La technique du beamforming (filtrage spatiale) consiste à focaliser un signal sans fil vers un dispositif de réception spécifique, au lieu de le diffuser dans toutes les directions à partir d'une antenne radio, comme c'est habituellement le cas. La connexion, plus directe, est plus rapide et plus fiable qu'elle ne le serait sans formation de faisceau.
Fonctionnement du beamforming
Une seule antenne diffusant un signal sans fil diffuse ce signal dans toutes les directions (à moins qu'il ne soit bloqué par un objet physique). C'est la nature du fonctionnement des ondes électromagnétiques. Mais que se passerait-il si l'on voulait focaliser ce signal dans une direction spécifique, pour former un faisceau d'énergie électromagnétique ciblé ? Une technique consiste à utiliser plusieurs antennes à proximité les unes des autres, toutes diffusant le même signal à des moments légèrement différents. Les ondes qui se chevauchent produisent des interférences qui, dans certaines zones, sont constructives (elles rendent le signal plus fort) et, dans d'autres, destructives (elles rendent le signal plus faible ou indétectable). S'il est bien réalisé, le processus de beamforming peut concentrer le signal là où l'on veut qu'il aille.
Les équations mathématiques du beamforming sont très complexes (le blog de Math Encounters offre une bonne introduction sur le sujet), mais l'application des techniques de beamforming n'est pas nouvelle. Toute forme d'énergie qui voyage dans les ondes, y compris le son, peut tirer profit des techniques de formation de faisceau. Ces techniques ont été développées pour améliorer le sonar pendant la Seconde Guerre mondiale et elles sont toujours importantes dans l'ingénierie audio. Mais cet article se limitera à son usage dans les réseaux et les communications sans fil.
Avantages et limites du beamforming
En concentrant un signal dans une direction spécifique, le beamforming permet d'envoyer un signal de meilleure qualité au récepteur. Cela signifie en pratique que le transfert d'information sera plus rapide et moins sujet aux erreurs, et ce, sans avoir besoin d'augmenter la puissance de diffusion. Le beamforming est en quelque sorte le Graal des réseaux sans fil et l'objectif qu'ambitionnent la plupart des techniques visant à améliorer les communications sans fil. De plus, étant donné que l'on ne diffuse le signal que dans les directions où l'on a besoin de le diffuser, le beamforming peut réduire les interférences subies par les personnes qui essayent de capter d'autres signaux.
Les limites du beamforming concernent principalement les ressources de calcul dont il a besoin. Il y a beaucoup de situations où le temps et les ressources de puissance requis par les calculs de formation de faisceau finissent par rendre ses avantages nuls. Mais l'amélioration continue de la puissance et de l'efficacité des processeurs fait que les techniques de beamforming sont devenues suffisamment abordables pour être intégrées dans les équipements de réseaux grand public.
Routeurs WiFi avec beamforming : 802.11n vs. 802.11ac
Les premiers routeurs intégrant le beamforming sont apparus en 2008, avec l'avènement de la norme Wi-Fi 802.11n. Le 802.11n a été la première version du WiFi à prendre en charge la technologie MIMO (« multiple-input, multiple-output », ou « entrées multiples, sorties multiples »), indispensable à la technologie beamforming pour envoyer plusieurs signaux se chevauchant. Mais le beamforming des équipements 802.11n n'a jamais vraiment eu de succès, parce que la spécification ne précise pas comment la formation de faisceaux doit être mise en oeuvre. Quelques fournisseurs ont bien lancé des implémentations propriétaires nécessitant l'achat combiné de routeurs et de cartes sans fil pour fonctionner, mais elles n'étaient pas populaires.
En 2016, avec l'émergence de la norme 802.11ac, tout a changé. Il existe désormais des techniques spécifiques de beamforming pour les équipements WiFi, et la spécification ne requiert pas nécessairement de routeurs 802.11ac pour implémenter la formation de faisceau. Et si c'est le cas (comme pour presque tous les routeurs du marché), l'implementation se fait de manière neutre et interopérable. Par ailleurs, si certains constructeurs l'indiquent ostensiblement sur leurs produits, comme l'AC Smart Beam de D-Link, les routeurs implementent toujours la même norme. (La norme 802.11ax, encore plus récente, prend toujours en charge le beamforming du WiFI ac.)
Beamforming et MU-MIMO
Le beamforming est essentiel pour le support MIMO multi-utilisateurs, ou MU-MIMO, toujours plus populaire à mesure du déploiement des routeurs 802.11ax. Comme son nom l'indique, le MU-MIMO implique que plusieurs utilisateurs peuvent communiquer chacun avec plusieurs antennes du routeur. Le MU-MIMO utilise le beamforming pour s'assurer que la communication du routeur cible efficacement chaque client connecté.
Beamforming implicite ou explicite ?
Il y a plusieurs façons de faire fonctionner le beamforming en WiFi. Si le routeur et le point d'extrémité prennent en charge le beamforming compatible avec la norme 802.11ac, ils commenceront leur session de communication par une petite « poignée de main » qui permet aux deux parties de valider leurs emplacements respectifs et le canal sur lequel ils communiqueront. Ce mode de connexion, connu sous le nom de beamforming explicite, améliore la qualité de la connexion. Mais beaucoup de cartes réseau encore utilisées aujourd'hui, ne prennent en charge que le 802.11n, voire même des versions plus anciennes du WiFi. Un routeur beamforming peut toujours tenter de cibler ces périphériques, mais sans l'aide du point d'extrémité, il ne pourra pas se concentrer aussi précisément. C'est ce que l'on appelle le beamforming implicite, ou parfois beamforming universelle, car il fonctionne en théorie avec n'importe quel appareil WiFi.
Le beamforming et la 5G
Jusqu'à présent, c'est sur les réseaux WiFi locaux que l'on avait le plus de chance d'être confronté au beamforming. Mais, avec le déploiement des réseaux 5G, cette situation est sur le point de changer. La 5G utilise des radiofréquences dans la bande des 30 à 300 GHz. Si ces fréquences peuvent transmettre les données beaucoup plus rapidement, elles sont aussi beaucoup plus sensibles aux interférences et elles ont plus de difficultés à traverser les objets physiques. De nombreuses technologies sont nécessaires pour surmonter ces problèmes, y compris en diminuant la taille des cellules, en augmentant massivement la couverture MIMO, notamment par la multiplication du nombre d'antennes sur les stations 5G. Et, bien sûr, avec le beamforming. Si la 5G décolle comme l'espèrent les opérateurs, le jour viendra où nous utiliserons tous les jours le beamforming, sans le savoir.
Commentaire