Après le nucléaire et le spatial, le numérique et plus particulièrement l'intelligence artificielle semblent être devenus les nouveaux enjeux géopolitiques pour une domination technologique du monde. Comme Albert Einstein et Robert Oppenheimer avaient critiqué les armes nucléaires, nombreuses sont les voix, de Stephen Hawking à Elon Musk en passant par Bill Gates, à alerter sur les dangers de l'IA. Au contraire de la bombe nucléaire, l'IA n'est pas un enjeu de pouvoir seulement pour les états : les entreprises privées s'en donnent à coeur joie, notamment les fameuses GAFAM. Dans ce contexte, le directeur et fondateur de l'Institut de Relations Internationales et Stratégiques (IRIS), Pascal Boniface, signe un nouvel ouvrage paru chez Eyrolles : « Géopolitique de l'intelligence artificielle - Comment la révolution numérique va bouleverser nos sociétés ». Non-technicien parfaitement revendiqué, l'auteur pose un regarde de géopoliticien et de stratège sur le sujet de l'IA. Créer de l'IA (comme hier des bombes nucléaires) a en effet quelques conséquences. Les comprendre est le minimum que l'on puisse attendre de ceux qui mettent en oeuvre cette technologie, à commencer par les DSI.
Pour commencer, Pascal Boniface revient sur l'histoire et les définitions de l'IA en repartant de l'article de 1951 d'Alan Turing et des travaux de la DARPA (Defense Advanced Research Projects Agency), jusqu'au renoncement à une définition globale incontestable formalisé par Cédric Villani. Plus encore que les révolutions technologiques précédentes, celle de l'IA est intimement liée à une problématique économique : c'est bien la baisse du coût de la mémoire et de la puissance de calcul qui va permettre l'émergence réelle de l'IA, pas de grandes avancées théoriques spécifiques, l'essentiel des théories nécessaires ayant été imaginé dès les années 1950. Par contre, les conséquences sociales et économiques de l'IA commencent à inquiéter largement, faisant craindre à l'auteur une sorte de nouvelle Révolte des Canuts, cette fois non contre les métiers à tisser mais contre le numérique.
Car la problématique socio-économique est majeure. Comme le demande l'auteur, l'IA est-elle une corne d'abondance ou une machine à exclure ? Le coeur de l'ouvrage est évidemment constitué de l'étude des nouveaux rapports de force qui s'installent à cause de l'IA. Ces rapports de force peuvent être géopolitiques au sens strict, y compris de géopolitique économique, mais aussi sociaux avec des conséquences politiques donc géopolitiques. La place de l'Europe et spécialement de la France peut ainsi inquiéter comme elle inquiète l'auteur. Les renoncements ayant abouti à l'échec du Plan Calcul n'incitent pas, il est vrai, quand on les rappelle, à l'optimisme. A l'heure où l'IA se taille une place sans cesse plus grande, les réflexions menées par Pascal Boniface sont du plus grand intérêt pour n'importe quel décideur du numérique.
Vers une géopolitique de l'intelligence artificielle
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Le directeur et fondateur de l'Institut de Relations Internationales et Stratégiques (IRIS), Pascal Boniface, signe un nouvel ouvrage paru chez Eyrolles : « Géopolitique de l'intelligence artificielle ».
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