L’arrivée de leur solution sur le marché en 2011 a dû en aider plus d’un. Le moteur de recherche de Yatedo permet aux recruteurs de chercher eux-mêmes les profils qui correspondent à leurs critères. Développé au départ par les deux fondateurs de la société, Amyne Berrada et Saad Zniber pour leur projet de fin d’études à Epitech en 2007, ce système de recherche va plus loin que celui de Google. L’algorithme va comprendre contenu des pages internet, analyser les informations relatives aux personnes et les synthétiser. « Au lieu d’avoir une liste de pages web, l’utilisateur va avoir uniquement les informations qui sont relatives à la personne qu’il est en train de chercher », explique Saad Zniber. Yatedo va ainsi agréger toutes les informations relatives à un candidat (sur les réseaux sociaux, les CVthèques, etc.) pour fournir au recruteur une fiche d’identité de ce dernier.
Après avoir levé 2M€ en janvier 2017 pour investir en R&D, la start-up a intégré, fin janvier dernier, l’IA Factory de Microsoft, basée à Station F. Cet accélérateur et centre de recherche permet aux six start-ups qui l’intègrent de bénéficier de l’aide de l’institut de recherche Inria et des équipes de Microsoft. Yatedo va ainsi pouvoir continuer d’améliorer les fonctionnalités de son outil.
Utilisation de l’IA à plusieurs niveaux
Car ce moteur de recherche utilise un algorithme qui va permettre de sélectionner précisément les les candidats correspondants aux exigences du recruteur en quelques secondes. L’intelligence artificielle opère à plusieurs niveaux. D’une part, dans la sélection des informations sur internet. C’est la première fonctionnalité que les deux fondateurs avaient développée. Le moteur Yatedo Talent va classer les informations en fonction que ce soit des compétences, des entreprises, des titres de postes etc.
Puis, en 2016-2017, les équipes de la start-up ont mis en place Yatedo Intelligence. A partir d’une base de données de plus de 800 millions de personnes sur internet, l’outil va étudier le parcours d’un candidat et le comparer à cette base pour fournir des indicateurs. Le recruteur va ainsi pouvoir filtrer les candidats de sa première recherche qui sont potentiellement sur le départ de leur poste actuel ou en recherche d’emploi, définir le degré d’implication dans son travail (s’il participe des Moocs, des forums en ligne, etc.), etc. « L’algorithme étudie le parcours d’autres personnes dans la même zone géographique, celles qui ont occupé le même poste dans le même genre d’entreprise ou celles qui étaient au même poste dans la même entreprise va faire des prédictions avec un niveau de pourcentage » continue Saad Zniber.
Après avoir entrer un terme dans la barre de recherche, le recruteur va pouvoir filtrer les profils selon différents critères grâce à la fonctionnalité « Yatedo Intelligence ». (Crédit : Yatedo)
Selon le fondateur de la start-up, les recruteurs avaient également des difficultés à trouver certains profils car la dénomination du poste qu’ils recherchaient était différente par rapport à l’intitulé d’un poste dans une entreprise concurrente. Un commercial peut très bien être « accord manager » quelque part, ou « business developper » ailleurs. « Notre algorithme ne va pas chercher en fonction du terme sémantique qui a été tapé dans la barre de recherche mais selon les compétences et les particularités de ce poste » indique Saad Zniber, ce qui va permettre de regrouper tous les profils similaires malgré l’intitulé de leur poste.
« On n’est qu’aux balbutiements de l’IA »
D’aucuns diront que cette technologie remplacera bientôt les recruteurs. Le co-fondateur de Yatedo n’est absolument pas d’accord. « Aujourd’hui, si on compare le niveau de l’intelligence artificielle la plus évoluée à celle d’un cerveau humain, ce dernier est des millions de fois plus évolué et plus puissant que n’importe quelle IA. Un être humain peut très bien jouer au go, faire du vélo, réaliser des entretiens d’embauche. Pour le moment, on a seulement réussi à créer des intelligences qui sont douées dans un seul et unique domaine. Ce ne sont finalement que des systèmes automatisés intelligents. »
Au niveau du recrutement, l’IA ne vient pas remplacer l’être humain mais l’accompagner. « Ce n’est pas encore l’IA qui fait passer un entretien d’embauche et qui dit au directeur qu’il faut embaucher ce candidat et pas un autre » soutient Saad Zniber. Pour le chef d’entreprise, l’IA n’en est qu’à son balbutiement aujourd’hui et la chance qu’ont les gouvernements c’est de savoir que ce changement technologique va arriver dans « un laps de temps assez lointain, ce qui nous laisse le temps pour préparer son arrivée. »
La France sur la bonne voie
Saad Zniber pense notamment à la possibilité pour l’Education nationale de se mettre à niveau en prévoyant l’arrivée des métiers de demain. « On va pouvoir réfléchir à comment préparer les enfants de demain à ces métiers-là. Pour être sûr que l’IA exécute et automatise certaines tâches, on ne se retrouve pas avec des gens qui sont formés à effectuer ces tâches et qui se retrouveraient sans métier derrière. » Pour le co-fondateur de Yatedo, la demande des métiers autour de la data va continuer à exploser dans les années qui viennent.
Selon une étude d'Infosys sur les retours sur investissement généré par l'IA, les entreprises ont des difficultés à trouver du personnel qualifié pour déployer les technologies IA en leur sein dans tous les secteurs. (Crédit : Infosys)
Dans ce contexte, la France est très riche en ingénieurs mais moins financièrement, « mais on est sur une pente ascendante » indique Saad Sniber. Malgré le fait que l’écosystème de l’intelligence artificielle française soit moins riche qu’au Canada ou que dans la Silicon Valley, « la France n’est pas en retard du point de vue technologique » affirme le chef d’entreprise. Les plus gros chercheurs en matière d’IA, que ce soit Google ou Facebook, on ainsi ouvert des centres de recherche sur l’IA en France depuis quelques temps.
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