement à leur position dans la liste, et ont constaté que le même résultat, lorsqu'il était déplacé de la première à la troisième place, a reçu beaucoup moins de clics.
D'autres services Google sous le coup d'une enquête
Madame Vestager a également prévenu que la promotion de Google Shopping pourrait ne pas être la seule façon dont Google abuse de la recherche pour promouvoir ses autres services de recherche spécialisés, y compris les images et Maps. « Nous avons prouvé que Google est une entreprise dans une position dominante dans la recherche générale. Ce sera le point de départ de notre analyse de ces autres services », a-t-elle déclaré.
Le cas de la recherche sur Internet n'est pas le seul dossier que la Commission a ouvert contre Google. Il étudie également sa plate-forme de publicité AdSense et sa promotion d'applications et de services liés à son système d'exploitation Android. « Notre conclusion préliminaire en ce qui concerne les deux pratiques est qu'elles enfreignent les règles antitrust de l'UE », a déclaré M. Vestager. Elle a invité Google à concourir avec ses seuls avantages et à tirer le meilleur parti du marché de l'UE, fort de 500 millions de consommateurs.